Hubert Huertas (avatar)

Hubert Huertas

Journaliste à Mediapart

308 Billets

1 Éditions

Billet de blog 5 mars 2013

Hubert Huertas (avatar)

Hubert Huertas

Journaliste à Mediapart

Diésel : la guerre de religions

       Le diésel est en passe de devenir une guerre de religion, un marqueur théologique, et le gouvernement, comme sa majorité, sont en train de grimper au plafond, les uns contre les autres, avec les arguments caractéristiques de ce genre de conflit : On ne discute pas du bien fondé, ou des limites de tel ou tel dispositif, on se dénonce comme le diable.

Hubert Huertas (avatar)

Hubert Huertas

Journaliste à Mediapart

       Le diésel est en passe de devenir une guerre de religion, un marqueur théologique, et le gouvernement, comme sa majorité, sont en train de grimper au plafond, les uns contre les autres, avec les arguments caractéristiques de ce genre de conflit : On ne discute pas du bien fondé, ou des limites de tel ou tel dispositif, on se dénonce comme le diable.

       En défendant le secteur automobile, et les automobilistes, Arnaud Montebourg, est accusé de fermer les yeux sur quarante mille morts par an, décédés à la suite de maladies provoqués par l’absorption des fameuses particules fines. Et comme tout ce qui touche à la voiture a par tradition nationale un petit air franchouillard, voire poujadiste, le Ministre du redressement productif apparaît comme le défenseur d’une cause à courte vue, obsédé par des intérêts de boutique, et les calculs à court terme.

       De leur côté, les écologistes, qui se présentent en la matière comme les défenseurs éclairés de l’avenir collectif, et de la santé publique, sont accusés de négliger les conséquences immédiates de leurs demandes. Qui paiera davantage son diésel, et qui devra changer de voiture, sinon les petites classes moyennes, déjà terriblement touchées, celles qui vivent à la périphérie des villes, ou dans des zones rurales, et doivent accompagner leurs enfants à l’école, faire leurs courses, aller au travail, au prix de dizaines de milliers de kilomètres par an.

       Montebourg devrait « ouvrir les yeux et les narines » s’écrie Yves Contassot, le conseiller de Paris d’Europe Ecologie, et c’est vrai que certains jours la pollution empêche de voir le sommet de la Tour Eiffel.

       « Il ne faut pas de prélèvement supplémentaire » répond Harlem Désir, le premier secrétaire du PS, et c’est vrai que toute hausse du carburant est un impôt qui s’ajoute à la masse des sacrifices demandés depuis des années.

       Dans les guerres de ce style, quand on prend au pied de la lettre les arguments des uns et des autres, on a du mal à se faire une religion, car tout le monde a ses raisons fatales, et ses torts absolus. D’où la difficulté du gouvernement à trancher dans le nœud gordien.

       La seule manière de s’extraire de cette mêlée, de sortir des catéchismes, sera de laïciser le débat, de le replacer dans son contexte séculier, pour en déceler l’urgence réelle.

       Qui a parlé le premier de cette affaire de diésel, et dans le cadre de quelle nécessité ? Etait-ce un médecin ? Non c’était le Président de la Cour des Comptes. Etait-il mu par des soucis de santé publique ? Non. Il cherchait sept milliards.

       Quoi qu’il fasse et quoi qu’il dise, le gouvernement ne se défera pas de cette réalité. Le gazole pose un problème de santé, mais ça n’épuise pas son dilemme : selon la formule consacrée, la santé n’a pas de prix mais elle a quand même un coût, et ceux qui paieront l’addition demanderont forcément au pouvoir si c’était bien le moment.

        France Culture 7h36 ; France Musique 8h07 ; Twitter @huberthuertas