Ne nous y trompons pas ou plutôt, ne nous laissons pas tromper par les appels aux chantiers aux lendemains qui chantent, aux “appels citoyens” qui affectent de vouloir rassembler “au de là des partis mais… autour et par les partis, à toutes les invocations envieuses de politiciens de ce qui s’est produit en Grèce et dans l’Etat espagnol au prix non de contorsions politiciennes intéressées orchestrées par des appareils mais de mobilisations de masse à la base.
Les premiers, chantiers de l’espoir, qui ont le mérite d’exister, restent surdéterminés par les arrières pensées des représentants de partis nous jouent encore une fois une formule poker menteur où chacun et chaque personnalité teste la résistance des autres et surtout ses propres chances de leadership. Une fois de plus la question cruciale des alliances avec le PS sera éludée comme naguère le PCF dans les collectifs unitaires lui préféra la formule évanescente de “ domination du social libérale”. Peut-être élaboreront-ils une formule du genre, in fine, histoire de ne mettre ni les EELV Cécile Duflot, ni les "frondeurs" au pied du mur des politiques européennes. Et puis ces chantiers sortent-ils des cercles anémiques d’habituels des protestations augmentés des agents recruteurs de partis venus voir ?
Les seconds (appels citoyens) tentent de mimer un processus à mi chemin de Syriza et de Podemos. Les mêmes qui en appelent aujourd’hui à “rassembler au de là des partis” sont ceux qui ont obstinément refusé que le FG puisse avoir des adhérents et donc un fonctionnement interne… à la Syriza ou à la Podemos ! Les mêmes qui protègent leurs identités partidaires et refusent toute structure qui ne soit pas de cartel. On imagine déjà les manœuvres plus ou moins de coulisse pour que les listes ainsi “au de là des partis” qui pourraient émerger, comportent leur quota de membres du PCF, du PG et dans la foulée de tel ou tel groupe ou leader/euse de sous groupes. Evidemment il ne sera pas question dans ce “rassemblement au de là des partis” de laisser des collectifs de base voter à bulletin secret pour la composition des listes.
Fausses recettes pour vieilles magouilles et magouilleurs harrassés.
De toutes façons l’appareil du PCF n’a plus d’autre projet politique que celui de sa propre survie. Ce qui lui fait faire électoralement tout et son contraire, comme on sait, au détriment du projet affiché de front de gauche, colifichet effiloché, puis le conduit à dire tout, et faire son contraire dans les exécutifs où il gère (encore) avec le PS. Ce n’est plus un appareil progressiste mais un chancre moribond qui gangrène depuis longtemps tout renouvellement à gauche et bloque tout essort d’un renouveau. Puisque ses militants n’ont pas su ou voulu voir clair et le changer de l’intérieur, il faudra le casser pour s’en sortir (le sort de IU en Espagne devrait les faire réfléchir, ou la trajectoire de Synapismos en Grèce les inspirer). Certains ont cru (dont divers ex LCR) pouvoir faire ce changement du PCF avec l’outil unitaire, toute illusion perdue ils se trouvent aujourd’hui encalminés dans une unité factice qui les use.
Mélenchon est habité par ses fantasmes. On ne sait trop ce que veut ce type à part se trouver un destin sur le tard en puisant dans l’archéologie politicienne franchouillarde. Mais il n'est pas de Domrémy ni puceau : on sait d’où il vient, du mitterrandisme le plus dévôt, des conforts de la république où il a occupé le siège le moins démocratique de ce pays peu démocratique (le Sénat) pendant trente ans. On sait que venant pourtant de l’extrême gauche il n’a rien trouvé à redire à un mitterrandisme qui a choisi en 82/83 l’Europe monétariste (contre laquelle Mitterrand avait été élu !!) de R. Barre, donc les politiques de rigueur et globalement l’offensive libérale orchestrée par Reagan/Thatcher. Il lui a fallu plus de vingt ans pour se raviser. Tout ça pour verser dans la gaudriole germanophobe…
A la gauche de cette gauche nous avons manifestement eu nos belles heures durant dix ans. Le sectarisme frileux de LO a bloqué la constitution d’une force conséquente. Nous mêmes (LCR) avons pataugé et tenté néanmoins, nous avons eu raison, de lancer un “parti large” depuis la base qui aurait coalisé les colères… lesquelles n’ont rien trouvé de mieux que de s’affronter du dedans, de s’ennivrer au dehors d’un début de succès sans tactique unitaire capable d’agir sur les autres, et assaillies à l’extérieur par la jonction PCF/Mélenchon (pour le soulagement du PS, n’est-ce pas Weber ? et celui de l’appareil post stalinien affolé), enfin l’atonie des luttes a sans doute coupé le souffle à ce début d’emballement politique prometteur.
Bref nous avons foiré.
Derrière tout cela il y a une leçon, une seule vraie et valable pour tout le monde qui nous crève les yeux mais dont nous ne nous inspirons cependant pas avec tous ces appels, cénacles, comités et rassemblement.
Syriza et Podemos ne sont pas le résultat de meccano d’apparatchiks plus ou moins sincères, ni d’une alchimie magique de l’unité (érigée au rang de pierre philosophale creuse). On sait qu’ils sont le fruit de processus ancrés, travaillés, boostés par des luttes dont certaines politiquement improbables (les indignés). Des actes de résistances qui ont progressivement mis le feu aux consciences chauffées à blancs par l’austérité, ses méfaits pour ne pas dire ses crimes, produits des ruptures dans certains courants.
Des luttes, des luttes, des luttes (oui, je sais, ça énerve).
Alors puisqu’on le sait pourquoi ne pas suivre cette voie : non pas dans les appels aux peuples pour une énième combinazione électorale (le PS les englue à chaque fois dans nos ambiguités), ni les appels à des chantiers refermés sur eux mêmes qui ne chanteront rien demain quand ils se heurteront aux alliances, aux appétits des petits partis et des grosses ambitions en embuscade.
La voie aujourd’hui serait à construire obstinément un mouvement unitaire de résistance tous azimuts aux questions clés de l’heure que nous connaissons tous : l’austérité en un mouvement qui ne mettrait pas les élections à son agenda, mais les moyens de tisser un réseau de résistance et de popularisation des résistances au lieu de les laisser se succéder (étouffer souvent) chacune dans son coin. Un espace de solidarité et de rencontre que ne vienne pas brouiller les étiquettes mais seulement les buts : la solidarité avec les travailleurs en lutte, la mobilisation contre toutes les discriminations dont le racisme, la dénonciation des politiques concrètes conduites dans les diverses collectivités locales… L’interpellation vigoureuse des élus et des responsables des divers partis, militante, pétititionnaire, obstinée, harcelante… sur le terrain.
Bref, appeler à construire unitairement un vrai espace d’unité, d'unité en actes nourrie des mille et un combats qui jour après jour viennent se cogner contre le mur obtus de l’austérité, ses diktats et ses effets délétères sur les consciences et sur les vies…