L'historien Shlomo Sand a publié le 25 février dernier sur son blog un article intitulé « À propos des sémites et des antisémites, des sionistes et des antisionistes ». Son intérêt est qu'il émane d'un israélien qui se proclame « partisan de la « désionisation » de l’Etat d’Israel ». Cette proclamation est dans la logique de son travail de recherche qui, après d'autres travaux de chercheurs moins connus, a apporté un démenti définitif à l'idée reçue de l'existence d'un peuple juif. Dans son livre « Comment le peuple juif fut inventé » (2008), il montre l'inanité d'une quelconque origine historique et/ou biblique d'un peuple juif, tout autant que la prétention de ceux qui s'en réclament selon laquelle la Palestine lui reviendrait de droit.
Du peuple juif à un État ségrégationniste
Israël n'a aucune légitimité à se présenter aujourd'hui comme l’État-nation du peuple juif. C'est là d'un des aphorismes du sionisme actuel qui consiste à considérer que toute personne se désignant, de son plein gré, ou désignée, à son insu, comme juive serait consubstantiellement liée à Israël. Cette idée est, consciemment ou pas, partagée par beaucoup de celles et ceux qui sont horrifié.e.s par la judéophobie et sa logique potentiellement criminelle. On sait qu'elle conduisit durant la seconde guerre mondiale à l'extermination d'une grande partie des juifs d'Europe. Mais, comme l'écrit Shlomo Sand « Cela ne justifie pas, pour autant, la définition sioniste selon laquelle les juifs forment un peuple-race. Cela ne justifie pas davantage la vision des sionistes décrétant que la Terre Sainte constitue la patrie nationale sur laquelle ils auraient des droits historiques. »
Une idée essentialiste
Cette idée essentialiste, celle de l'appartenance à un peuple juif, est largement partagée de bonne foi mais par méconnaissance ou par une sorte de compassion au demeurant tout à fait respectable. Elle se traduit par la croyance que toute personne identifiée par un nom hébraïque ou judéo - araméen, par exemple Hillel comme s'appelait mon père ou Lévy comme s'appelait ma mère, ou portant un nom donné à tord ou à raison comme juif, appartiendrait de fait à ce peuple. Et dans ces conditions, peu importe que cette personne soit croyante ou athée, qu'elle ait décidé de se désigner comme juive ou pas, elle ne peut échapper à ses racines ontologiques. Dans racine il y a race, et ce n'est pas par hasard si des intellectuels sionistes des 19 et 20 ème siècles ont beaucoup ratiociné sur le concept du peuple-race. Shlomo Sand dans son livre y revient à plusieurs reprises.
Mettre les ponts sur le i
j'affirme ici :
qu'une dangereuse confusion consiste à recourir au raccourci que je viens de désigner.
qu'être juif relève d'une confession religieuse et que c'est ajouter à cette confusion que de se revendiquer juif tout en affirmant n'être concerné en aucune manière par cette religion. Je fais référence tout particulièrement à l'l'UJFP (Union Juive Française pour la Paix) ou à Une autre voix juive animée par des communistes.
que l'antisémitisme est un fléau qu'il faut combattre sans faille, mais que l'efficacité de ce combat passe inséparablement par l'antisionisme.
qu'être antisioniste c'est reconnaître sans condition l'existence d'Israël et inséparablement dénoncer ses prétentions à un Grand Israël par lequel il justifie l'occupation-annexion des territoires palestiniens et la ségrégation des Palestiniens d'Israël.
que la reconnaissance droits du peuple palestinien implique le droit au retour des ascendants des Palestiniens chassés de leurs territoires en 1948, et la création d'un État palestinien ou celle d'un État unique non confessionnel laïque réunissant israéliens et palestiniens.