C’est l’histoire d’un Napoléon qui paraderait à Waterloo. Ou d’un Vercingétorix qui pavoiserait à Alesia. Ou l’épopée d’un usager qui deviendrait PDG d’EDF après avoir mis les deux doigts dans la prise. Et c’est le récit du retour anticipé de Nicolas Sarkozy, littéralement électrocuté jeudi par le Conseil Constitutionnel, mais qui « électrise le débat politique », selon le Journal le Monde, en débarquant en sauveur d’une UMP que sa campagne a quasiment ruiné.
Telle est la nature politique de l’ancien Président, toujours à l’offensive, même quand il est sur la défensive, et toujours victorieux, surtout quand il a perdu. Et telle est sa nature médiatique. Que sa stratégie, et son tempérament, le conduisent à soutenir qu’il distribue les coups quand il encaisse des gnons est une chose, elle signe après tout son esprit combatif, que les media amplifient ces messages comme des vérités factuelles en est une autre.
Il y a dans le phénomène Sarkozy, dont on vit en ce moment un épisode extrême, un mélange d’autosuggestion collective, mais aussi de suivisme médiatique. Ce que dit ou fait dire l’ancien Président, ou ce que disent ses avocats, est toujours plus puissant, dans le récit, que ce que racontent les faits.
Prenez l’exemple de l’offensive menée contre le juge Gentil. Les thèses défendues par ses conseils ont été reprises et répétées mille fois, en annonçant implicitement que ce tapis de bombes réduirait à néant l’instruction sur l’affaire Bettencourt par la Cour de Cassation. Résultat, la requête a été sèchement rejetée. Peu importe, les mêmes communiqués de victoire donnent maintenant rendez-vous pour le prochain épisode, à la rentrée, et ils sont commentés comme les Saintes Ecritures.
Prenez le cas de l’affaire Guéant ou du scandale Tapie, objectivement gênants pour l’ancien Président. A-t-il été présenté comme blessé par ces affaires ? Pas du tout. Il serait encore plus fort, puisqu’au centre d’un complot, et qu’après tout, on ne complote que contre les puissants.
Prenez la censure de ses comptes de campagne par le Conseil constitutionnel dont sept membres sur neuf ont été nommés par la droite. Elle tendrait à démontrer, au minimum, que M. Sarkozy a été imprudent avec l’argent. C’est la première fois qu’on sanctionne aussi lourdement un candidat du second tour. Et bien précisément, puisque c’est la première fois cela veut dire que le Président battu est une cible unique, donc qu’il est irremplaçable, il fait donc un retour irrésistible aujourd’hui à l’UMP.
Pourquoi tant de certitudes après la catastrophe de 2012 où la droite a tout perdu ? Parce qu’il a gagné en mai ! Parfaitement ! Il a gagné ! Le politologue Pascal Perrineau expliquait encore ce week-end que son bon score avait préservé son image, et c’est vrai que ce score, comparé à celui de Valéry Giscard d’Estaing, qui avait sombré en mai 81, est objectivement impressionnant. Giscard d’Estaing, horreur et déshonneur, avait sombré à 48,2 alors que Sarkozy a estomaqué tout le monde avec ses 48… Virgule 3…
France Culture 7h36 ; France Musique 8h07 ; Twitter @huberthuertas