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Billet de blog 25 janvier 2012

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La radicalité concrète

Alors voilà, parce qu'il arrive toujours un moment où il faut se décider, choisir son camp et mouiller la chemise, je me suis mis à militer avec le Front de Gauche et je me suis décidé à prendre ma carte à la CGT.Et puis, parce que je ne suis pas un mouton qui exécute bêtement des consignes venues d'en haut, j'ai capté dans les messages de notre candidat aux élections présidentielles, l'apparition récurrente de l'expression : « radicalité concrète ». Cela semble capital pour Jean Luc Mélenchon que ce concept de « radicalité concrète » et comme j'ai un faible pour les concepts et l'activité intellectuelle, je m'y suis un peu intéressé.

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Alors voilà, parce qu'il arrive toujours un moment où il faut se décider, choisir son camp et mouiller la chemise, je me suis mis à militer avec le Front de Gauche et je me suis décidé à prendre ma carte à la CGT.

Et puis, parce que je ne suis pas un mouton qui exécute bêtement des consignes venues d'en haut, j'ai capté dans les messages de notre candidat aux élections présidentielles, l'apparition récurrente de l'expression : « radicalité concrète ». Cela semble capital pour Jean Luc Mélenchon que ce concept de « radicalité concrète » et comme j'ai un faible pour les concepts et l'activité intellectuelle, je m'y suis un peu intéressé.

Qu'est-ce que c'est donc que la « radicalité concrète » ? Rassurez-vous, je ne vais pas vous faire un exposé, une thèse ou un je ne sais quel discours normatif et normalisant autour de ce concept. Je vais simplement vous dire où et à quoi il fait écho chez moi et ce que j'ai pu trouver en quelques minutes sur internet à ce sujet.

D'abord il y a le mot de « radicalité ».

Dans le Wiktionnaire j'ai trouvé cette définition un rien difficile :

radicalité critique et analyse de la situation concrète, sans idéaliser la puissance d'une contreviolence révolutionnaire qui peut se révéler contreproductive, sans se faire non plus des illusions sur la bonne volonté des castes dirigeantes.

Elle vient d'un article paru dans l'Humanité. Sans doute un lecteur qui l'a mise dans l'article du Wiktionnaire.

J'en retiens pour ma part cette idée que l'on ne néglige absolument pas, dans cette radicalité de nature politique, que les « castes dirigeantes », le pouvoir, ne va pas se laisser faire et que ça va chauffer. La radicalité est donc ici une position prise, un parti pris de la réalité économique, sociale et politique qui est fondée sur une observation objective de la réalité concrète, une observation du terrain et une analyse de la situation concrète.

La lecture de l'article du CNRTL (Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales) nous indique que la notion de radicalité implique que l'on tirera, sans concession ni exception, tous les enseignements de l'expérience. Autrement dit que, repoussant les illusions, les faux semblants et les apriori sur une question, la radicalité identifie les causes profondes (la racine) des phénomènes et en tire jusqu'au bout les conséquences qui en découlent en terme non seulement de raisonnement mais aussi d'action sur la réalité observée.

En tant que soignant et que formateur en soins infirmiers je connais donc déjà une radicalité concrète, c'est celle dont fait en principe preuve une équipe de soin devant une personne présentant des problèmes de santé. Le raisonnement clinique est une radicalité concrète. Mais bon, ne brûlons pas tout nos vaisseaux trop vite.

Ici, cette radicalité est en plus gratifiée d'un qualificatif. Elle est concrète. Qu'est-ce à dire ?

Sur un plan politique la radicalité c'est ne céder sur rien. C'est un slogan du Front de Gauche : « Ne cédez pas ! » lance et répète JLM lors des meetings. Ne pas céder cela signifie pour moi qu'il ne peut pas y avoir de concessions face à la réalité à laquelle sont confronté les gens et notamment les travailleurs dans les entreprises. Le front de la radicalité concrète se trouve dans les entreprises, sur les lieux même de l'exploitation capitaliste du travail humain. La réalité ne peut pas être atténuée ni arrangée : elle est ! L'analyse radicale de la réalité sur le terrain condamne la gestion capitaliste et financière actuelle dans son entièreté. La conséquence incontournable et qui ne supporte pas d'être négociée se décline en actions concrètes que l'on va regrouper sous le nom de Révolution citoyenne.

Dans les meetings encore, dans la presse et partout où cela est possible, le Front de Gauche appelle à la lutte syndicale. Il se prononce radicalement pour un engagement militant de chaque homme et de chaque femme. Autrement dit, être dans la radicalité concrète, « c’est dire avec précision, techniquement et clairement comment on peut passer du stade des grandes idées et des grandes déclarations abstraites aux décisions de détails qui les rendent concrètes pour être à même de défendre de façon plus efficace les intérêts collectifs et individuels … et être en mesure de le faire dans la réalité du quotidien !

C’est être immédiatement disponible pour l’action et non essayer en permanence de s’en défausser sur d’autres. C’est une (r)évolution des mentalités contre l’apathie. C’est l’affaire de chacun et cela ne souffre aucun délai »1.

« On ne lutte pas contre le monde de la finance avec un pistolet à bouchon » déclare JLM au meeting de Besançon, appelant François Hollande à décliner précisément, en terme d'actions concrètes et immédiates, sa déclaration d'intention lors de son meeting d'entrée en campagne. Déclarer le monde de la finance comme l'adversaire, c'est bien, mais il ne faut pas en rester au stade des belles intentions et énoncer des mesures concrètes immédiates pour dégommer l'adversaire.

Enfin, la radicalité concrète, c'est démontrer par l'analyse radicale de la situation et par les faits réels la capacité de l'organisation politique et citoyenne à gouverner le pays. C'est, contre la rationalité mortifère du capitalisme érigée en dogme néolibéral et en pensée unique, mettre en œuvre dans la lutte quotidienne une rationalité basée sur un autre engagement, un autre contrat social (JLM aime bien Rousseau!), celui de l'Humain d' abord. C'est démontrer, arguments concrets à l'appui, que les thèses et les propositions ne sont pas des délires d'extrémistes farfelus mais un dispositif réfléchi et calculé comme l'est la planification écologique par exemple, qui est déclinée dans des propositions générales certes mais qui doit être déclinée aussi localement.

C'est aussi montrer et mettre en évidence la réalité concrète de la révolution citoyenne qui sera une lutte difficile contre l'oppression, le pouvoir de la finance et les grands capitalistes qui ne se laisseront pas prendre sans combattre ce qu'ils ont amassé de richesses indues. C'est le volet de l'action, potentiellement dure, qui appelle à la mobilisation générale des citoyens comme en temps de guerre. C'est, il me semble, la raison de l'accent « martial » de JLM lors des meetings qui n'aura pas échappé aux endormis de la pensée molle auxquels cela fait peur. Il n'invite pas les français à une garden partie mais à prendre le pouvoir partout où ils sont. On revient ici à la radicalité politique qui est de ne rien céder. Le Front de Gauche appelle chacun à faire la révolution dans sa tête et dans son cœur, à redresser son échine courbée. Il donne les moyens à chacun de prendre conscience que c'est possible, réaliste et urgent.

Voilà donc comment j'explique ce concept mélenchonnien de radicalité concrète. Il fait écho chez moi avec le concept de raisonnement clinique que nous utilisons en soins infirmiers pour décliner les problèmes de santé d'une personne et en faire l'analyse à partir de ce que nous appelons les indices et qui sont les manifestations concrètes de phénomènes physiologiques ou psychologiques qui se déroulent du côté de la personne soignée. Bien entendu, c'est de la finesse clinique de l'analyse de l'ensemble des données et de la pertinence du recueil de données que vont découler une série d'actions adaptées à la situation. Sur le plan politique c'est donc aux citoyens et à leurs organisations politiques et syndicales qu'il est fait appel pour procéder de façon continue à ce recueil de données objectives. Cela relègue à une position au moins subalterne la fonction si valorisée aujourd'hui, des experts (vous savez, ceux qui se trompent tout le temps). Les véritables experts sont ceux qui se coltinent avec la réalité concrète au quotidien, comme les soignants dans un service de chirurgie.

1http://lapeldelafournaise.centerblog.net/3-de-la-radicalite-concrete-et-de-la-citoyennete-syndicale

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