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Billet de blog 7 novembre 2013

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Bonnets rouges, Impôts, Mariage : ils finissent par faire peur

      Assemblée nationale debout pour soutenir Christiane Taubira, rappel de l’autorité de l’Etat face aux Bonnets rouges, quelque chose a basculé. Comme si, au moment où un François Hollande, en état d’extrême faiblesse, doit prononcer un discours sur les valeurs de la république, un cap avait été franchi.

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      Assemblée nationale debout pour soutenir Christiane Taubira, rappel de l’autorité de l’Etat face aux Bonnets rouges, quelque chose a basculé. Comme si, au moment où un François Hollande, en état d’extrême faiblesse, doit prononcer un discours sur les valeurs de la république, un cap avait été franchi.

        Ce cap dépasse la rivalité classique entre un pouvoir et son opposition. Il concerne plutôt le cadre général dans lequel se déroule cet affrontement normal. On appelle ça « Le pacte républicain », et il fait référence à des valeurs supérieures, qui dépassent la droite ou la gauche. Des valeurs qui permettent les affrontements mais évitent la guerre civile.

        Depuis l’élection de l’actuel Président de la République des courants de contestation se sont multipliés, ce qui n’a rien d’inhabituel, sauf qu’ils ont une caractéristique. De la « manif pour tous » à la « révolte fiscale », en passant par la jacquerie des « bonnets rouges », il est moins question de contester les décisions du pouvoir, que sa légitimité.

        Tous ces mouvements se sont identifiés à des symboles révolutionnaires. Le bonnet phrygien coiffé par la Manif pour tous, le Bonnet rouge, et l’exil ces « réfugiés fiscaux », rassemblés dans leur Coblence luxembourgeois, ou belge, ou russe…

        Cette contestation radicale et globale a ouvert la porte à tous les dérapages. L’idée qu’une loi supérieure dominait la loi républicaine a été avancée dans la question du mariage, si bien que la « défense de la civilisation » a donné lieu à des opérations commandos pour casser des bars homos ; la légitimité du refus de payer l’impôt a été défendue par des élus, c'est-à-dire par ceux-là même qui sont chargés de les instituer ; et en Bretagne un ultimatum a été lancée par un pouvoir issu de la rue, au pouvoir issu des urnes.

        Ces désordres, commis ces derniers temps par des forces qui se réclament en général de l’ordre, ont été accompagnés d’une espèce de libération du langage. Tel ancien haut conseiller d’un ancien président de la République s’en prenant à un juge, avec l’appui de cent députés, telle ancienne ministre, Christine Boutin, se réclamant des « colères multiples du peuple de France » pour signer un twitt qui se termine par un appel à la « guerre civile », tel sénateur exprimant ses « instincts meurtriers » vis-à-vis de Hollande, sans revenir sur ces enfants qui insultent une ministre.

        Pourtant, cette accumulation vient d’atteindre ses limites. Pour tardive qu’elle ait été, l’indignation face au racisme est maintenant générale, et officielle. Et la colère devant les violences bretonnes commence à s’exprimer tout haut. Comme si, à force d’identification aux révoltés de mai 68, les insurgés de 2013 avaient commis la même erreur que leurs devanciers présumés.

        Ils finissent par faire peur.              

       France Culture 7h15 ; France Musique 8h07 ; Twitter @huberthuertas