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Billet de blog 12 juin 2012

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NI-NI = OUI-OUI

           La droite et le Front National en 2012, c’est l’histoire des anti-carabiniers d’Offenbach. Ils sont au milieu de la scène, ils disent « j’avance pas », « j’avance pas » mais ils y vont quand même.

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           La droite et le Front National en 2012, c’est l’histoire des anti-carabiniers d’Offenbach. Ils sont au milieu de la scène, ils disent « j’avance pas », « j’avance pas » mais ils y vont quand même. Les uns courent vers Marine Le Pen avec un mégaphone, comme Roland Chassain, aux Saintes Maries de la Mer, les autres lui font la cour depuis des lustres et sont aujourd’hui stupéfaits d’être dépassés par une Marion de 22 ans, comme Jean-Michel Ferrand à Carpentras, certains chefs détournent officiellement les yeux, comme Jean-François Copé, et d’autres se bouchent le nez comme Jean-Pierre Raffarin ou Alain Juppé, mais ils y vont et ils iront.

       Pour prouver qu’ils n’avancent pas, les anti-carabiniers de la droite ont inventé le Ni-Ni, une expression piquée au Mitterrand du second mandat, le mandat de trop, le Mitterrand dont le septennat fut tourmenté par les scandales, la maladie, et le fracas politique de 1993. « Ni-Ni », à l’époque ça voulait dire « Ni nationalisations, comme en 81, ni dénationalisations ». Ni réformes, ni réformes réformées.

       Ca voulait dire « je fais du surplace sur le plan économique », c’était une manière de proclamer que le virage de 1983 n’avait pas été franchi et on sait ce qu’il advint. Après le virage il y eut bel et bien la longue ligne droite des réformes libérales, de la dérèglementation, et des privatisations en chaîne, à droite comme à gauche. Mitterrand disait « Ni-Ni », « ni socialisme, ni libéralisme », mais il allait vers le libéralisme.

       Aujourd’hui le Ni-Ni de l’UMP est un Ni-Ni politique. Ni PS ni Front National. Le PS ne vaudrait pas mieux que le FN, parce que, c’est le discours officiel, c’est le slogan, c’est l’élément de langage, parce que le Front de gauche serait un autre Front national.

       Ce Ni-Ni de 2012 entérine le virage idéologique de 2007, comme celui de 1988 entérinait le basculement survenu cinq ans plus tôt. Nicolas Sarkozy avait emprunté son discours au Front national autant que Mitterrand avait cru inventer un modèle, et le Front l’a mangé, comme  l’économie s’est vengée du premier Président socialiste.

        « Ni-ni », c’est en fait un message de détresse, une manière de dire « non-non », non je ne suis pas dans la nasse.

       Pourtant « oui-oui », ils s’y trouvent, et s’y débattent. Ils ne veulent pas accélérer, mais les freins sont lâchés.

       La preuve ?

       La preuve, on la trouve en 2002, naturellement. Au second tour Jacques Chirac, dont bon nombre de ministres sont restés des ministres jusqu’au 6 mai dernier, a été élu par 82% des français, et ni Copé, Ni Longuet, Ni Raffarin, ni Juppé, ni Fillon, ni personne ne s’était écrié « Ni-Ni » quand le PS et le PC avait voté Chirac.     

       France Culture 7h36, France Musique 8h07, twitter : @huberthuertas