Ce soir, la flûte du berger est triste. Tama U Fella pleure son fils. Les collines d'At Yanni, la Kabylie, l'Algérie, Tamazɣa, l'humanité entière sont en deuil. Idir, El Hamid Cheriet, vient de chanter à la Muse de la lune la chanson du grand retour. « Azekka ad-nuɣal » (demain, nous reviendrons). Ces mots, il vient de les lui poser sur son front, tendrement, avant de partir...
- Idir, les étoiles t'appellent. Va les rejoindre. Tu reconnais celle qui d'entre elles, brille le plus ? Regarde-là un peu de plus près. C'est celle de Mouloud Mammeri, Dda L'Mulud. Il a hâte que tu le rejoignes.
Idir ferme ses yeux...Et son cœur s'ouvre sur un ciel étoilé. Il fait doux. Les étoiles sont de plus en plus nombreuses à scintiller. La nuit a mis sa plus belle robe faite de rêves, ses plus beaux bijoux à la couleur argentée du clair de lune.
Le silence n'est plus le silence. Il est poésie. La nuit n'est plus la nuit. Elle est mélodie.
- Ouvre-moi la porte A vava Inouva..., dit la chanson. Et la porte s'ouvre...
Dda L'Mulud, Mohia, Hachemi Bellali, Abdelkader Meksa, H'nifa, Cherifa, Ahcène Mézani, Slimane Azem, Moumouh Guessoum, Tahia, Mohamed Rouicha, Djamel Allam, Johnny Clegg, Charles Aznavour et beaucoup d'autres visages...Toute la tribu est là.
- Tu sais Hamid, nous t'attendions depuis longtemps sans vouloir te prendre aux tiens. Te rappelles-tu de cette lettre que je t'ai écrite à propos de Avava Inouva ? Ces mots-là son gravés au cœur de mon âme , semble lui dire Dda L'Mulud, le visage illuminé d'un sourire radieux. Il tend une feuille argentée qu'il tenait entre les mains à Idir. Hamid sourit et lit :
« Tu sais Hamid...,je ne pensais pas vivre avant de voir que la lumière de notre culture pouvait être si magnifiquement restituée et si bien interprétée. Tu lui as redonné la place qui lui revient de droit et là haut au ciel je sens que nos ancêtres jettent sur toi des bénédictions sous forme de poussières d’étoiles».
Cette lettre... Évidement ! Idir l'a toujours gardée dans le cœur de Hamid. Elle n'a jamais quitté Hamid. Elle ne quittera jamais Idir.
Dda L'Mulud invite Idir à avancer dans le jardin éternel du rêve ancestral...Des chants de Tiwizi leur viennent de loin...Ils se sentent attirés par ces chants...Ils hâtent le pas...Un peu plus loin, ils découvrent un spectacle magnifique. Les Noces de l'Olivier offrent à admirer la beauté des jardins du divin...
Viens te baigner à la Rivière de La Vie.
Une fleur attend ton cœur.
Un soleil attend ton âme
Un ciel attend tes yeux
Un chardonneret attend le chant
Qui t'habite
Sur une branche de cet olivier.
Viens ! Nous attendons que fleurisse
Le basilic de tes chants
Nous attendons que jaillisse
De toi l'éternelle chanson...
Viens nous chanter Ssendu
La Mère de toutes les mères
Y a déposé ses secrets.
Viens leur offrir ton printemps si doux
Sous tous les cieux
Sur toutes les terres
Pousseront des roses
Aux pétales de prières
Et au parfum d'une promesse
Que là où il y a des larmes
Là où il y a la misère
Là où il y a du sang
Là où il y a la guerre
L'Amour fleurira
Pour abattre les frontières
Et la paix répandra
La vie en lumière...
Viens ! Nous attendons que fleurisse
Le basilic de tes chants
Nous attendons que jaillisse
De toi l'éternelle chanson...
Idir avance...Hamid s'arrête devant l'une des sources qui coulent au bord de la rivière. Il boit de son eau et...Idir retrouve le sens profond de son nom : IL VIVRA !
Ṛuḥ di lehna a Yidir
Ak-iṛḥem Ṛebbi
Paix à ton âme
Ak-irhem Rebbi...
Hacène LOUCIF.