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Billet de blog 24 février 2013

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Pour une littérature-monde en Italie

L'Italie est en pleine ébullition. La saison présente des caractéristiques inouïes pour “les fidèles amis du livre”, en quête de situations inédites. Cette semaine, si Dieu le veut, le pape doit plier bagage, avant le week-end. Cette même semaine, au travers d'une fumée noire d'incertitude, le monde saura enfin le nom du candidat qui va remporter les élections.

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L'Italie est en pleine ébullition. La saison présente des caractéristiques inouïes pour “les fidèles amis du livre”, en quête de situations inédites. Cette semaine, si Dieu le veut, le pape doit plier bagage, avant le week-end. Cette même semaine, au travers d'une fumée noire d'incertitude, le monde saura enfin le nom du candidat qui va remporter les élections.

On dirait une semaine de fiction, fête/ faite pour les livres. À partir de ce lundi, toutes les rumeurs du monde vont prendre source en Italie. Des auteurs débarqueront bientôt aussi,  pour le festival de la Fiction française qui va démarrer à partir de 26 février et prendra fin le 9 mars. Au total, ils seront 18, éparpillés dans 14 villes, pour près de 45 rencontres. L'ouverture du festival est prévue ce mardi à 19 h au Palais Farnèse, avec une rencontre réunissant les écrivains Amin Maalouf et Michel Le Bris, autour du thème  "Littérature-Monde." Nous avons rencontré Julien Donadille, chargé du livre de L'Institut Français  en Italie, qui a eu la générosité de se prêter au jeu de nos questions.

 James Noël. – Pourquoi un Festival de la fiction française en Italie ?

Julien Donadille. – Par « fiction », nous entendons bien sûr roman, œuvre narrative. Le propos du festival est d'accueillir en Italie les romanciers de langue française qui ont une actualité en Italie : tous sont publiés par un éditeur italien dans les 6 mois qui précèdent le festival. Le programme est organisé en collaboration étroite avec les éditeurs italiens, notre mission étant évidemment de favoriser la diffusion la plus large possible de la littérature française actuelle.

L'Italie est un pays qui traduit beaucoup : 20 % des titres publiés en Italie sont issus de traductions, contre 15 % en France. Parmi ces traductions vers l'italien, 15 % viennent du français, contre 60 % pour l'anglais. Le français est donc la deuxième langue de traduction, mais loin derrière l'anglais. Si les éditeurs italiens publient beaucoup moins d'auteurs francophones que d'auteurs anglophones, c'est aussi parce qu'ils rencontrent de plus grandes difficultés à médiatiser ces auteurs, à obtenir des interviews, des recensions dans la presse, que pour les auteurs anglo-saxons. In fine, les ventes en librairies sont donc moindres. L'une des raisons identifiées de cette tendance, est que la littérature française contemporaine a du mal à se débarrasser, en Italie, d'une image à la fois très intellectuelle, formaliste et un peu « autocentrée ». Quelques succès récents, dont L’Élégance du hérisson en 2007, sont venus contredire cette image, toutefois, en dehors de rares figures bien connues, telles que Daniel Pennac et Fred Vargas, ou plus anciennes comme Georges Simenon et Irène Némirovsky, les auteurs de langue française restent peu connus du public italien.

À travers ce festival nous entendons donc renverser cette image en montrant qu'au delà de cette exigence formelle dont elle n'a pas à rougir, et de sa dimension intime, qui relève de prestigieux précurseurs, la littérature française contemporaine sait être aussi narrative – d'où ce terme de « fiction » pour la caractériser – aux prises avec le monde – qu'on songe au manifeste de 2007 « pour une littérature-monde en français » – avec l'histoire – le département d’Études françaises de l'université de Rome I « La Sapienza » prépare justement un colloque sur le roman français et l'histoire – et avec la société.

JN. – Parlez-nous un peu de ce programme...

JD. – J'ai évoqué le manifeste de 2007 pour une « littérature monde ». Ce sera justement le thème de notre conférence inaugurale, le 26 février, à l’ambassade de France à Rome (palais Farnèse), en présence de deux signataires du manifeste, et non des moindres, Michel Le Bris, fondateur d’Étonnants voyageurs, et Amin Maalouf. Cette conférence inaugurale donnera le ton d'un festival résolument tourné vers le monde justement : nous n'aurons pas moins de trois auteurs originaires du pourtour méditerranéen, qui, chacun à sa manière, nous parlent du devenir des pays de la région. Outre Amin Maalouf, nous recevrons ainsi Yasmina Khadra, à Rome et à Vérone, et Fouad Laroui, à Bologne, Pise et Rome. D'autres auteurs du programme se consacrent au rapport Nord-Sud, ou Orient-Occident : Mathieu Belezi, qui travaille sur la colonisation française en Algérie, Mathias Enard, arabisant, Jean-Christophe Rufin, grand connaisseur de l'Afrique. Témoin d'un autre continent, Dany Laferrière sera également du voyage.

La littérature de l'intime, caractéristique de la littérature française contemporaine, ne sera pas oubliée, qu'elle permette d'aborder des thématiques difficiles comme le viol, chez Philippe Djian, le suicide d'une enfant, chez Michèle Halberstadt ou l'accident grave d'une jeune fille, chez Hélène Lenoir ; ou bien des thématiques plus légères comme les souvenirs d'enfance chez Philippe Claudel, les relations familiales chez Caroline Lunoir, auteur d'un premier roman, les relations amoureuses chez Philippe Vilain. Mathieu Lindon, de son côté, revient sur sa relation avec le philosophe Michel Foucaut.

Certains de nos auteurs se consacrent à des périodes historiques proches – les années 80 pour Antoine Laurain – ou lointaines – le xve s. de Jacques Cœur pour Jean-Christophe Rufin.

Enfin, nous aurons également parmi nous un auteur pour la jeunesse, Timothée de Fombelle et l'auteur d'un surprenant roman d'anticipation, Stéphanie Hochet.

Au total, 18 auteurs, dans 14 villes, pour près de 45 rencontres.

JN. – Et comment réagit le public italien ?

JD. – De manière générale, il y a toujours une grande curiosité en Italie pour ce qui vient de la France, et notamment pour le savoir-faire français en matière d'action culturelle. Cet intérêt ancien rencontre aujourd’hui un débat très actuel en Italie, notamment dans le contexte de crise économique que traverse le pays, sur la manière de mieux valoriser la culture et le patrimoine italiens, qui sont l'une des toutes premières richesses du pays, et une source de revenus potentiels sous-exploitée. Ce que nous constatons, c'est qu'à ce jour, nous sommes plutôt bien suivis par la presse italienne, et que les articles qui ont pu sortir ont créé du désir chez les gens : la soirée d'ouverture, notamment, se jouera à guichets fermés. Reste à savoir si cet engouement se traduira par des ventes plus nombreuses en librairie. Nous y travaillons, notamment à travers le partenariat que nous avons pu établir avec les librairies Feltrinelli. Ce que nous cherchons à créer, c'est tout simplement un cercle vertueux : la couverture du festival par la presse favorisant le succès commercial, le succès commercial incitant les éditeurs à publier plus d'auteurs français, et les plus nombreuses publications entraînant une revalorisation de l'image de la littérature de langue française en Italie. Bien sûr, il s'agit là d'un travail de longue haleine.

Le Festival de la fiction française est organisé par l'Institut français en Italie (ambassade de France en Italie) du 26 février au 9 mars 2013 dans toute la Péninsule, et jusqu'en Sicile, avec le soutien de la fondation Nuovi Mecenati, de l'Institut français, et des compagnies Air France et Italo. Renseignements sur www.institutfrancais-italia.com.

Pour plus d'infos, cliquez ici:

http://www.facebook.com/festival.narrativa.francese?fref=ts

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