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Billet de blog 16 octobre 2014

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Le congrès du NPA annoncé : suite et resuite

Ce que j’espère souligner dans cette série de billets à propos du congrès du NPA c’est la perte du sens des réalités qui mine ses débats alors même que son lancement promettait de partir du réel, de la base, des faits et gens.

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Ce que j’espère souligner dans cette série de billets à propos du congrès du NPA c’est la perte du sens des réalités qui mine ses débats alors même que son lancement promettait de partir du réel, de la base, des faits et gens. La liturgie ordinaire des « résolutions » de congrès et l’enfermement dans un entre-soi conceptuel malgré les promesses de « bilans » et « d’analyses » concrètes font obstacle à la réflexion approfondie et propulsive sur ce qui se passe dans la lutte des classes.

Ainsi, certes dans les textes il est fait mention des luttes, des autres partis, des révolutions et des mutations internationales (Grèce, Podemos, Portugal) etc, heureusement. Mais le point de départ des réflexions et donc des propositions reste la sempiternelle ritournelle des textes de congrès s’étalant sur la situation économique et politique de la bourgeoisie dont la crise ne cesserait de s’aggraver alors qu’on pourrait aussi bien écrire avec un peu de réalisme que ses victoires sur les travailleurs et les peuples ne cessent de se succéder en dépit des graves difficultés internes et internationales qu’elle rencontre forcément (on ne mène pas une offensive mondiale contre les populations sans susciter de vagues et même de tempêtes).

On écrit sur la gauche tout le mal possible, sa progressive décrépitude mais qui, au bout du compte, avant d’être celle de la gauche institutionnelle laquelle s’accroche comme en Grèce en attendant des jours meilleurs, est surtout la nôtre un peu partout dans le monde y compris dans les pays qui ont fait une révolution et subissent de plein fouet l’anorexie politique des gauches, leur absence d’attractivité, de consistance progressiste et d’unité. L’incapacité jusqu’ici d’une gauche anticapitaliste de fédérer et d’agir devrait nous inciter à d’autres réflexions que de nous donner comme objectif de reconstituer une conscience de classe sans voir qu’elle s’exprime à sa façon à travers le monde, ou répéter les mantras sur « notre camp social » et « notre classe » comme si, au bout du compte, c’est nous qui avions perdu cette conscience.

La GA a tout parié sur « le débouché politique » moquant même notre fétichisme des luttes. On ne peut pas dire que la déconfiture actuelle du FG ait apporté de l’eau à son moulin ni beaucoup confirmé la prescience politique dont se réclamait l’ex direction du NPA partie « construire le FG » derrière « l’Homme de la situation ».

Pour notre part nous insistons sur les luttes et surtout leur convergence.

> Qu’est-ce qui bloque cette convergence ? La GA espérait voir la base militante de la gauche de la gauche se dégager de ses pesanteurs et surtout de ses directions. Fiasco. A l’inverse dire que seules ces directions bloquent ne tient pas compte de l’usure que quarante ans d’offensive libérale acharnée ont produite sur la combativité et surtout non tant la conscience de classe que la confiance en soi des salariés même s'ils ont conscience d'être les 99% et les créateurs de richesse.

> Ceci dit quelles conclusions tirer de ce que ça bloque à la gauche de la gauche sans que « la base militante » en vienne à se dégager de ses directions malgré l’ampleur et la virulence de l’offensive capitaliste ? Les uns en tirent comme conclusion que rien n’est possible avec ces « réformistes ». D’autres n’y renoncent heureusement pas tout en n’en tirant pas la conclusion qu’il faut chercher le sésame dans l’auto activité si minime soit-elle, l’autoorganisation si embryonnaire soit-elle et donc faire de cette construction un axe prioritaire de l’activité du NPA sans en rester aux cadres unitaires cartellisés néanmoins indispensables. 

Or ce me semble être une des leçons à tirer de l’expérience Podemos en cours mais aussi d’Ocupy Wall street et certainement des tensions prévisibles pour le coup entre la base de Syrisa et sa majorité si celle-ci parvient au pouvoir.

> Comment donc tout en pratiquant une unité interorganisationnelle dans la gauche traditionnelle (gauche dont est le NPA même s’il a un pied dehors) à chaque fois que possible, chercher la voie d’une unité par la base que cette unité là ne provoque pas ? Sur quels sujets ? Quelles forces y mettre ? Quels cadres politiques y élaborer qui ne s’en tiennent pas à la doxa traditionnelle à gauche. Entre autre sur le FN contre lequel le vieux schéma antifasciste ne fonctionne pas, par exemple.

Et donc, quelle hypothèse de travail choisir ?

-      L’attente d’une situation soudaine de grève générale insurrectionnelle qu’un solide embryon de parti révolutionnaire saisirait et dont il s’agirait à chaque occasion, grosso modo, de faire la propagande à l’exclusion de toute autre proposition transitoire ou unitaire négociée (donc insatisfaisante) ? S'en tenir au catéchisme répété à charge aux masses d'enfin s'en saisir.

-   Une introuvable unité des organisations à gauche des soc dem qui servirait bon an mal an de débouché politique et ipso facto ( ?! ah bon) d’encouragement à un processus de mobilisation populaire ? Unité sempiternellement à remettre sur le métier et qui s’ouvre dangereusement vers la trentaine de députés PS qui ont quand même voté la politique libérale depuis deux ans, ou qui va verser dans l’aventure national-bonapartiste d’un Mélenchon?

-      Un processus d’autonomisation des luttes vis à vis d’appareils corrompus par l’intégration sociale et politique dans les institutions libérales (sans pour autant rompre toute activité d’unité avec eux) et donc d’autoorganisation systématiquement encouragée, recherchée, suscitée qui serait le terreau d’un renouveau politique ?

Selon l’hypothèse qu’on adopte on construit un type de parti et on priorise une tactique.

Les premiers voudront un NPA révolutionnaire pour ne pas dire marxiste (à leur sauce) révolutionnaire, « hypertrophie doctrinale », « ton prophétique » et « emphase rhétorique » à l’appui, avec front des révolutionnaires comme stratégie et démonisation des « réformistes » avec qui pas grand chose ne serait possible sinon sur des bases « révolutionnaires » inaudibles et inacceptables par eux.

Les seconds se sont enferrés dans le FG dont ils escomptaient qu’il tourne à une forme sui generis d’abord de die Linke puis de Syrisa, et sont bien embêtés aujourd’hui (y compris par l’évolution de ces deux expériences). Les voici, une fois le Fg démonétisé par ses contradictions de départ, guettés soit par la marginalisation même s’ils réussissent à créer leur « ensemble » désormais privé de son rôle de troisième pôle plus ou moins anticapitaliste, soit par l’aventure présidentialiste de Mélenchon, sorte de Déroulède miterrandien. Il leur reste l'unité d'action avec un NPA remis sur ses rails...

Les troisièmes, englués dans l'échec du NPA, peinent à avancer sur un travail d’émancipation par en bas, par les luttes, dans lequel devrait maturer une base programmatique autour des questions sociales et démocratiques, un processus de contre pouvoir à partir de la résistance à la politique de rigueur, et une forme parti renouvelée. Pour cela ils doivent trancher sur deux points : un parti clairement anticapitaliste rassemblant la diversité historique de la gauche de combat (ce qu’incarne Besancenot), et une orientatin à deux jambes, l’une dans la pratique unitaire obstinée avec le vieux mouvement ouvrier, l’autre dans la recherche systématique et tout aussi obstinée (et pas seulement professée) de formes d’autoorganisation à la base.

Nul doute que cela soit impossible avec le NPA réellement existant qui n’a plus grand chose de nouveau, est tiraillé entre ses anticapitalistes sincères qui peinent à s’affirmer et s’émanciper, ses révolutionnaristes doctrinaires à l’abordage d’un bateau qu'ils contribuent à rendre plus ivre, et ceux qui, à la manœuvre, croient pouvoir tirer les marrons du feu en mariant… l’eau et le feu, la fluidité anticapitaliste et le brasier verbal révolutionariste.

Seul indice d’une sortie d’impasse possible : quand une mobilisation se profile (cf. la Palestine) le petit parti fait corps et se dynamise… mais jusqu’où ?

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