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Billet de blog 27 janvier 2015

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Merci Olivier !

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

C’est drôle cette volonté de minimiser l’impact des élections grecques, à droite où on semble chercher à se rassurer comme à gauche où on aimerait y accrocher son wagon, et même à l’ultra gauche qui affiche un scepticisme sentencieux quand ce n’est pas carrément pisse vinaigre.

Et c’est un vrai bonheur que de voir Besancenot (in Nouvel Obs, sur les télés) afficher tout sourire sa jubilation solidaire : ce n’est pas si souvent que la gauche l’emporte, nom de nom, et l’entendre affirmer que « Syriza c’est une opportunité colossale pour la gauche française » rassure sur ce qui pourra sortir à l'avenir d'une gauche anticapitaliste en lambeaux.

La joie c’est de voir le peuple grec prendre sa revanche de cinq années d’une terrible austérité, l’équivalent d’une guerre nous dit-on. Une joie de larmes aux yeux et de fierté. Quand un peuple au fond du trou avec contre lui toutes les instances et les oracles internationaux se lève pour dire non (avec les armes à sa disposition) c’est un moment historique pour tout démocrate, un espoir formidable pour tout révolutionnaire, une émotion rare dans une génération.

Les révolutions ne viennent pas de longs délibérés sentencieux, mais d’un de ces moments de grâce où le scandale étant allé trop loin alors les opprimés relèvent la tête, les exploités mesurent leur dû, les démocrates disent avec eux : stop et quelque chose alors, peut-être, peut se profiler dans l'avenir insondable.

Depuis Tchatcher puis la chute du mur, il a été consciencieusement seriné aux peuples « qu’il n’y a pas d’alternative », jusques et y compris dans le déni de démocratie que fut le traitement inouï du Non français au référendum. Et ce « il n’y a pas d’alternative » a lentement désagrégé y compris la gauche de la gauche qui s’y est heurtée partout, de die Linke au Front de gauche sans parler de feu notre NPA. Voilà que ce sont des secteurs nouveaux et « irresponsables » politiquement (non insérés dans le concert institutionnel) qui passent outre, tels les indignés de Podemos ou, sous leur poussée, Syriza alors que les luttes des salariés n'en finissent plus de tenter partout, encore et encore la résistance, une interminable résistance, quelque chose comme l'agonie sans fin, sans issue du mouvement ouvrier d'antan.

Le mouvement syndical a plié devant ce diktat du "pas d’alternative" et donc à l'alignement sur le libéralisme ambiant : la CGT elle-même, ici, s’apprêtait à ne pas donner de consigne de vote lors du référédum de 2005 et son conseiller économique a largement participé à l’élaboration du volet « social » de feu le traité (celui qui changeait le « droit à » une retraite etc… par le droit de « s’en faire une »). Il a fallu une révolte contre son dirigeant d'alors pour qu'elle dise non. Hormis Solidaire et en partie la FSU le mouvement syndical s’est aligné sur ce no alternativ sans le dire forcément mais en acceptant de négocier l’inégociable c’est à dire la réduction a minima du code du travail, le "tout entreprise", l’idéologie de la « responsabilistion » libérale (privatisation progressive des systèmes sociaux) troquant ces abandons contre l’intégration plus poussée des bureaucrates dans les rouages européens et perdant tout repère éthique (cf les salaires des cadres de la CGT et l’affaire Le Paon !), laissant faire l’extrême extension du fossé entre riches et pauvres et l’appauvrisement accéléré de ces derniers sans savoir construire de riposte d'ensemble efficace.

Il a fallu cinq ans d’une guerre affreuse contre le peuple grec et le pays lui-même, inopérante puisque la dette est plus élevée à la sortie qu’elle ne l’était au départ, pour que ce peuple abasourdi de tant de violence sociale et de surdité devant ses immenses mobilisations, se débarrasse de ses dirigeants pour élire un tout neuf conglomérat de partis de toutes les gauches (depuis les trotskistes jusqu’à des sociaux démocrates recyclés) clairement opposé à la politique de rigueur.

Or l’Europe n’est pas vierge de gauches de gauches ou de gauches de la gauche que ce soit en Allemagne, en Espagne, au Portugal, au Danemark, en France, en Italie, au Royaume Uni... Il existe des forces en mouvement. Les grands rendez-vous des forums sociaux, les temps altermondialistes, les mobilisations salariées de résistance ont travaillé il n’y a pas si longtemps à développer l’idée « qu’un autre monde » en tout cas une autre politique étaient possibles et en tout cas nécessaires.

Voilà que cela prend corps.

Sauf à être un âne bâté de doctrinaire gauchiste ou un crétin de dirigeant socialiste français ou un libéral européen qui veut à tout pris faire croire que… on ne peut minimiser l’impact que va avoir cette élection, qu’elle peut avoir si on saisit l’occasion, quelle qu’en soit l’issue, qu'elle doit avoir si nous en avons l'enthousiasme et la détermination. Le saurons-nous ?

Et ici, en France, sortons les sectaires : comme Besancenot l’esquissait hier soir à la télévision, tendons-nous la main, sortons des ambiguités avec le PS (Verts votez non à Macron), des égocentrismes partidaires, des plans de carrière, des crispations doctrinaires, cherchons la voie d’une conjugaisons de nos forces, d’une mutualisation de nos capacités.

Soyons libres et audacieux ! Ni repli sectaire ni calculs partidaires !

Car oui, la donne a changé en Europe. Une autre Europe est possible, et qu’on le veuille ou non, Syriza en montre la voie. Alors ne crachons pas dans la soupe.

Soutien d’abord, critique ensuite.

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