Hugues Poltier

Philosophie, politique – Enseignant-chercheur en philosophie à l'Université de Lausanne

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Billet de blog 18 décembre 2024

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La politique étrangère des États-Unis a créé un Israël génocidaire

Sans les subventions militaires massives et inconditionnelles des États-Unis, Israël aurait dû pratiquer la diplomatie avec ses voisins depuis des années Ci-dessous, un article de The Intercept du 10 octobre 24. Bien qu'"ancien", j'en donne une traduction aujourd'hui 18.12, parce qu'il demeure pertinent. J'ai maintenu la plupart des liens auxquels l'A renvoie, non traduits eux.

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Sunjeev Bery

The Intercept, October 10 2024, 11:33 a.m.

Alors que BEYROUTH brûle sous les bombes israéliennes, il est évident pour quiconque y prête attention que l'Amérique incube depuis longtemps l'émergence de la pire version possible d'Israël. Des décennies de politique étrangère américaine ont récompensé et accéléré une trajectoire infernale de politiques et d'actions génocidaires au sein de la société et du gouvernement israéliens. Aujourd'hui, avec le soutien total du président Joe Biden et de la vice-présidente Kamala Harris, Israël mène, vague après vague, une escalade de violence dont l'objectif est d'éliminer toute opposition à l'expansion continue d'un État juif sur des terres où vivent des millions de Palestiniens, de Libanais et d'autres populations.

L'Israël que nous voyons aujourd'hui est le pire de tous les résultats possibles, un pays chauvin, raciste et génocidaire qui perçoit les Arabes chrétiens et musulmans comme des corps à écraser et à détruire. Cette réalité peu glorieuse est le résultat direct de décennies de subventions militaires massives et de soutien politique inconditionnel de la part des États-Unis. Sans ce soutien, Israël aurait dû faire des compromis avec ses voisins depuis des années.

Congress Keeps Trying to Hide the True Gaza Death Toll

Jessica Washington

Le soutien des États-Unis à Israël a totalement isolé les élites politiques israéliennes de toute conséquence de leurs actions. En conséquence, la société israélienne est devenue une étude de cas horrifiante de politique génocidaire. Aujourd'hui, les responsables israéliens sionistes qualifient même les enfants palestiniens de « terroristes », tandis que les tireurs d'élite israéliens à Gaza tirent des balles dans le cœur et la tête des enfants palestiniens. Pendant ce temps, les colons juifs rêvent ouvertement de la colonisation sioniste des terres palestiniennes et libanaises. Et en récompense de ces politiques génocidaires, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a acquis une nouvelle popularité auprès des électeurs.

À chaque étape, Biden et Harris ont récompensé ces développements politiques en fournissant davantage d'armes et de propagande pro-israélienne. La dernière déclaration de soutien à Israël a été faite lors de l'interview de Mme Harris dans l'émission d'information américaine « 60 Minutes », au cours de laquelle elle a répété une fois de plus ses discours creux sur le « droit d'Israël à se défendre ».

Les dernières vagues de violence destructrice peuvent toutes être attribuées aux récents efforts des États-Unis pour façonner une nouvelle réalité géopolitique pour le Moyen-Orient, sans véritable soutien démocratique de la part des sociétés concernées. Dans le cadre des accords d'Abraham, les administrations Trump et Biden ont toutes deux cherché à construire des alliances publiques entre Israël et les monarchies pétrolières voisines du Moyen-Orient.

Biden Doubled Down on the Abraham Accords — to “Devastating Consequences”

Cet effort permanent a coûté cher aux Palestiniens. En permettant à Israël d’établir des relations diplomatiques complètes avec les dictateurs voisins, les Etats-Unis lui assurent de pouvoir continuer à détruire la société palestinienne sans aucun coût diplomatique régional. Bien entendu, la seule société ayant son mot à dire dans cette affaire était celle de l'électorat israélien qui a porté Netanyahou au pouvoir. Tous les autres gouvernements de la région qui ont participé aux accords d'Abraham - y compris le Maroc, le Bahreïn et les Émirats arabes unis - sont fondamentalement antidémocratiques.

C'est dans le contexte de cette marginalisation des Palestiniens dans le cadre des accords d'Abraham que Yahya Sinwar, du Hamas, a lancé les violentes attaques du 7 octobre contre des soldats et des civils israéliens. Parce que les États-Unis ont poussé à l'adoption d'un programme d'accords d'Abraham visant à renforcer l'apartheid, le Hamas a joué la seule véritable carte qu'il possède : attaquer les soldats et les civils israéliens.

Israël a alors entamé un bombardement massif de Gaza, qui s'est rapidement transformé en une véritable campagne de nettoyage ethnique et de génocide, dans le but avoué de détruire à la fois le Hamas et le peuple palestinien. Le Hezbollah et les Houthis du Yémen ont réagi en organisant leurs propres attaques contre Israël et les intérêts israéliens. La poursuite de l'escalade israélienne - en tuant le chef politique du Hamas, Ismael Haniyeh, en Iran, et le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, au Liban - a entraîné deux séries d'attaques de missiles iraniens contre Israël.

Le moteur ultime de toute cette violence est la politique étrangère des États-Unis. Il y a de nombreux acteurs au Moyen-Orient qui ont leur propre agenda; nul doute, l'Iran, le Hezbollah et le Hamas ont tous du sang sur les mains, y compris pour ce que l'Iran et le Hezbollah ont perpétré séparément en Syrie. Mais la violence que nous observons aujourd'hui au Moyen-Orient est fondamentalement due aux interventions américaines dans la région. Ces interventions, qui vont d'initiatives diplomatiques telles que les accords d'Abraham à l'interminable chèque en blanc du soutien militaire américain à Israël, servent toutes à protéger Israël de la pression et des coûts auxquels il devrait normalement faire face pour son oppression des Palestiniens.

For a Century, the American Way of War Has Meant Killing Civilians

La simple réalité est que la politique étrangère des États-Unis reste aussi sanglante et horrible qu'elle l'a toujours été. Au cours des décennies précédentes, les pertes « acceptables » comprenaient les 1 à 2 millions de civils tués au Viêt Nam, un autre million de morts en Indonésie, le carnage des dictateurs soutenus par les États-Unis en Amérique latine et les centaines de milliers de personnes tuées lors des invasions américaines de l'Irak et de l'Afghanistan. Les interventions militaires et diplomatiques des États-Unis au Moyen-Orient ne sont pas différentes.

Pour mettre fin aux actions horribles d'Israël au Moyen-Orient, nous devons changer la politique de l'Amérique elle-même. Ce n'est pas une tâche facile, étant donné le pouvoir et l'influence considérables des réseaux, des donateurs et des groupes de pression pro-israéliens - et pro-guerre - à l'intérieur des États-Unis. Comme cela a été le cas dans d'autres régions du monde, la politique étrangère des États-Unis est l'obstacle fondamental à la justice, à la démocratie et à la paix au Moyen-Orient.

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