Hubert Huertas (avatar)

Hubert Huertas

Journaliste à Mediapart

308 Billets

1 Éditions

Billet de blog 12 juillet 2012

Hubert Huertas (avatar)

Hubert Huertas

Journaliste à Mediapart

Le TGV, du rêve au ridicule

A trois jours du 14 juillet, en pleine période de vacances, voilà une phrase qui va secouer le sentiment national : « On peut se demander si prolonger telle ou telle ligne de TGV pour un gain de temps marginal est préférable à l’entretien du réseau secondaire ».Cette phrase est signée Jérôme Cahuzac, Ministre délégué au budget, et si elle est sensible, c’est que chaque mot, chaque article, chaque virgule, pèse plusieurs milliards, et surtout que ce dossier touche au symbole, à l’indicible, quasiment au sacré.

Hubert Huertas (avatar)

Hubert Huertas

Journaliste à Mediapart

A trois jours du 14 juillet, en pleine période de vacances, voilà une phrase qui va secouer le sentiment national : « On peut se demander si prolonger telle ou telle ligne de TGV pour un gain de temps marginal est préférable à l’entretien du réseau secondaire ».

Cette phrase est signée Jérôme Cahuzac, Ministre délégué au budget, et si elle est sensible, c’est que chaque mot, chaque article, chaque virgule, pèse plusieurs milliards, et surtout que ce dossier touche au symbole, à l’indicible, quasiment au sacré.

Quelque part, le Héros TGV fait partie d’une famille emblématique. Ce n’est pas un train, c’est un drapeau. C’est le fils du Dieu Concorde, et le descendant du paquebot France. Certes il a les pieds sur terre, il roule et il roule bien, ses grandes lignes sont rentables, mais il déclenche quelque chose d’irrationnel.

       Il est l’emblème français de la modernité. L’Astérix de la vitesse mondialisée. TGvix. Pour les élus locaux, l’avoir ou ne pas l’avoir, c’est quasiment Etre ou ne pas Etre.

       Le précédant gouvernement avait prévu l’ouverture de quatorze lignes, soit deux mille kilomètres, pour un montant de deux cent soixante milliards d’euros. Au moment où le gouvernement de Jean-Marc Ayrault cherche de l’argent partout, ces chiffres sont impressionnants.

       Ils vont susciter des débats passionnés, qui vont comparer les coûts et les retombées économiques, notamment en emplois. Les controverses seront d’autant plus houleuses qu’elles seront fratricides. Le gouvernement qui avance avec sa paire de ciseaux est socialiste, et les régions visées ne le sont pas moins. A Toulouse, Pierre Cohen, le maire, est déjà sorti du bois, il veut sa ligne à Grande vitesse, il a été rejoint par son opposant UMP.

       Les projets engagés ne seront pas interrompus, ce qui veut dire que sur les quatorze chantiers prévus, onze pourront être suspendus, ou reportés. Onze sur vingt deux régions. Une sur deux.

       Le débat se déroulera, si l’on ose dire, à contre emploi. Sur le terrain les élus locaux, d’ailleurs souvent en butte à leurs écologistes, réclameront leur part de rêve. Le TGV  qui passe en semant sa modernité. Et là-haut, au gouvernement, les ministres expliqueront qu’il faut revenir sur terre.

       Sur un trajet de mille kilomètres le TGV peut rouler à trois cent trente à l’heure, et faire gagner deux heures, mais sur des sections plus courtes le gain devient d’autant plus symbolique qu’il dévore le budget de la SNCF et de Réseau ferré, fait s’envoler le prix des billets, transforme le réseau dit-secondaire en un piège à tortillard.

       Avec le TGV, on oscille en permanence entre le rêve et la réalité, voire entre la réalité et le ridicule. Le rêve : gagner une heure. La réalité : cette heure là coûte sept milliards d’euros.  Le ridicule : faire la queue une demi-heure à la barrière du parking, à la sortie de la gare...

       France Culture 7h36, France Musique 8h07, Twitter : @huberthuertas