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Billet de blog 14 mars 2016

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La leucémie du NPA

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Quand la gauche institutionnelle a la pneumonie, la gauche  révolutionnaire devient leucémique. Et c’est hélas le cas du NPA. Il est en plein débat de préprésidentielle, se cherche lui aussi un/e candidat/e miracle espérant se refaire un lifting sans rien changer, pour sa quasi majorité, au visage flétri et crispé qu’il s’est donné.

Ce n'est pas un secret que le NPA a beaucoup perdu… en orientation politique, avec le pari hasardeux de l’ex Gauche anticapitaliste attendant la dynamique comme d’autres Godot. Elle a ênsé avec ses petits bras musclés et quelques autres alliés (qui se sont trouvé moins décidés) “faire bouger les lignes”. Soit en novlangue gauche de la gauche peser sur l’arthritique bureaucratie post stalinienne. Hélas pour leurs illusions, une fois le NPA KO, amputé d’une partie de sa direction avec leur départ, le PCF n’en a plus rien eu à cirer de leurs admonestations “pédagogiques” ni d’eux-mêmes  d’ailleurs qui ont beau lui cirer les bottes n’en obtiennent qu’un mépris de béton, bien peu de mandats, et surtout les habituels louvoiements entre PS alimentaire, autoaffirmation sectaire et instrumentalisation sans vergogne du FG. La vieille bureaucratie n’a qu’un horizon sa survie désespérée et désespérante. Amère leçon camarades.

Ce départ prévisiblement stérile a complètement déséquilibré le frêle esquif survivant de notre belle aventure d’un NPA large, ouvert, vibrillonnant qui s’est cassée sur le mélenchonisme allié au PCF, le velléitarisme de la gauche altermondiaslite, nos propres insuffisances tactiques ainsi que, sans doute, l'ouverture trop courte de la fenêtre de tir…

Aujourd’hui une grosse partie du NPA est sectarisée jusqu’à l’absurde entre ex des diverses strates de sortistes de LO qui n’ont rien appris et rien oublié, les avatars exclus/excluants de la galaxie lambertiste ivres de leurs grandiloquences, un courant coucou plus ou moins exotique qui ambitionne de cannibaliser l’aventure depuis le début et s’y emploie avec une violence manœuvrière digne des grands moments mao-stals d’antan.

Ils ont en commun de voir des réformistes partout (surtout chez leurs camarades de parti) qu’il importe de toute urgence de tenir à distance, et de débusquer sans faiblesse. Ils voient l’avenir dans un front des révolutionnaires avec LO qui ricane, l’AL dont on connaît la fiabilité voire le PIR et ses islamocampistes.

Les méfaits de cette “ligne” faite plus d’exclusives que de projet, pèsent sur les débats, les actes et les décisions en un paralysant pugilat éreintant pour tous. Ils produisent leurs imparables effets : les effectifs déjà bien réduits ont fondu (le parti s’épurant se renforce ?) et fondent à grande vitesse même si l’on voit des militant/es s’impliquer encore et toujours dans les manifs, des actions comme BDS…

Une autre partie non négligeable peut faire ou défaire une majorité. Elle n’a pas la phobie des “réformistes” pour principe mais par précaution, et de ce côté elle est sécuritaire… elle ronchonne envers la gauche de la gauche, mais les faits étant bêtement têtus comme dit l’autre, la lutte actuelle contre le projet El Kh. leur enjoint et leur prouve qu’on ne fait pas “contre” les “réformistes”, qu’il faut “faire avec” dans tous les sens de l’expression. Reste à leur expliquer qu'on peut mener campagne commune, même campagne politique voire (ouh là !) présidentielle sans que cela implique de reniement de soi, de silence sur ses orientations ni  de danse du ventre “pédagogique” à la manière des anciens de la GA. Qu’on peut agir fraternellement voire radicalement avec les “réformistes”... si utile. Et qu'avant de dire non on regarde l'utilité.

Cette ligne de crête qui “fait avec”, Besancenot l’incarne fort bien sans complaisance ni dénonciation obsessionnelle. On l’entend heureusement dans les medias, il la développe avec clarté sans exclusive, tonitruance ni invective (suivez mon regard) ni… moi-je providentiel (il se refuse à être de nouveau candidat). C’est une ligne qui s’efforce de tenir les deux bouts du réalisme politique anticapitaliste : le peuple de gauche traditionnel déboussolé et malmené par les dérives insupportables de ceux qu’il élit, qui se remet en selle dans les luttes, à qui donc il faut parler, la radicalisation exaspérée qui cherche entre abstention grognonne et melenchonâtrie résignée une issue aux impasses, une victoire qui redonne du souffle voire un petit raccourci...

Cette ligne qui marche debout et sur deux jambes est à la peine dans ce contexte d’un NPA infantilement communiste et d’une gauche de la gauche en délitement, alors elle perd du terrain. Il y a fort à parier que la baisse notable des effectifs (et de ses scores) vient de ses rangs. Faute de savoir ou d’avoir voulu constituer un courant visible, solide, organisé, dynamique, attractif au lieu d’être défensif et cantonné quasiment à l’interne (sauf Besancenot dans les medias), cette tendance historique du NPA, dans l’esprit de l’ex LCR, voit sans doute surtout les siens s’en aller.

Ils elles sont simplement fatigués (je le fus et le reste) de devoir penser de façon défensive sur le terrain des autres, celui que les sectes imposent, sans bénéficir d’un cadre collectif commun dans lequel tenter de penser le neuf, de risquer l’hétérodoxe et les solidarités compliquées, d’apprécier les autres expériences sans préavis péremptoire, de guetter l’inattendu. Nombreux sont aussi celles et ceux que je connais qui sortent blessés d’une façon d'imposer l'arrogance politique digne des grandes heures, encore une fois, des extrêmes gauches les plus bornées et pitoyablement comminatoires…

Voici donc l’anticapitalisme bien malade, en partie de lui-même. De la situation politique aussi dira-t-on. Oui, oui, sans doute. Mais le “facteur subjectif” ça compte et nous avons eu notre part… il va être temps de penser l’avenir.

En faisant tout déjà, tous ensemble, pour que capote la loi scélérate de ce pouvoir scélérat.

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