Cher Ministre,
Merci d'œuvrer depuis si longtemps pour une école plus juste, en partenariat avec l'Institut Montaigne, Sens Commun ou encore l'Ifrap, dont on connaît tous l'attachement à un service public disqualifié.
Merci pour votre gestion exemplaire de la crise sanitaire dans les établissements scolaires.
Merci de n'avoir jamais envisagé la fermeture des écoles quelques heures avant l'annonce de leur fermeture.
Merci d'avoir été tout de même prêt pour cette fermeture mieux même que des pays qui l'avaient envisagé.
Merci d'avoir fourni aux médias des chiffres sur les enseignants "disparus" pendant le confinement.
Merci de soutenir les enseignants maltraités par les médias qui dénoncent leur lâcheté en promettant des sanctions contre les éventuels enseignants lâches.
Merci d'avoir laissé le choix aux familles quant au retour des enfants à l'école au mois de mai et d'avoir "en même temps" demandé à leurs voisins et leur famille de les inciter à remettre les enfants à l'école. Votre délégation de pouvoirs était si juste et limpide.
Merci de nous avoir fourni les masques en tissu et de nous avoir expliqué que si, en fait, ils sont efficaces.
Merci d'avoir promis, le 27 août sur France Inter, des masques transparents pour une partie des enseignants.
Merci de ne plus reparler de cette promesse car elle nous suffit pour nous sentir bien traités.
Merci de nous avoir expliqué que les enfants ne peuvent pas transmettre le virus pendant que ce nigaud de premier ministre déconseillait aux grands-parents de voir leurs petits-enfants.
Merci de nous promettre une enveloppe de 500 millions d'euros pour l'augmentation de nos salaires.
Merci de préciser quelques semaines plus tard qu'il s'agit d'une enveloppe de 350 à 400 millions d'euros.
Merci de préciser que cette enveloppe ne sera pas consacrée uniquement à l'augmentation des salaires.
Merci d'annoncer la création de 1248 nouveaux postes.
Merci de ne pas préciser s'il s'agit de postes de titulaires ou de contractuels car cela n'a aucune importance.
Merci de prôner la méritocratie qui fait endosser la responsabilité de l'échec aux seuls non méritants car notre institution ne peut rien pour ceux-là.
Merci de permettre aux écoles privées de bénéficier de quelques millions supplémentaires grâce à la loi sur la scolarité obligatoire dès trois ans.
Merci d'imposer une école basée sur les fondamentaux car une bonne partie du programme scolaire est en effet secondaire. La réalité étant qu'une bonne partie de nos élèves a vocation à rester en bas de l'échelle sociale, il n'y a aucune raison de gaspiller des moyens humains et matériels pour leur apprendre des choses qui ne leur seront d'aucune utilité. Ces connaissances superflues risqueraient même de mettre en danger notre république si ces connaissances venaient à éveiller chez eux une compréhension du monde réel, si cruel et pourtant si nécessaire à la croissance de notre PIB et à l'enrichissement de nos élites.
Merci d'imposer en ce sens des évaluations à l'utilité réelle incertaine mais avec une valeur certaine en tant que prétexte.
Merci d'ailleurs de nous avoir fourni des évaluations identiques à celles des années précédentes, si injustement critiquées.
Merci de sanctionner les enseignants qui désobéissent et ne font pas passer ces évaluations à leurs élèves sous prétexte qu'elles ne sont pas adaptées ou efficaces. Comme si tel était le but.
Merci de sanctionner les enseignants récalcitrants à vos sages réformes. La bienveillance, pour être efficace, ne doit bénéficier qu'à ceux qui appliquent sans rechigner vos recommandations pleines de bon sens.
Merci d'œuvrer pour le bien être des enseignants en approuvant la fin des commissions paritaires et donc l'exclusion des représentants des personnels des instances qui examinent la transparence et l'équité dans les opérations de mutations et de promotions.
Merci de ne pas vous insurger lorsque le premier ministre déclare que les enseignants ne servent pas à redresser le pays.
Merci pour l'ensemble de votre œuvre.
Merci pour votre reconnaissance et vos remerciements faits en cette journée mondiale des enseignants.
Merci enfin pour l'espoir que vous suscitez en évoquant votre volonté de privatiser "moderniser notre service public".
Pour une fois, nous ne doutons aucunement de la sincérité de vos paroles ni de votre conviction pour mener ce projet de "modernisation" à son terme, qui pourrait être également celui de l'école républicaine à laquelle encore trop de gens sont irraisonnablement attachés.