« L’antisémitisme parle la langue immaculée de l’antiracisme », ce sont les termes utilisés par Alain Finkielkraut, au détour de son discours de réception à l'Académie française. Sous la coupole dorée, c'était une sorte d'officialisation d'une thèse insoutenable qui vise à assimiler à des antisémites, celles et ceux qui dénoncent la politique de colonisation, d’occupation et d’apartheid d’Israël. Cette politique a pris depuis 2009, avec le gouvernement d'extrême droite de Netanyaou, une tournure extrêmement inquiétante, car maintenant, elle procède de la négation même du peuple palestinien. Ce qui est stupéfiant, c'est que cette thèse est soutenue par la plupart des États occidentaux, dont la France. La soi-disant compassion pour un « peuple » qui fut victime du génocide nazi n’apparaît plus que comme un prétexte, tant les raisons de stratégies géopolitiques s'affichent. Ce chantage est pourtant régulièrement utilisé pour délégitimer l'action des associations qui se battent pour les droits des Cisjordaniens et des Gazaouis. L'une des actions qui a prend de plus en plus d'ampleur est celle du boycott-désinvestissement- sanction. En France, ses organisateurs sont régulièrement traînés devant les tribunaux par des officines sionistes qui s'appuient sur les circulaires Alliot Marie et Mercier enjoignant le ministère public de poursuivre, sous le coup de discrimination raciste, les citoyens qui appellent au boycott des produits israéliens issus des colonies. A plusieurs reprises, les tribunaux les ont relaxés, comme pour les trois militants de Perpignan.
Réduire au silence les militants BDS
Mais, ils s'en trouvent encore qui acceptent de suivre les réquisitions du parquet, comme ce fut cas de la cour d'Appel de Colmar en novembre 2013 qui avait condamné des militants BDS pourtant relaxés en première instance par le tribunal correctionnel de Mulhouse en décembre 2011. Ce qui est grave, c'est que la cour de cassation d’octobre 2015 a confirmé l’arrêt de la cour d’Appel de Colmar. Et voilà maintenant, que Manuel Valls profèrent des menaces directes, du style de celles qu'il a énoncées le 18 janvier devant Les Amis du Conseil représentatif des institutions juives de France : « on est passé, a-t-il dit, de la critique d'Israël, à l’antisionisme et de l’antisionisme à l’antisémitisme ». Et voilà que le Conseil de Paris a adopté, le 16 février, malgré l'opposition des conseillers Front de gauche, un vœu présenté par les élus socialistes condamnant le boycott des produits israéliens sous prétexte que ce serait un acte de stigmatisation d'Israël. De son côté, la préfecture de Paris a récemment fait savoir qu'il était « interdit d’appeler au boycott des produits israéliens ». Comme l'a déclaré à juste titre l'Association France-Palestine solidarité : « Netanyahou aurait tort de faire le difficile : on lui offre sur un plateau plus qu’il n’osait sans doute espérer. Et tout indique que ce n’est-ce qu’un début. ».
Roger Hillel
Inacceptable assimilation
Le 7 mars, au dîner du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), Manuel Valls a une nouvelle fois déclaré « il y a l’antisionisme, c’est-à-dire tout simplement le synonyme de l’antisémitisme et de la haine d’Israël ». Faut-il être un piètre pour confondre un délit, l'antisémitisme, et une opinion, l'antisionisme. A moins que l'application de la récente loi sur la réforme pénale ne conduise à ce type d'assimilation ?