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Billet de blog 13 novembre 2024

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L’élection de Trump ? avant tout une manifestation de la crise du capitalisme

Curieusement l’élection de Trump est interprétée non seulement comme une poussée de l’extrême droite, ce qu’elle est, mais aussi comme une victoire du capitalisme, alors qu’elle est au contraire une manifestation de sa crise.

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Les bourses montent, le bitcoin bat des records, l’homme le plus riche du monde Elon Musk a accru sa fortune de 29 milliards $ dans la seule journée du 6 novembre qui suivait l’élection et prend un poste dans l’administration Trump, etc. Mais cette victoire de Trump est la manifestation à la fois de la difficulté où sont les travailleurs aux États-Unis et de leur désaffection à l’égard des politiques et élites qui gèrent le capitalisme depuis des décennies. C’est ce que manifeste aussi la poussée de l’abstention. Trump a gagné avec le même nombre de voix 74 millions qu’en 2020, mais Harris avec 70 millions de voix, en a perdu 10 millions par rapport à Joe Biden en 2020. Enfin L’élection de Trump est la manifestation que des fractions des classes dirigeantes elles-mêmes perçoivent que ça ne peut pas durer comme ça et, comme Elon Musk, montent directement au créneau. En Allemagne le ministre des Finances, viré, est remplacé par l’ancien patron de Goldman Sacks, le chef de la CDU et de la prochaine majorité, Friedrich Merz, est l’ancien patron Allemagne de Blackrock le plus grand fond de placement du monde…   

Les enseignements principaux de l’élection de Trump sont donc 1) que les choses ne vont pas bien pour les travailleurs aux États-Unis, 2) qu’ils perdent confiance dans les dirigeants du système en place, 3) que des fractions des classes dirigeantes se sentent obligé de proposer autre chose et 4) que du coup les travailleurs essaient des solutions qui paraissent antisystème comme ce que propose Trump mais menées par une fraction des oligarques milliardaires. Bien sûr ils seront déçus mais ils risquent alors de mettre en cause tout le système.

C’est ce que craint Martin Wolff, l’éditorialiste vedette du Financial Times, une des bibles du capitalisme occidental, qui consacrait en 2023 un livre[1] étonnant au danger que représente Trump pour le capitalisme et la démocratie. Livre étonnant car il semble écrit après la réélection de Trump le 5 novembre 2024 et non l’année dernière. La connaissance approfondie du fonctionnement du capitalisme par l’auteur rend ses critiques particulièrement percutantes. On peut souscrire à ses constats, à l’exception du fait qu’il considère que l’esclavage industriel, le colonialisme, l’impérialisme qu’il ne nie pas, ne seraient que des éléments du passé, sans conséquences et sans effets sur la situation actuelle. Il est persuadé que l’élection de Trump va aggraver la crise du capitalisme.  Pour sauver ce dernier et la démocratie, la solution que Martin Wolff préconise est un « New New deal ». C’est-à-dire la politique lancée par le président américain Franklin Roosevelt avant la 2ème guerre mondiale afin de surmonter la crise capitaliste et contrer l’impact de la révolution soviétique. Revenir en arrière, remonter l’histoire… on peut difficilement être moins rationnel pour quelqu’un qui prétend pourtant l’être.   

Curieusement la gauche, y compris celle qui se veut révolutionnaire, suit un peu la même pente. Elle qui ne cesse de prédire la crise du capitalisme ne la voit pas lorsqu’elle advient. Elle crie bien souvent alors, comme avec la réélection de Trump, « halte au fascisme ! » ce qui, en raison de l’expérience historique ramène à la solution de Martin Wolff, à soutenir le « moins pire », le capitalisme démocratique, amène à voter Macron pour éviter Le Pen, amène ainsi à consolider le système capitaliste au lieu de faire émerger l’alternative crédible, le communisme démocratique.

Certes l’élection de Trump aggravera la situation pour les travailleurs américains, comme pour ceux d’Ukraine, de Palestine et du reste du monde. Mais c’est ça la crise du capitalisme ! Elle a des conséquences terribles pour la majorité des gens, c’est pourquoi elle exige des solutions nouvelles qui tiennent compte de l’expérience : la démocratie définitivement n’est pas, n’est plus liée au capitalisme. Preuve se fait tous les jours que la défense des libertés exige aussi l’égalité. « Comment un parti politique (les républicains) dont le but est de défendre les 0,1 % les plus riches peut gagner le pouvoir à travers un suffrage universel démocratique ? » se demande Martin Wolff.

La démocratie n’a pas été non plus la caractéristique des tentatives communistes précédentes ! Donc face à la crise capitaliste dont l’élection de Trump est une manifestation, une seule solution nouvelle : le communisme démocratique ![2]

[1] Martin Wolff: « The crisis of democratic capitalism” Penguin Books 2023.

[2] Jacques Lancier : « Réinventer le communisme, un communisme démocratique, écologique, européen, internationaliste », Amazon 2018.

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