C’est un événement cyclique dans la Cinquième République, et François Hollande n’y échappe pas en se rendant en côte d’Or aujourd’hui, pour deux jours. Giscard l’a fait bien avant lui, Mitterrand un peu moins, Chirac a multiplié ces visites, Sarkozy les a systématisées. Le but est transparent, c’est une sorte de safari où l’on poursuit un drôle de fauve : la popularité perdue. En général, à part quelques images à la télé, le chasseur rentre bredouille.
François Hollande est confronté à une crise de confiance. Le lien n’est pas rompu avec les Français, sa personne n’est pas rejetée, ou pas encore, il peut aller et venir, arpenter de long en large le salon de l’agriculture sans se faire prendre à parti, mais le doute s’est installé sur sa politique, et ce doute est en train de virer à la certitude morose : « demain ça ira plus mal », voilà ce que pensent de plus en plus d’électeurs.
De fait les mauvaises nouvelles s’accumulent. A peine un budget historiquement rigoureux vient-il d’être bouclé, et tandis que le chômage s’aggrave, de nouvelles économies sont exigées. Le Premier Ministre Jean Marc Ayrault a demandé à ses ministres de trouver cinq milliards supplémentaires, aucun ministère ne sera intouchable a rajouté le ministre du budget, et une réforme des retraites plus sévère que celle que le PS combattait il y a deux ans va sortir des fourneaux,.
N’en jetez plus mais on en jette encore. Les députés de la majorité émettent des réserves, le premier secrétaire Harlem Desir exprime plus de critiques que de soutien, les sondages alimentent la déprime, mais François Hollande, comparé par le journal Le Monde à un hamster qui court dans sa roue, et fait donc du surplace, est convaincu qu’en expliquant le cap on stoppera l’hémorragie.
Il est persuadé que les Français « comprendront qu’il n’y a pas d’alternative à sa politique », et c’est là que le bât blesse.
Car la campagne présidentielle de François Hollande a dit exactement le contraire. Elle a dit : « je suis une alternative », par opposition au fameux « No Alternative » de Margareth Thatcher et Ronald Reagan.
Certes, Hollande n’a jamais promis de raser gratis, mais il a clairement désigné un ennemi, la finance, et décrit une voie originale, faite de rigueur dans la gestion, mais aussi, et surtout, de relance nécessaire.
Pour accéder à l’Elysée, le Président élu en 2012 avait laissé entendre qu’il ne serait pas l’élève modèle des marchés, qu’il combattrait l’idée d’austérité perpétuelle, et cette idée audacieuse a été entendue en Europe. Elle s’est même imposée comme une nécessité.
Et voilà qu’en entamant ses visites en France, pour expliquer son cap, c’est à dire pour justifier une nouvelle vague de sacrifices, le Président Français va raconter une autre histoire. Il va soutenir l’idée que « there is no alternative », qu’il n’y a pas d’alternative, ce qui est une manière de s’imposer, mais qui revient à s’effacer.
France Culture 7h36 ; France Musique 8h07 ; Twitter : @huberthuertas