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Billet de blog 11 juin 2013

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Maltraitance : colloque au Sénat

Valérie Trierweiler, en tant que première dame, et le sénateur PS de l’Isère André Vallini organisent un colloque au Sénat. «Nous voulons appeler le gouvernement à faire des enfants maltraités une grande cause nationale 2014», confirme à Libération Valérie Trierweiler.Décision d'autant plus louable que la situation des victimes n'est pas enviable et trop souvent négligée. L'émotion est vive lorsque des faits sordides sont dévoilés dans les journaux... Mais on les oublie vite. Pourtant, leur souffrance ne disparaît pas. La souffrance des enfants est sans doute celle qui mérite le plus de vigilance : ils ne doivent l'écoute qui leur est réservée qu'aux personnes qui se penchent sur leur sort. Merci donc Madame Trierweiler, André Vallini, Ondine Millot, Didier Arnaud, Bruno Denaes … tous ceux qui s'intéressent à leur sort.

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Valérie Trierweiler, en tant que première dame, et le sénateur PS de l’Isère André Vallini organisent un colloque au Sénat. «Nous voulons appeler le gouvernement à faire des enfants maltraités une grande cause nationale 2014», confirme à Libération Valérie Trierweiler.

Décision d'autant plus louable que la situation des victimes n'est pas enviable et trop souvent négligée. L'émotion est vive lorsque des faits sordides sont dévoilés dans les journaux... Mais on les oublie vite. Pourtant, leur souffrance ne disparaît pas.

La souffrance des enfants est sans doute celle qui mérite le plus de vigilance : ils ne doivent l'écoute qui leur est réservée qu'aux personnes qui se penchent sur leur sort. Merci donc Madame Trierweiler, André Vallini, Ondine Millot, Didier Arnaud, Bruno Denaes … tous ceux qui s'intéressent à leur sort.

Dans ses travaux, Anne Tursz, directrice de recherche à l’Inserm, estime qu’environ 10% des enfants sont victimes en France de maltraitance (violences, négligences lourdes, abus sexuels…). Et que «un à deux enfants» meurent chaque jour de la main d’un adulte - dont une majorité de bébés.

Alors j'étais heureux d'entendre ce matin l'hyper revue de presse de France Info, avec Jean-Christophe Martin et Philippe Vandel où le reportage d'Ondine Millot sur Libération était évoqué. Cela m'a donné envie d'aller voir.

Il s'agit du Village Saint-Exupéry qui accueille à Angers 107 enfants «placés» en urgence pour cause de maltraitance. Ici, ils se reconstruisent avant de rentrer chez leurs parents, d’intégrer un foyer ou une famille d’accueil. Langage émouvant de ces enfants qui expriment à la fois la lourde perte d'un foyer familial - malgré les souffrances qu'ils ont endurées - une certaine révolte quant à leur condition d'enfants placés, bien qu'ils apprécient les qualités de leur lieu de séjour.

L'un de ces enfants déclare :

«Moi aussi j’ai été enlevé à la sortie de l’école. La police qui débarque on sait même pas pourquoi. Je suis placé parce que mes parents me frappaient et buvaient de l’alcool. Mais moi, j’y suis pour rien, et pourtant c’est moi qui suis puni, je suis privé de mes parents.»

Mais un éducateur dira de son côté :

« Depuis la loi de 2007, on se heurte sans cesse à une sacralisation du lien biologique.»«Cette loi pose la primauté de la famille...
Il ne faut pas être optimiste, il faut être réaliste. La loi de 2007, elle est idéologique et démagogique.»

Le problème n'est pas simple. Que faut-il privilégier ? La loi de 2007 qui insiste sur les relations « biologiques » et le lien familial sur le principe de précaution ? La sécurité sanitaire sur les liens affectifs ? La rapidité de décision sur la circonspection ? Tout est complexe dans ce domaine. Mais il semble que les difficultés tiennent surtout aux attitudes de principe. Attitude comptable qui privilégie le maintien familial pour des raisons pécuniaires, attitude dogmatique qui s'impose par idéologie, attitude politique qui ne mise pas assez sur le long terme.

Pour affronter efficacement les difficultés, et tenter d'éviter les aléas et remises en cause qui sont typiquement le résultat d'une approche empirique ou à courte vue, il semble que les collectivités devraient apporter plus d'attention aux compétences des professionnels, je veux dire ceux qui ont une démarche rigoureuse et rationnelle – je n'ose pas penser au lobby des psychanalystes qui ont ignoré l'inceste et l'ont mis sur le compte d'œdipe - à contribuer au financement des travaux de chercheurs, accepter de financer des études pour obtenir des connaissances fondées sur des observations scientifiques, prendre en compte et répercuter les expériences cliniques lorsqu'elles donnent de bons résultats. Dans ces domaines il semble que la France soit plutôt en retard sur ses voisins.

On a assisté ces derniers jours à une vague d'émotion parmi les parents d'enfants autistes, parce que André Vallini, celui-là même qui s'implique dans un colloque sur la maltraitance, a maladroitement déclaré1 Que la maltraitance pouvait déboucher sur le l'autisme chez les enfants ! Non, Monsieur Vallini, à chacun sa compétence, faites confiance aux personnes les mieux placées !

L'approche utile et de long terme ne se résume pas pour la maltraitance au choix d'une affectation en foyer ou en famille d'accueil. Les victimes doivent être prises en charge, pour leur sauvegarde, et aussi pour briser le cycle des répétitions. Des méthodes ont été mises au point et pratiquées avec succès.

J'avais noté lors de l'émission SAVOIR SAVOIR ÊTRE du 25 mai 2013 de France Info, dans la sélection des dernières parutions de Bruno Denaes, cet ouvrage de Marie-Christine Gryson-Dejehansart : « L'enfant agressé et Conte créatif » (Ed. Dunod). Il s'agit précisément de cela : la psychologue clinicienne détaille la thérapie par le conte créatif pour les victimes d'agression.

Voulant en savoir un peu plus, j'ai pu retrouver ce reportage de Didier ARNAUD qui date de l'an 2000 ! « A Saint-Omer, une association soigne les jeunes victimes et les parents. » A lire ce reportage, on comprend l'horreur de ce que peut être la maltraitance. Et le besoin impératif d'une thérapie qui soulage. « Le conte est fait pour éviter les passages à l'acte futur », explique Marie-Christine Gryson, psychologue et présidente de l'association. « Chaque enfant est témoin de ce qui est arrivé à l'autre.» Les gamins ont joué chacun leur rôle pour défendre la princesse. Pour dire ce qu'on leur a fait...

La seule chose qu'il faille regretter, c'est que ces méthodes qui sont pourtant reprises et pratiquées chez nos voisins ne soient pas davantage pratiquées en France. Espérons que le récent ouvrage qui les expose en détail aura le retentissement qu'il mérite.

1 http://www.ledauphine.com/societe/2013/06/07/andre-vallini-se-met-a-dos-les-parents-d-enfants-autistes

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