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Billet de blog 6 juillet 2024

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Barrage ?

Ce dimanche l'extrême droite risque d'être la grande vainqueur des élections législatives. Pas seulement si le RN a une majorité absolue. Face à cette catastrophe que faire pour l'empêcher, au moins partiellement, de parvenir à ses fins ? En tout cas, blâmer quelques gauchistes idéalistes du désastre provoqué par d'autres ne sert à rien.

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Les partis ne m'ont jamais attirée. Je n'ai pas l'âme militante. Mais l'opposition à l'extrême droite au pouvoir n'est pas du militantisme, en tout pas du militantisme partisan. J'ai expliqué, dans mon billet précédent, combien la droite macroniste et non macroniste s'était montrée irresponsable en courant tellement après l'extrême droite qu'elle la dépassait parfois et la précédait dans l'outrance. Ces droites portent une grande part de culpabilité dans la montée du RN et de ses préceptes.

Retrait

Ce précédent billet, basé sur la simple observation, n'envisageait pas de stratégie électorale. Ce n'est pas mon point de vue. Cependant, face au désastre, que faire ? Il me semble clair qu'il ne faut pas aider le RN et ses alliés à accéder au pouvoir. Retirer les candidats de gauche n'ayant pas de chance d'être élus quand le RN risque de passer et s'il y a une alternative est à mon avis la seule possibilité raisonnable. Ne pas le faire donnerait un avantage au RN. Comme noté dans cette publication, on aurait pu exiger des candidats de droite avantagés par le retrait d'une candidate de gauche au second tour de s'engager à ne pas faire alliance avec le RN.

Barrage ?

Voter pour un candidat de droite (macroniste ou non) c'est sûrement se faire violence quand la droite, dans son ensemble, s'est fourvoyée à faire la course avec le RN à qui serait le plus xénophobe, le plus autoritaire, le plus populiste, le plus stigmatisant et le plus manipulateur. Voter pour un soutien de Macron quand celui-ci a une part de culpabilité écrasante dans la situation actuelle est difficile. Voter pour des gens qui trouvent la gauche semblable ou pire que le RN n'est pas une mince affaire. Si l'opposant au RN au second tour n'est pas clairement contre l'extrême droite,  chacun aura à déterminer si l'avantage de voter contre le RN compense le fait de voter pour quelqu'un qui, soit a flirté avec la xénophobie, soit a participé à la course au racisme et au « tout sauf la gauche ». Voter contre le RN fait barrage au RN, c'est un objectif démocratique important. À chacun la terrible responsabilité de voter en conscience, et bien sûr jamais pour le RN. C'est plus simple si le candidat non RN s'oppose clairement , aussi, à l'extrême droite. On aurait pu, par exemple exiger, en échange d'un retrait, que celle ou celui qui fait face au RN s'engage clairement à ne pas faire alliance avec le RN une fois élu.

Responsabilités

Rappelons que les premiers responsables de la montée du racisme et des autres vices de l'extrême droite,  sont le RN et ses électeurs, à égalité avec les média complaisants qui ont colporté leur propagande à longueur d'antenne et de pages. Il faudrait arrêter de sans cesse trouver des excuses aux gens d'extrême droite. Le second est Macron pour sa responsabilité directe d'avoir préféré le coup politique à l'intérêt du peuple qu'il est sensé représenter, et ce à de multiples reprises avant ce dernier acte abjecte. Macron est coupable d'avoir abandonné toute boussole morale en faveur de la contemplation narcissique et délirante de son propre pouvoir qu'il croyait jupitérien. Il a patiemment préparé les esprits et les institutions pour l'arrivée au pouvoir du RN. Comme toujours, il prétendra l'avoir fait pour couper l'herbe sous les pieds de Le Pen et, comme toujours, ça a conduit à la montée des obsessions xénophobes et servi d'ascenseur électoral au RN. Les troisièmes responsables de la catastrophe sont tous les politiques de droite qui ont appliqué la même stratégie de course à la xénophobie et au populisme. Stratégie paresseuse et idiote, qui n'a jamais fonctionné, mais qui a auto-convaincu certains d'entre eux de basculer définitivement vers l'extrême droite. Les quatrièmes responsables dans ce quinté sont ceux qui font semblant de croire ou se sont auto-persuadé, à force de bourrage de crâne, que la gauche, le Nouveau Front Populaire ou LFI sont aussi dangereux que l'extrême droite, voire pires. Cette réalité alternative n'a pas de base dans les faits. Je ne suis ni mélenchoniste, ni à LFI et reconnais qu'il y a eu quelques sorties problématiques de Mélenchon et de quelques personnalités de LFI. Elles peuvent leur être reprochées mais restent rares et incommensurables avec les horreurs dont toute la droite nous a abreuvé pendant des années. Il me semble qu'elles n'arrivent pas à la cheville des abjections dont les poursuivants de l'extrême droite nous ont rebattu les oreilles. Confondre la gauche ou LFI avec le RN, voire les intervertir relève donc de la plus grande mauvaise foi. Ceux qui refusent de voter pour le Nouveau Front Populaire au faux prétexte que la gauche ou LFI seraient anti-républicaine ou anti-démocratique, sont les quatrièmes responsables du fiasco actuel. Ceux qui aujourd'hui encore, bien protégés par leur statut, leur revenus confortables, leur pâleur de peau et leurs origines, disent ne pas se sentir concernés par la possible arrivée du RN au pourvoir portent aussi une cinquième part de responsabilité dans cette explosion électorale et médiatique de l'extrême droite. 

Mais certains tribunaux des bien-pensants, certaines élites médiatiques, politiques et économiques semblent avoir déjà choisi leur victime expiatoire. Peut-être le remord, pour certains, de s'être compromis avec le macronisme et suivi sa dérive vers l'extrême droite, ou d'avoir laissé faire, les pousse-t-il à choisir un bouc émissaire. Alors, une poignée de gauchistes,  anarchistes pour certaines, fera bien l'affaire. Certaines refusent de voter pour la droite extrême pour faire barrage au RN. Certaines considèrent que l'extrême droite ne commence pas au RN et refusent de choisir entre différentes nuances de brun. Je ne dis pas qu'elles ont raison. La responsabilité du vote est individuelle et j'ai décrit les paramètres du choix plus haut. En revanche, elles (et eux) qui n'ont jamais fait de concession à l'extrême droite, qui se sont toujours battues contre ses obsessions xénophobes, démagogues et liberticides, n'ont pas à servir de victimes expiatoires. C'est pourtant ce qui semble se passer dans certaines têtes : dénoncer les quelques personnes d'extrême gauche qui refuseraient de voter Macron ou LR contre le RN ; les stigmatiser comme responsables du triomphe de l'extrême droite. C'est un peu gros. Il me semble que ce serait une réécriture de l'histoire, un renversement de la culpabilité que de considérer les quelques idéalistes d'extrême gauche comme coupable d'une catastrophe que d'autres ont provoquée. C'est pourtant vers ces personnes, dont le poids électoral est minime, que se dirige une bonne partie des critiques parfois très violentes. C'est pourquoi j'ai voulu, dans ce billet, rétablir les responsabilités de la victoire, au moins partielle, de l'extrême droite qui se profile.

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