Il n’est pas question ici de juger du bien fondé ou non d’une loi qui a le mérite de donner une information précise sur la situation du lot vendu par rapport à la copropriété, suivant ainsi un mouvement d’information générale de l’acquéreur, dont le notariat avait d’ailleurs été le relais il y a de nombreuses années (voir les travaux des congrès).
Ceci dit, qu'est-il reproché à la loi ALUR?
D'une part, de multiplier les documents devant être communiqués à l'acquéreur.
D'autre part de retarder les délais de signature des avants contrats.
Que dit ce journaliste?
"Que la loi ALUR a ajouté quelques documents et éléments à annexer obligatoirement à la promesse de vente ou communiquer avant que ne commence à courir le délai de rétractation de l'acquéreur. Mais ils sont peu nombreux, et de faible volume "(sic).
Et de citer les documents et éléments figurant à l'article L 721-2 du Code de la Construction et de l'Habitation http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006074096&idArticle=LEGIARTI000028778249&dateTexte=&categorieLien=cid , en oubliant de citer " b)Le règlement de copropriété et l'état descriptif de division ainsi que les actes les modifiant, s'ils ont été publiés".
Oubli (volontaire?) gênant, puisque les règlements de copropriété, outre qu'ils sont généralement volumineux (à moins qu'un document de 180 pages ne soit pas considéré comme volumineux) font souvent l'objet de modificatifs, par exemple suite à la modification d'un lot ou la transformation d'une partie commune en partie privative.
Il n'y a qu'à Macronville que les règlements de copropriété font 20 pages et ne sont jamais modifiés.
Puis il continue en prétendant (à l'inverse d'ailleurs de ce qu'il a dit plus haut), que la loi "n'a pas prévu qu'il (l'ensemble des pièces) soit annexé- donc reproduit en autant d'exemplaires que la promesse- mais remis contre reconnaissance de réception".
Soyons clair, et revenons au texte.
Celui-ci dispose que : "...sont annexés à la promesse de vente ou, à défaut de promesse, à l'acte authentique de vente, les documents suivants: (suit la liste des documents, dont le règlement de copropriété et l'état descriptif de division)....A défaut d'annexion à la promesse de vente....l'acquéreur reconnait que le notaire ou le vendeur lui a remis le règlement de copropriété, le carnet d'entretien et l'état descriptif de division."
En complément, l'article L 721-3 du même code stipule que lorsque ces documents ne sont pas annexés à l'acte notifié, le délai de rétractation ne court qu'à compter du lendemain de la communication de ces documents à l'acquéreur.
Ainsi, le vendeur aura tout intérêt à ce que l'ensemble des documents soit fourni à l'acquéreur dès la signature de l'avant contrat, et il est effectivement des cas où, même en ayant anticipé les demandes, les pièces ne sont pas en sa possession au moment de la négociation, parceque certaines d'entre elles ayant une durée de validité et étant payantes, le vendeur n'engage la dépense que lorsqu'il a la quasi certitude de la vente.
Ainsi, la loi pose le principe de l'annexion des pièces à l'avant contrat, avec une exception pour certaines d'entre elles qui peuvent faire l'objet d'une remise en main propre...sachant que la meilleure preuve reste l'annexion des pièces à l'avant contrat. Et pour des questions de responsabilité, c'est bien l'annexion qui est privilégiée.
Mais continuons à lire ce qui prétend être un article de fond, pour constater que "au passage, de nombreux notaires ont imposé à leurs clients une consultation systématique - et payante- des services de publicité foncière, arguant que le propriétaire- vendeur et même le syndic pouvaient ne pas être détenteurs de tous les modificatifs intervenus..."
Ainsi, il est reproché aux notaires d'appliquer la loi!
La loi ne parle pas en effet de modificatifs dont le vendeur ou le syndic pourraient avoir connaissance, mais bien des règlements de copropriété et modificatifs publiés. Et bien souvent le vendeur ignore totalement si des modificatifs sont intervenus, les syndics ne les ayant pas toujours, par exemple suite à un changement récent de syndic.
Et lorsque l'on sait qu'en cas de découverte tardive d'un modificatif il faut à nouveau purger le délai de rétractation de l'acquéreur, on comprend mal la position de l'auteur qui préfère laisser place à une insécurité organisée au nom d'une soit disant simplification des procédures qui peut s'avérer désastreuse en cas de rétractation ultérieure de l'acquéreur, suite à la découverte d'un modificatif. Mais ça c'est la pratique du terrain et il aurait fallu que ce journaliste prenne le temps de consulter un dossier in situ pour le savoir.
Enfin, l'auteur s'insurge que le Conseil Supérieur du Notariat " a inventé de toutes pièces le "pré-état daté", exigé du syndic sur le modèle de l'état-daté prévu par la réglementation mais seulement pour l'établissement de l'acte authentique", s'appuyant pour ce faire sur une réponse ministérielle qui précise simplement que la loi n'a pas voulu mettre en place un nouveau document. Or, si l'on compare les renseignements qui doivent être fournis par le vendeur à l'acquéreur avec ceux figurant sur le pré-état daté, il y a une concordance précise entre les uns et les autres. Le pré-état daté est le condensé des éléments énumérés de façon disparate par la loi.
Puisque les notaires semblent être pour l'auteur de cet article des personnes peu dignes de confiance, il lui aurait suffit de contacter des employés de notaires, ou des clients, qui auraient pu ainsi lui expliquer que dans tel dossier, le syndic étant fermé tout le mois d’août, les parties doivent attendre septembre pour signer le compromis. Ou encore que, parce qu' ils ont pris la précaution de demander un état hypothécaire, ils ont eu connaissance d'un récent modificatif au règlement de copropriété. Ou enfin que pour la vente d'un lot de copropriété à Marseille, il a fallu obtenir les 22 modificatifs au réglement de copropriété.
Jusqu’à présent, le notariat s’est toujours plié aux exigences du législateur, qui parfois ne répond qu’au désir d’un ministre de laisser son nom pour la postérité dans un dispositif législatif. Il ne faudrait pas que cette fidélité sans faille au gouvernement en place, quelqu’il soit, soit considéré comme une faiblesse naturelle.
Quant à la presse, il serait utile qu'elle se pose parfois la question de la véracité de ce qu'elle rapporte, d'autant plus lorsque pour cela il suffit de passer quelques appels téléphoniques.
Enfin, l'ex ministre de l'Ecologie, qui a validé cet article - donc les erreurs qu'il contient- en le diffusant largement sur les réseaux sociaux, prouve ainsi sa méconnaissance totale de sa propre loi, à moins bien évidemment qu'elle n'ait pas pris le temps de prendre connaissance de l'information erronée qu'elle relayait .Le choix lui est laissé.