Je ne suis pas non plus anti-autiste. J’avoue pourtant que je ressentais à l’égard de la gamine de 15 ans qui s’exprimait d’une voix monocorde, en 2018, à la tribune de la COP24 en Pologne, comme un malaise indéfinissable. Il est vrai que j’ignorais alors tout de ses troubles psychologiques qui n’ont, je vous rassure, aucun rapport avec le syndrome de Stockholm, ni de Tourette. En réalité, la jeune suédoise souffrait – et c’est encore le cas, car on ne s’en départit jamais - d’une tendance dépressive et d’une hyper-sensibilité - consubstantiels à la solastalgie qui, en langage moins châtié, figure l'éco-anxiété. Auxquels ils convient d’ajouter des troubles autistiques qui ne remettent d’ailleurs nullement en cause la pertinence et la puissance de son engagement contre une société ultra-libérale, fanatisée par des dirigeants-autocrates corrompus et facilitée hélas, par une population qui dans sa globalité, vit dans le plus abject égoïsme et la plus misérable vénalité.
Cela me faisait bizarre alors, de la voir s’exprimer, le visage tordu et le ton monocorde. N’était-elle pas manipulée par un gourou quelconque ? Si ! Par l’un de ses profs, tellement ému et emballé par un texte qu’elle venait d’écrire sur la catastrophe climatique à venir, qu’il encouragea la petite Greta, à partir à l’abordage de ce monde en folie suicidaire, mené par les docteurs Folamour de la finance et ceux qu’ils désignent eux-mêmes à la tête des États. Merci pour nous, avec Saint-Emmanuel-les-mains-jointes, on a touché le gros lot !
Alors, elle se mit à orchestrer des grèves massives dans les écoles – hélas jamais suivies en France, of course ! - qui ont eu un énorme retentissement y compris jusqu’en Australie où les gamins ont mieux saisi la gravité du moment, cernés sur leur île-continent par de monstrueux incendies, un réchauffement ahurissant et un affaiblissement fulgurant de l’éco-système et de la biodiversité, mesurés notamment à l’aune de la barrière de corail. A la tribune de la COP24, elle a prononcé ces mots assimilables par tous, y compris les abrutis de publicistes, de commerciaux et de consommateurs : « Notre biosphère est sacrifiée pour que les riches des pays comme le mien puissent vivre dans le luxe. Ce sont les souffrances du plus grand nombre qui paient pour le luxe du plus petit nombre. » Elle était toute gamine, toute émue. Les gros s’en sont gaussés. Partant dans un éclat de rire et de greenbashing. Et moi, le petit par excellence, j’ai conscience de ne l’avoir pas assez soutenue alors.
Depuis, elle a grandi. Et nous vieilli ! Elle est même devenue plutôt une jolie fille. Toujours aussi engagée. Enragée si vous voulez - j’en suis un autre - ! Deux petites choses nous séparent encore. Elle est végane et je ne me sens pas en mesure de la suivre – mais je m’engage, lorsque ce je serai mort, à ne plus toucher le moindre morceau de bidoche -. Et puis elle se bouge. Elle n’a rien lâché depuis six ans et pour tous ceux qui ont choisi le camp de la nature, face à celui de la finance, elle est une icône. Et pas qu’un peu. Aussi sa venue dans le département de mon cœur à 180 kilomètres seulement de mon lieu de résidence, fut à la fois un bonheur et une déchirure. Elle était bien là, dans le Tarn, sur le chantier de cette autoroute de la honte que défendent les affairistes, les lobbyistes et les macronistes ( et la plupart des socialistes, bravo à eux !) et je l’ai trouvée bien à sa place. Mais en parlant de honte, j’avais la mienne de n’avoir pas pris ma bagnole (un peu plus ou un peu moins de carbone...) pour aller moi-aussi prendre ma petite giclée de gaz lacrymogène, distribuée généreusement par notre belle Démocratie...
Le lendemain, elle était non loin de Bordeaux, aux côtés de ceux qui manifestent contre l’implantation de puits de pétrole en Gironde (on croit vraiment cauchemarder !). Et comme à Saïx, entre Castres et Toulouse, au lieu d’être tous dans les rangs pour dénoncer l’absurdité de ces projets et manifester leur colère, ils n’étaient que quelques milliers.
Peur de se faire mal voir, peur de la police… Peur ou indifférence ? C’est tellement mieux de regarder le match à la télé...
L'avion dont a rêvé ce macroniste pour Greta !
Vous savez ce que j’en passe. La Macronie, singulièrement à la faveur du confinement, a noué des liens privilégiés avec une forme certaine de totalitarisme. Le passe sanitaire, suivi des lois contre la retraite, le logement et l’immigration en sont les manifestations les plus éclairantes et affolantes. A tel point qu’après avoir siphonné les voix de la droite libérale, Macron et les siens se sont tellement rapprochés de celles des nationalistes, que l’on n'en perçoit plus clairement les limites.
J’ai adoré le dernier exemple en date. Un illuminé du nom de Vincent Terrail-Novès, élu municipal de Toulouse sous l’étiquette de la République en marche - « Renew » comme ils se font désormais délicatement appeler -, a touité le jour où Greta Thunberg est venue manifester contre l’A69, puis le lendemain contre le pétrole en Gironde : « Belle prouesse de @GretaThunberg venue s’opposer à l’autoroute A69 pour des raisons environnementales. Dans le même temps, si je ne me trompe pas, venue directement de Washington, elle a pris : - 1 Boeing 747 - 2 navettes aéroportuaires - 2 taxis - 1 trajet en voiture pour Toulouse. Un bon bilan carbone bien conséquent ! Et pendant ce temps-là, les écolos applaudissent… on marche sur la tête. »
On note la délicatesse du type et le respect qu’il voue notamment à ceux qui, comme vous et moi, se battent pour que les hommes redeviennent plus sages et, qu’un jour qui sait, la terre soit plus respirable. Oui pardi que les écolos - comme tu dis, rigolo ! - applaudissent. Et ils se marrent. Parce que tu as écrit de belles conneries. Non, Greta Thumberg n’a pas foutu les pieds à Washington et elle n’a jamais pris l’avion. Ni ce jour-là, ni jamais !
Le 2 février, elle comparaissait à Londres pour avoir commis le crime d'avoir mis un pot de peinture sur les I. Puis avant de se rendre dans le Tarn et en Gironde, elle a passé quelques jours à Paris. Et en prenant le train évidemment ! Quant à ce Terrail à la noix et aux ordres de l’industrie pharmaceutique, il a pris ses informations sur un site d’extrême-droite qui relaie la propagande des Zemmouriens de Reconquête. Faut dire qu’entre Renaissance et Reconquête, il n’y a plus vraiment de nuances. Et qui se ressemble...
J.B. Fressoz : "La transition énergétique n’existe pas"
Je vous mets en lien , le podcast de France Inter consacré à Jean-Baptiste Fressoz qui explique clairement que la « transition écologique » vendue par la Macronie et le modèle libéral occidental dans son ensemble est une pure foutaise. Une énorme escroquerie. Il ne servira à rien de peindre des avions et des autoroutes en vert, de recycler pour toujours fabriquer, de toujours innover pour alimenter le marché. Le seule solution, pas du tout punitive mais plutôt gratifiante et réjouissante, est d’entamer une décroissance, en se tournant vers la simplicité, la frugalité et la solidarité. En renouant tout simplement avec la nature.
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/jusqu-ici-tout-va-bien/jusqu-ici-tout-va-bien-du-mardi-06-fevrier-2024-5865165