
L’hypocrisie des nos dirigeants ne connaît pas de limite en la matière. Ils larguent la démocratie empaquetée dans des bombes sur certains états, mais n’hésitent pas à se rendre en visite officielle dans d’autres lieux guère plus avancés sur la question des libertés, individuelles et/ou collectives.
C’est le cas de l’Iran. Alors que Mme Mogherini, haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, se rendait à Téhéran en avril dernier, 33 civils Iraniens passaient entre les mains de leur bourreau, presque sous les yeux de la haute représentante de l’UE. Sans que cette dernière n’y trouve rien à redire. Et c’est sans compter les tortures, physiques et psychologiques, infligées aux prisonniers, arrêtés de manière souvent arbitraire.
Le cas symbolique du docteur
Mais soyons plus précis et évoquons le cas du physicien Omid Kokabee. En janvier 2011, alors qu’il rentre au pays pour visiter sa famille après un séjour universitaire aux Etats-Unis, le docteur en physique Omid Kokabee est arrêté, puis aussitôt détenu à l’isolement pendant 15 mois ! 15 mois durant lesquels il sera interrogé, parfois avec violence. 15 mois durant lesquels les gardiens de la révolution feront tout ce qu’ils peuvent pour lui arracher des aveux. Mais des aveux de quoi ? En réalité, Omid Kokabee n’a rien à avouer. Il cherche simplement à poursuivre ses études. Au final, et après un procès à sens unique, durant lequel aucune preuve de son éventuelle implication dans un complot visant à déstabiliser le régime n’aura pu être présentée, Omid Kokabee sera condamné à 10 de réclusion pour avoir simplement eu des « relations avec un gouvernement hostile ».
Mais l’affaire ne s’arrête pas là. Pendant son incarcération à la prison d’Evin, à Téhéran, le scientifique s’est régulièrement plaint de problèmes de santé. Du sang et des calculs dans ses urines laissaient craindre le pire. Malgré ses demandes réitérées d’examens médicaux, rien n’y fera. Il aura fallu attendre 5 années pour que le gouvernement Iranien lui accorde enfin ce qu’il demandait. Le résultat des examens médicaux est sans appel : Omid Kokabee souffre d’un cancer du rein en stade avancé. Si les examens avaient été réalisés plus tôt, ce cancer aurait pu être pris en charge. Malheureusement, le docteur Kokabee n’a eu d’autres choix que de subir une ablation de son rein malade.
Compte tenu du peu de soin accordé à la santé de M. Kokabee, on peut légitimement craindre pour sa vie dans les mois qui viennent. Pressurisé en permanence pour avouer des faits qui n’existent que dans le cerveau paranoïaque de ses tortionnaires, Omid Kokabee a développé d’autres pathologies ; 4 de ses dents sont « tombées », et les autres sont à soigner en urgence, les douleurs articulaires se multiplient et les palpitations cardiaques sont de plus en plus fréquentes. Sur tous ces points non plus, il n’est pas entendu, et il ne bénéficie d’aucun soin médical.
Malheureusement, un cas parmi tant d’autres…
Mais le cas d’Omid Kokabee est loin d’être isolé. Et c’est ce qui ressort des différents rapports d’Amnesty International. Quid du nouvel emprisonnement de Narges Mohammadi, déjà incarcérée une année entre 1998 et 1999, puis à nouveau condamnée pour 11 ans en 2011, avant d’être libérée grâce à une très grosse pression de la communauté internationale. La jeune femme, mère de jumeaux, était vice-présidente du centre des défenseurs des droits de l’homme en Iran. Le motif de sa dernière condamnation ? Agissements contre la sécurité nationale, membre du DHRC (centre des défenseurs des droits de l’homme) et propagande contre le régime. Le 5 mai 2015, il y a un an, elle a de nouveau été arrêtée. De nouvelles charges seront retenues à son encontre.
Et que dire encore de l’avocate Nasrin Sotoudeh, emprisonnée pour avoir fait son métier. Celui de défendre des opposants au régime, ou des prisonniers promis à la peine capitale, pour des délits commis alors qu’ils étaient mineurs. Et les motifs de sa condamnation, « diffusion de propagande et conspiration mettant en danger la sécurité de l'État », sont malheureusement un grand classique de la justice Iranienne.
Nous pourrions continuer ainsi des pages durant. Saleh Kohandel, Afchin Ba’imani, Ali Moezi… Ce sont autant de noms, plus ou moins reconnus, de personnalités qui ne cherchent qu’à vivre libre, et qui n’ont reçu pour récompense à leurs actions que souffrance, injustice et tortures multiples. Et la liste n’est pas exhaustive. Nous regrettons fortement qu’au 21ème siècle, cette époque où nous vivons soi-disant le meilleur de toutes les civilisations, nos dirigeants agissent plus aisément pour obtenir un résultat financier non-garanti que pour sauver une vie. Ce qu’il se passe en Iran aujourd’hui est une preuve formelle supplémentaire que le Capital est plus important que l’Humain aux yeux de l’occident. Triste humanité en vérité…