"Les sectaires ne sont capables de distinguer que deux couleurs : le noir et le blanc" Trotsky. Ben oui. suite de la citation : "Pour ne pas s'exposer à la tentation, ils simplifient la réalité".
Ceux qui utilisent à tout bout de champ l’épouvantail du réformisme pour démoniser leurs contradicteurs, feraient bien de revisiter le terme et de réviser un tant soit peu leurs chers classiques lus à la va-vite, les doxas convenues derrière lesquelles ils se réfugient en ces temps difficiles, et leur talmudisme à la petite semaine.
Le réformisme, historiquement, ce sont ces courants du mouvement ouvrier qui pensent pouvoir venir à bout du capitalisme par une succession de réformes. Ce sont d’ailleurs des anticapitalistes !
Soit dit en passant, sauf à être porteur malsain de gauchisme catastrophiste, toute réforme lorsqu’elle est un gain pour les travailleurs, est bonne à prendre. Il s’agit là du B A BA de l’action syndicale ou de la lutte pour les droits démocratiques. La réforme ce n’est pas l’horreur.
En matière donc de réformisme avéré, je ne connais plus de courants qui aujourd’hui prétendent venir à bout du capitalisme par une succession de réformes, par une logique, une « dynamique » de réformes. Si l’on prend les camarades de la GA par exemple, cible de choix, ils n’ont jamais dit que les réformes « citoyennes » du feu Front de Gauche auraient raison du capitalisme, ils ont plutôt argué qu’elles seraient un facteur déclenchant de reprise des luttes, d’inversion du rapport de force entre classes dans une optique révolutionnaire.
La gauche existante, quant à elle, survivant péniblement sous le joug du libéralisme triomphant prétend tout au plus le réformer ou le tempérer ou l’amadouer sans caresser l’objectif de lui contester la suprématie, encore moins de lui substituer quelque socialisme que ce soit.
En ce sens ces courants, post stalinien, écolo, social démocrate (qui n’est pas social libéral) "tempérants et modérateurs" ne relèvent pas du réformisme ni de l’anticapitalisme même si, bien évidemment ils comptent un nombre variable mais substanciel d’anticapitalistes en leur sein qui nous intéressent, qui faute de mieux, éventuellement rebutés par certaines palinodies voire convulsions sectaires ne se sentent pas (ou plus) de passer de notre côté de la révolution.
Par contre, si l’on est bien d’accord (et donc pas fou) que des réformes sont toujours bonnes à prendre si elles le sont en dépit des capitalistes et au bénéfice des travailleurs, il y a à faire avec la gauche "tempérante et modératrice" dans la lutte anticapitaliste : obtenir des réformes c’est acquérir un peu de confort pour les exploité/es et opprimé/es, gagner des points contre la toute puissance de l’ordre capitaliste et, à l’occasion tester des formes de luttes, d’unité entre courants séparés, de victoires qui font penser.
Ce n’est pas rien !
Le débat n’est donc plus entre Réforme et Révolution au sens stratégique de la question. Et c’est bien dommage car cela révèle que les courants organisés du mouvement prolétarien qui porteraient encore l’objectif et donc la volonté, l’espérance d’en finir avec le capitalisme ont quasiment disparu ! Ils ont été entre autres laminés par les trahisons social démocrates et surtout l’épouvantable repoussoir stalinien.
Ceci dit, nous avons tout intérêt et le prolétariat surtout, à chercher à chaque fois que possible sur chaque sujet profitable l’action commune voire un front circonscrit avec ces courants même si leur horizon est pauvrement limité à un rafistolage, un cautère sur jambe de bois ou un peu plus de respiration dans l’asphyxie libérale actuelle.
Tout ce qui peut être gagné de bon sur le capitalisme doit être gagné sur le capitalisme : cela ouvre la voie sinon à la perspective du socialisme du moins à la possibilité d’une modification des rapports de force.
Nous en avons bien besoin.
Contrairement aux angoisses des révolutionaristes sectaires hantés par « le réformisme partout » et terrorisés à l’idée de s’y frotter, nous n’encourageons en rien une pensée ni une stratégie réformistes en travaillant à l’unité d’action avec le reste de la gauche sur des objectifs précis et progressistes. Nous tentons de modifier le rapport de force entre les classes, si minimement cela soit-il, et de redonner confiance en soi aux forces prolétaires.
Ce n’est pas rien et c’est ça la politique unitaire.