Nous disposons maintenant d’une série de textes en français d’intellectuels critiques qui vont grosso modo dans le même sens, tant pour l’analyse des événements récents que pour envisager des pistes d’avenir. Voici la liste (à compléter) des plus percutants.
La gauche et l’euro : liquider, reconstruire, par Frédéric Lordon
L’erreur de Tsipras, par Terry Anderson (le billet a changé de titre)
La Grèce, la gôche, la gauche, par Jacques Sapir
Les déclarations d’Emmanuel Todd sur la crise de l’Europe
Le texte d’Eric Toussaint sur Médiapart
voir aussi ses articles sur le blog du CADTM
Ainsi que les textes de plusieurs auteurs sur le blog de Paul Jorion
La crise de l’Europe est à son paroxysme. Elle révèle la vraie nature de la zone euro, espace économique et politique de la puissance dominante allemande. Elle met à nu la nature réactionnaire et antidémocratique des institutions de l’UE. Elle dévoile la soumission des 28 gouvernements, sans exception, à l’ordo libéralisme qui emprisonne les peuples dans un carcan démentiel. Celui-ci ne peut être remis en cause par aucun vote démocratique.
A côté de la droite dure, la pseudo-gôche y prend toute sa place, pour imposer partout l’austérité. Pour la social-démocratie, devenue un social-libéralisme assumé, le crétinisme parlementaire se double aujourd’hui de la religion mortifère de l’euro. L’exemple des « frondeurs » et des écolos qui ont rejoint illico le troupeau des croyants en bêlant le même cantique montre l’ampleur des dégâts.
Quand à la gauche radicale ou alternative, elle a frôlé le désastre, après la capitulation et la signature du mémorandum, avec l’appel de Laurent à approuver la mise en tutelle et le dépeçage de la Grèce, avec les divisions sempiternelles et stérilisantes, avec les polémiques incessantes, avec l’éclatement interne de tous ses courants.
Nombre de commentaires sur Médiapart font preuve d’une autocensure moralisante (surtout ne pas critiquer Tsirpras, héros symbolique du peuple grec), ou d’un découragement sinistre (il n’y aurait pas de salut en dehors de l’Euro et la lutte dans un seul pays serait impossible). Et ce, alors même que la Grèce n’est plus un état souverain ; que la normalisation mise en œuvre par les administrateurs étrangers ne fait que débuter ; que chaque semaine de nouvelles lois scélérates seront votées par une majorité de droite à la Vouli ; que l’économie grecque va plonger à nouveau ; que la fuite des liquidités va continuer par tous les moyens ; que le gouvernement ira jusqu’à faire tirer sur la foule…
Il faudra bien ébaucher le bilan sans tabou de cette tragédie au fur et à mesure que les événements se précipitent. Car la déflagration politique va ravager tout le continent. D’abord en Espagne où Podemos risque le plantage lors des élections législatives cet automne (voir le billet de Morvandiaux sur la « machine à perdre »). En France aussi, il est semble nécessaire de dégager d’autres perspectives que les rituelles tambouilles électorales entre groupuscules paralysés par leurs egos et leurs dogmes. Sinon, en 2017, on assistera à un duel entre Hollande le « pacificateur » de la Grèce et le redoutable Front National.
Au-delà du bilan de la stratégie de Syriza, des questions essentielles se posent à chacun d’entre nous et pour lesquelles il n’y a pas de réponses dans un prêt-à-penser déjà formaté.
Quelles initiatives pour organiser le soutien international unitaire au peuple grec ?
Quel projet européen populaire à la mesure de nos besoins et en partant des réalités sociales et nationales ?
Quel programme alternatif dynamique pouvant déboucher sur un soulèvement des citoyens comparable au printemps arabe par exemple.
Faut-il laisser au FN les clés de l’avenir ? Etc.