Jacques Fortin (avatar)

Jacques Fortin

retraité, après mille et un boulots

Abonné·e de Mediapart

312 Billets

1 Éditions

Billet de blog 18 décembre 2013

Jacques Fortin (avatar)

Jacques Fortin

retraité, après mille et un boulots

Abonné·e de Mediapart

L'UTOPIE (HOMO)SEXUELL billet n° 14 Gay, à des titres divers

Jacques Fortin (avatar)

Jacques Fortin

retraité, après mille et un boulots

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Gay, à des titres divers

Le président, « F to M » comme on dit, d’une association lyonnaise de transsexuels déclara lors d’une émission télévisée : "je suis un homme avec un vagin". Il n’avait nulle intention de soumettre sa transidentité à la chirurgie ni aux diktats du gymkana psychorigide du "protocole thérapeutique" en vigueur pour les parcours dits de transition.

AIDES, l’association de lutte contre le SIDA conduit deux types de prévention des MST. L’une, comme de juste est" en direction des gays", l’autre se présente, ce qui est plus inopiné comme "en direction des hommes ayant des pratiques sexuelles avec des hommes ».

La bisexualité intrigue. À parité être attiré par les deux sexes ? Être attiré plus par l’un que par l’autre ? Être en capacité d’accomplir un acte sexuel avec l’un et l’autre, passif  ici actif là ? Être, éventuellement dans l’érotique simple avec l’un, sans plus d’affect, et dans le rapport amoureux avec l’autre ? Et se savoir hétéro mais connaître ou avoir connu une relation affective, sensuelle et érotique avec une personne de même sexe que soi ? Il n'y aurait pas de bisexualité type ? Simplement se sentir disponible sans a priori sur le sexe, le genre ni sur ce qu’on fera soi-même ?

Homosexuel… bon d'accord : actif ou passif ? (obsession normative des « profils » sur les sites) Il y a aussi ceux qui sont "les deux", d’autres sans analité etc. Il y a les virils ou les féminines qui revendiqueraient beaucoup des codes et des comportements convenus « en mode hétéro ». Plus ou moins mal aimé/es : les folles, les efféminés, les butchs et autres variations qui dans la vie réelle et la conscience de soi ne sont pas contingentes. Les tout simplement homo, comme ça, en roue libre, sans code revendiqué. Et puis, ce qui se joue de conscience de soi dans les jeux divers de domination, de travestisme et fétichismes, postures pas seulement ludiques, structurantes. Enfin ces homosexuels qui ont vécu, qui vivent, recherchent une relation affective, sensuelle et érotique avec une personne de l’autre sexe.

Diversités des imaginaires où ne se jouent pas seulement des pratiques. (Imaginaires structurants pas simples superstructures idéelles). Configurations bien plus diversifiées que ne le laisse entrevoir l’acronyme néo-normatif LGBT. Que nous disent-elles, chacune dans leur variation spécifique sinon leur commune et diverse protestation d’une sexualité contrainte ? Et qu’il existe mille et une façons de « ne pas être hétérosexuel-le » ?

Il y eut débat au sein de AIDES sur la catégorie « hommes ayant des pratiques sexuelles avec des hommes » et débat vif sur le dédoublement de l'action, au motif que la prévention ne saurait se départir de la « libération ». Et que se prémunir impliquait de se reconnaître, « entrer dans la fierté homosexuelle », cesser d’être des honteuses.

Or cela ne « marchait » pas. Le discours communautaire, identitaire n’avait pas prise. Il apparut qu’aimer le sexe entre hommes n’était pas ipso facto synonyme d’aimer les hommes (ce qui, par ailleurs, peut être le cas d’homos déclarés), sans que, nécessairement il s’agisse de déni d’homosexualité . Il apparut qu’il pouvait y avoir non seulement actes homosexuels mais pratiques régulières choisies, donc homosexualité sans homosexuels. Ces hommes semblent bien trouver et chercher satisfaction récréative ou pulsionnelle dans ces pratiques sans ressentir le besoin de s'identifier (encore moins de se voir identifier ce qui est plus ambigu).

Pourquoi pas ?

Des femmes vivant en couple avec une femme déclarent ne pas se définir comme lesbiennes mais comme femme aimant une femme et ne souhaitent pas plus d'identification qu'elles disent ressentir comme une assignation. La « culture », la fantasmatique, la construction de soi lesbienne (dans sa diversité) ne sont pas les leurs. Femmes aimant une femme (et non les femmes) elles pourraient aimer un homme, ajoutent-elles.

Dans le secret du lit conjugal hétéro, des « fantasmes » se réalisent par des pratiques qui ont à voir avec l’homosexualité. Ainsi quelle serait la "nature" d'une pénétration par godemiché d'un homme par sa femme, homo ? ou bel et bien hétéro ? Pulsion homosexuelle ou goût parfaitement hétéro de se voir soumis à pénétration par une femme, voire "sa" femme ? On est là en « mode hétérosexuel ». La femme s'y prête peut-être pour vivre ainsi « en posture masculine » mais bel et bien vis-à-vis de son homme, ou y a-t-il fantasme transsexuel ? Pourquoi cela devrait-il être "soupçonné" ?

Et le jeu, le pur jeu du plaisir qui s’explore sans se questionner ni chercher à questionner quoi que ce soit en soi (et « En Soi »).

Quelle part de transgenréité, de transidentitaire y a-t-il dans l’homosexualité ? Car il y en a, souvent et beaucoup. Quel « court circuit » inter genres y a-t-il dans ce trouble ressenti envers ou avec une personne de même sexe que soi ? Pas forcément en termes de doute sur sa propre identité d’homme ou de femme, mais dans le rapport au même sexe puis dans le rapport à l'autre sexe... qu'est-ce qui se noue, se joue, se jouit ?

En « territoire hétérosexiste », il ne peut pas être insignifiant d’être attiré par des personnes de son propre sexe (ni de ne pas l'être par l'autre sexe). Qui peut en décrypter le sens ? Sinon, encore une fois comme la crise d’une sexualité contrainte… enclose dans la dualité conflictuelle des genres !

Dans certaines cultures ou structures sociales, n’est pas considéré homosexuel celui à qui l’on donne du plaisir, met à disposition son propre corps pénétré, qu’on suce ou qu’on masturbe. L’homo, c’est l’autre : le pénétré, suceur, branleur. Il arrive qu’il dispose (chez les Amérindiens, les Ijrahs du Pakistan) d’un statut. Tout en pratiquant le sexe d’accueil convivial entre hommes, les Germains noyaient quiconque « trop efféminé » ne remplissait pas ses devoirs conjugaux. Les Grecs le déchéaient de sa citoyenneté.

Le métrosexuel, « so chic » quoique en train de passer de mode vient mettre un doigt de pied dans le no man’s land « non hétéro », contaminé mais pas annexé sans doute. Une amorce de reddition qui signe la crise de l’ordre sexiste ?

"Petites boites" L ou G ou B ou T, à partir de quels actes posés qu’ils soient pratiques ou symboliques, avoués ou tacites, conscients ou retenus serait-on de ‘l'une ou de l’autre ? Et de combien de ces actes? Et sur quelle durée ? Et par quelles attentes ? Quelle conscience de soi ? Qui décide ? Les psy ? Les sociologues ?  La loi ? Soi certes, mais si soi ne décide rien...

Ou, contre tout différentialisme réducteur, convenir d’être au milieu de tout cela gay à des titres divers ?

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.