Noël, fête commerciale ? Fête de l'enfant gâté ? Ou fête du renouvellement d'un cycle après le solstice d'hiver ? Dans cette logique, c'est aussi la fête de l'enfant-sauveur, de l'enfant comme espoir en l'avenir, de celui qui vient sans idée préconçue, sans rancune et qui porte bientôt un regard étonné ce monde où il pourra tracer de nouveaux chemins !
Quel paradoxe cette image, comment ne pas la remarquer dans ce climat de détresse et d'incertitude qui nous entoure... Pourquoi l'effacer ? À qui feraient peur les espoirs qu'elle suscite ? Pourquoi un vieillard en rouge lui ravit-il la vedette ?
Le Père Noël, n'est-ce pas celui qui donne aux enfants sages ?
Un vieil homme que les enfants supplient pour recevoir les jouets, offrant en échange leur gentillesse et leur soumission, leur conformité au monde du grand-père, celui qui vit au Pôle Nord, en un lieu inaccessible ?
Merveilleux Père Noël dont l'évocation sent bon l'odeur d'épicéa, rallume quelques bougies de notre enfance, agite l'impatience du jour de fête qui s'annonce...
Éphémère Père Noël dont la présence ne dure qu'un temps dans l'année, ne dure qu'un temps dans la vie. Mystère bien entretenu, croyance bénie comme marque de candeur, puis bannie comme signe de niaiserie, leçon définitive pour tous ceux et toutes celles qui en grandissant éviteront les rêves insensés...
Triste père Noël aussi, dont les cadeaux ont perdu le pouvoir de nous enchanter et qui retournera pour un an dans les arrière-boutiques après nous avoir caché l'irremplaçable espoir que représente l'enfant... Et le nouveau monde à naître...
Mais au fait, puisque ce Père Noël est aussi appelé Santa Claus, où est donc passé ce bon Saint Nicolas ? Ce patron des enfants qui, selon la légende, sauve trois petits du saloir où les avaient mis le boucher ?
Pour autant qu'il m'en souvienne, on l'avait déjà bien arrangé, ce « Bon » Saint Nicolas... En lui adjoignant un âne sous son pouvoir et aussi... Le Père Fouettard, avec son martinet pour remettre l'enfant désobéissant dans le droit chemin... Pas de doute, une idée était déjà là... Celle de l'anti-Noël en quelque sorte.
Mais si au lieu de tout cela, l'idée de Noël revenait à cette légende qui condamne la notion de l'enfant-objet, qui extrait les jeunes du tombeau de préjugés et de suspicion où tant de clichés les ont enfermés ? Qui les fait sortir de cette saumure du conservatisme pour les rendre à la vie ? Qui nous fait admettre que si depuis des millénaires l'enfant n'avait pas d'une certaine façon corrigé les fautes de ses parents le monde ne serait déjà plus ? Que le vieillard, même avec sa longue barbe d'autorité ne peut ravir aux petites filles et aux petits garçons le privilège d'être l'avenir du monde...