Dimanche après-midi, le maire de New York, Michael Bloomberg, s'exprime sur les conséquences du passage d'Irene, notamment sur les problèmes à attendre dans un métro new-yorkais déjà connu pour son fonctionnement chaotique.
Au même moment, le géographe Richard Campanella m'écrit quelques mots sur Irene, ses pensées. Chercheur de référence sur les ouragans, installé à la Nouvelle-Orléans, je l'avais interviewé il y a quelques semaines lors d'un reportage sur l'état de la ville six ans après l'ouragan Katrina. Il est l'un de ceux qui se sont battus pour que l'on cerne bien les erreurs humaines ayant mené à Katrina, que l'on saisisse les manquements des autorités.
Richard Campanella est d'origine new-yorkaise, son père vit toujours à Brooklyn. En discutant de vieillesse et d'ouragan lors de notre rencontre à la Nouvelle-Orléans, je lui demandais s'il ne souhaitait pas que son père, très âgé, soit plus près de lui. Il me répondait : « Non. Les risques d'ouragan sont trop élevés à la Nouvelle-Orléans et secourir les personnes âgées lors de ces catastrophes est l'une de choses les plus compliquées. »
Ce dimanche, les mots simples de Richard Campanella sont importants car on ne peut saisir totalement la gestion d'Irene -les interventions rapides et nombreuses du maire Bloomberg et du président Barack Obama, mais surtout la sur-couverture médiatique- sans avoir Katrina en mémoire et l'échec politique (le désintérêt ?) qui a marqué cette crise (lire l'article Mediapart ici, un retour sur Katrina six ans après). Pour les autorités, il était hors de question de répéter ce scénario.
« Ainsi, je ne blâmerai pas les médias pour s'être focalisés à ce point sur New York. L'expérience prouve qu'il est logique et nécessaire de suivre avec grande attention les zones qui sont les plus densément peuplées, c'est le cas de New York. »
« Il est tout aussi logique de se concentrer sur les personnes vulnérables, socialement ou physiquement », poursuit-il, faisant référence à la décision du maire de faire évacuer, dès vendredi, les maisons de retraites et hôpitaux.
Richard Campanella ne s'inquiètait pas outre mesure. « Quand j'entends qu'un ouragan approche New York ou n'importe quelle zone autre que la Nouvelle-Orléans, je me dis que les habitants devraient être finalement reconnaissants envers leur géologie, envers leur terre et leur sol épais, qui prend la forme d'une pente, descendant vers la mer. Quand les eaux montent, elles doivent encore grimper un chemin en pente, même en pente légère, avant d'atteindre les habitants. Bénissez ce simple fait. Il permet d'éviter le pire. »
« La Nouvelle-Orléans est la seule grande ville américaine située sur une zone à risque -et l'une des rares de ce type dans le monde- qui a la topographie contraire. La ville a une forme de cuvette, elle est située au-dessous du niveau de la mer. La forme de la Nouvelle-Orléans ouvre la voie à des torrents d'eau qui peuvent se précipiter dans la ville et noyer la population si les barrages ne tiennent pas. » Le scénario Katrina.
Irene était loin, très loin, d'un tel scénario. Mais même sans catastrophe, cette tempête interroge. La fréquence des inondations -même minimes- n'échappe à personne à New York. Ces derniers mois, la ville a subi régulièrement les conséquences de gros orages. Trop souvent pour que cela ne mène pas à une réflexion sur la qualité des infrastructures. N'y a-t-il pas un problème d'évacuation des eaux ? Un problème de gestion des transports, avec des voies de métro trop facilement inondables ?
Irene va peut-être (re)mettre ces questions au coeur du débat municipal. En attendant, ces événements nous rappellent que New York, souvent vue comme un petit empire, est quasiment une île, exposée et fragile.
 
                 
             
            