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Communiste sans parti. Auteur de: "Etrangers, immigrés, bienvenue! vous aussi êtes ici chez vous", "L'Irruption des prolétaires", "Gilets Jaunes une lutte ouvrière décapante", "Réinventer le communisme"

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Billet de blog 23 mars 2022

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Droite 60%, Gauche 20%, Abstention 20%. Que faire ?

Les 12 candidats à l’élection présidentielles de 2022 sont donc connus. Emmanuel Macron, président sortant, a lors de son quinquennat choisi tous ses premiers ministres chez Les Républicains (LR). Il envisage sa « concurrente » Valérie Pécresse comme ministre. Macron et Pécresse se disputent pour savoir qui a volé le programme de l’autre.

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Tous deux représentent la fraction mondialiste du système capitaliste, et au sein de cette fraction, sans doute des clans de milliardaires aux intérêts différents. Avec eux on sait où on va : c’est la continuation de la politique des oligarques français qui orientent le pouvoir depuis des décennies : aggravation des inégalités, crises écologiques, crises économiques, aventures guerrières pour préserver les intérêts de l’empire français. Les révoltes telle que celle des gilets jaunes sont inéluctables. Lors de cette élection la guerre en Ukraine donne un avantage à Macron puisque c’est lui qui est en charge. Les sondages le donnent déjà gagnant. Ces derniers indiquent aussi qu’à eux deux les candidats mondialistes feraient 40% au premier tour, soit plus de 30% des inscrits si l’on tient compte des 20% (au moins) d’abstention probable.

Leurs opposants, la fraction dite populiste, défendent le même système capitaliste. Marine Le Pen, la nationaliste, a été financée lors de l’élection précédente par un oligarque russe. Éric Zemmour a son oligarque personnel, Vincent Bolloré. Si on leur adjoint les suffrages du duo Nicolas Dupont Aignan-Philippot (ex N°2 du Front National) et Jean Lassalle, les sondages les donnent à eux tous à plus de 30%, soit plus de 25% des inscrits. Ils seront donc battus par le candidat mondialiste. En effet ils ne sont pas une solution actuellement réaliste pour un capitalisme impérialiste français dont la fraction dominante, celle du CAC40, a besoin d’exploiter les travailleurs du Sud, soit comme immigrés en France soit dans des délocalisations à l’étranger. Mondialistes et leurs adversaires populistes, la droite, tous défenseurs du système capitaliste, recueillent plus de 70% des intentions de vote, soit près de 60% des inscrits.

Anne Hidalgo, Yannick Jadot, Fabien Roussel, candidats de gauche sont les héritiers de Mitterrand et de Hollande. C’est la gauche de « gouvernement », celle qui veut gouverner à tout prix, y compris en faisant une politique de droite. Ils manifestent tous les trois contre la justice, avec la police et le ministre de l’intérieur Darmanin, macroniste et ex LR. Manuel Valls, l’ancien premier ministre de gauche, indique leur trajectoire : il appelle à voter Macron dès le premier tour, eux probablement au second, comme ils l’ont fait en 2017. Au sujet de la guerre en Ukraine Jadot et Hidalgo sont particulièrement va t en guerre et favorable à l’Otan dirigé par les Etats Unis. Jadot est pour des assassinats ciblés, sans jugement, décidés par lui une fois élu… Roussel, membre d’un parti communiste, a oublié d’inclure le mot même de communisme dans son programme. A eux trois les sondages les donnent à moins de 12%, soit moins de 10% des inscrits. Ceux sont des candidats à étiquette de gauche, mais plutôt « centristes » en quelque sorte. 

A gauche, à côté de Nathalie Arthaud la candidate de la secte Lutte Ouvrière à 0,5%, Philippe Poutou est donné à 1,5%. Jean Luc Mélenchon est le seul à atteindre les 13% d’intentions de vote, soit 10% des inscrits, seul ainsi à pouvoir être au second tour. L’ensemble des candidats de gauche dépasseraient à peine les 20% des inscrits. Bien sur les sondages sont approximatifs et peuvent se tromper, mais sans doute pas au point de donner une image complètement fausse de la réalité. Cette image aujourd’hui est :

Une droite à 60%, une gauche à 20%, une abstention à 20%. Dans cette configuration, et en l’absence d’un mouvement social d’envergure, on sait d’avance que l’élection présidentielle, comme les élections législatives qui suivront, ne résoudront rien. Même si Mélenchon passait le premier tour, même s’il était élu au second - rallier tous les abstentionnistes et tous les électeurs des autres candidats de gauche ne suffira pas ! - avec une droite à près de 60% rien de sérieux ne sera possible ; d’autant plus sans mouvement populaire. Ce qui est en jeu avec la crise écologique, la crise des inégalités, les risques de guerre n’est rien de moins que le dépassement du capitalisme. Cependant ces sondages nous l’indiquent clairement : l’opinion publique, comme l’état de la lutte de classes n’est pas à la révolution ! Pour l’instant la majorité des gens en France préfère continuer comme avant,  avec éventuellement de petits ajustements à la marge. Dans ces conditions, guerre en Europe en plus, tout naturellement le président sortant est le favori. Mais de la même façon que les crises qui ont marqué le premier quinquennat Macron, gilets jaunes, pandémie, entreprises guerrières françaises en Afrique, lutte pour les retraites, guerre en Ukraine, n’étaient pas dans le paysage des élections de 2017, le prochain quinquennat sera secoué par un lot de crises inévitables autant qu’imprévisibles. Ces crises sont toutes des manifestations de la crise générale du capitalisme.  Certaines se profilent déjà : continuation de la guerre d’Ukraine, émeutes de la faim en particulier en Afrique, inflation donc baisse du niveau de vie, dettes et défauts de paiement perturbant le système financier, mobilisation guerrière derrière les américains contre la Chine, etc.

Qu’il ne faille pas espérer grand-chose de ces élections ne signifie pas qu’elles n’ont pas d’intérêt : d’une part, acquis de la démocratie, elles ont le mérite d’exister.  Ensuite elles révèlent, sur le smic, l’ISF, la réduction des impôts directs que ne payent que la moitié des français les plus riches, les primes et réductions de charges qui affaiblissent la protection sociale, les retraites, les postures à l’international etc. les positions de classe des partis au service des oligarques français. Ces élections, bien que non décisives, sont une des luttes politiques du moment. Elles devraient être une occasion entre autres d’unir les classes populaires qui sont divisées. L’occasion d’éclairer les travailleurs sur la situation de crise du système capitaliste dans son ensemble, des dangers que ça entraine, des écueils à éviter comme le nationalisme étatique et religieux, des difficultés à venir et de leur solution : passer à un système de mise en commun internationaliste des ressources. Les campagnes de gauche ne devraient pas laisser croire que quelques solutions techniques, augmentation de ceci, réduction de cela, changement de constitution, etc. seront à la hauteur des crises à venir. Ils ne devraient pas laisser croire qu’ils ont aujourd’hui LA solution.

Tout en relativisant l’impact des élections, un vote « à gauche » indique tout de même quelque chose de la maturité politique des classes populaires. Ça n’est que symbolique certes, mais on a quand même envie de marquer le coup !

S’abstenir, voter blanc, Poutou ou Mélenchon : On peut considérer qu’on s’abstient par solidarité avec la fraction de la classe ouvrière étrangère, à qui est dénié le droit de vote. Plus de 3 millions d’étrangers, pour la plupart ouvriers et employées ont plus de 18 ans, ce qui équivaut à 5% du corps électoral.  Ou on ne vote pas non plus par conviction partagée avec les 20% d’abstentionnistes, inscrits sur les listes électorales eux, constitués essentiellement des classes populaires dégoutées des expériences de « gauche de gouvernement ». Mais si on souhaite le droit de vote aussi pour les étrangers, ce qui serait un acquis démocratique, il serait paradoxal de ne pas l’utiliser. On peut alors voter blanc. Mais les abstentions volontaires et les votes blancs sont un peu noyés dans les positions sans convictions, surtout au premier tour.

Si voulant exprimer un vote on écarte les candidats de gauche « centristes » qui appelleront probablement à voter Macron au 2ème tour, il reste donc Poutou ou Mélenchon. Sans connaitre précisément son « programme », on pourrait voter Poutou dont l’ego parait plus « normal » que celui de Mélenchon. Surtout il n’a pas les mêmes faiblesses que Mélenchon à l’égard des religions (de l’islam en particulier sous prétexte d’antiracisme) et du nationalisme (défense de l’empire maritime français, glorification de la marseillaise et du drapeau tricolore des entreprises coloniales françaises, respect du système capitaliste corrigé à la marge etc.). Religions et nationalisme qui sont les deux grands dangers du moment. Mais si on souhaite qu’une voix de gauche soit portée, y compris au second tour, il est alors tentant de passer outre les réticences, de « voter utile » et de voter Mélenchon.

Espérer : Ces positions par défaut, abstention, vote blanc, vote symbolique pour Poutou ou Mélenchon, ne doivent pas désespérer. Si elles sont la conséquence de la situation politique du moment, les prévisions à 60/20/20 n’empêchent pas de repérer que sous les positions politiques dominantes de droite, le dépassement du système est irrépressible. Il l’est dans la politique du « quoiqu’il en coute » et des chèques envoyés à tous, même par Trump, pour lutter contre la pandémie : le système lui-même ne peut pas supporter le degré d’exploitation qu’il a imposé aux travailleurs. Il réalise que de trop bas revenus ne lui permettent pas de fonctionner. Dans tous les pays riches la part des dépenses publiques par rapport au PIB, n’a en fait jamais cessé d’augmenter malgré les contre-offensives réactionnaires, Reagan Thatcher Fillon etc. Ce sera encore plus vrai avec les dettes contractées pour limiter l’impact de la pandémie. Les républicains américains y voient un « socialisme rampant ». Ils ont raison.

Cette réalité en marche se reflète dans la campagne des présidentielles même dominée par la droite. Par exemple tous les candidats de droite annoncent des primes et réductions de charges sur les salaires : preuve que le système ne peut pas fonctionner avec des salaires si bas, il est obligé de les compenser. Bien sûr ça se fera plus tard au détriment des prestations sociales et des services publics. Ce qui annonce de nouvelles crises et de nouvelles luttes. Contradictions insolubles du système capitaliste, les solutions du jour sont les ferments des crises du lendemain. L’extrême droite est obligée de se vouloir démocrate : comparez avec le discours des ligues fascistes d’avant-guerre ! Marine Le Pen et Zemmour, divisés, dénoncent mutuellement les quelques pro nazis qu’ils cachent l’un et l’autre. Pour être audible Marine Le Pen s’attaque au pouvoir d’achat trop faible, aux inégalités, elle fait du social au point d’oublier parfois d’attaquer les immigrés. Il est vrai que les préoccupations des français ont changé rapidement : pouvoir d’achat, santé, environnement, guerre en Ukraine, ont remplacé l’immigration que l’extrême droite avait réussi un moment à placer parmi les premières préoccupations des gens. Quand il s’en prend aux réfugiés Ukrainiens Éric Zemmour est immédiatement isolé et perd des voix, alors même que la Pologne, son exemple favori, en accueille plus de 2 millions ! L’Allemagne, deux fois plus peuplée, était critiquée par les populistes en 2015. Elle en accueillait pourtant deux fois moins ! Le Pen et Zemmour à leur façon éduquent les gens : Donc l’immigration ce n’était pas si grave que ça ? Zemmour en critiquant l’Islam, mais en glorifiant l’église catholique, sans mettre en cause cette organisation qui a couvert le plus important réseau de pédophiles, en justifiant le judaïsme du nouvel apartheid que bâtit Israël, apparait incohérent mais contribue à révéler l’impact négatif des religions.

Les politiques de droite éduquent tout le monde en faisant des oligarques les vrais détenteurs du pouvoir. D’abord les russes bien sûr, car ils font partie du clan « d’en face », mais du coup les oligarques français ne passent pas non plus inaperçus.

Beaucoup de choses avancent sourdement dans le bon sens. Cependant le communisme ne s’imposera pas seulement de façon rampante.  Malheureusement l’apprentissage et la marche en avant se font souvent à travers des épreuves douloureuses pour les travailleurs.  La meilleure façon de réduire ces épreuves, est de proposer une voie consciente, solidaire, internationaliste, communiste, en la dégageant à la fois des erreurs des tentatives précédentes et de la propagande anti communiste des 1%. Réinventer le communisme. L’histoire n’avance pas de façon linéaire mais par à-coups, des gens xénophobes la veille se révèlent accueillants et généreux aujourd’hui. Face aux crises et aux difficultés les bonnes solutions, récusées encore quelques temps auparavant, deviennent brusquement évidentes pour tous, et les majorités nouvelles s’imposent alors plus rapidement qu’on ne s’y attend.      

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