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Billet de blog 12 novembre 2018

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EUROPÉENNES , QUEL VOTE POUR QUELS ENJEUX ? (1/2)

L'Union Européenne est en perte de vitesse : le premier symptôme en est le désintérêt des électeurs de tous pays pour l'élection des députés au Parlement de Strasbourg laquelle provoque les taux d'abstention les plus élevés de notre système démocratique. Ce qui montre au mieux l'indifférence, au pire la méfiance grandissante de la population pour ces institutions.

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Mais il y a un autre symptôme :

                                Le repli nationaliste

    On le voit à l'oeuvre au Royaume-Uni avec le « Brexit » qui sonne le départ d'une Angleterre pour qui cette UE n'a, depuis Thatcher, jamais été autre chose qu'une zone de libre-échange dont il fallait tirer le maximum de bénéfices sans contrepartie (le fameux « I want my money back »). Il faut dire que les instances européennes, et en particulier la commission de Bruxelles, sont complaisamment rentrées dans son jeu, tout à leur promotion de la « concurrence libre et non faussée » qui est l'alpha et l'oméga des technocrates bruxellois.

    A l'oeuvre également avec ces partis « xénophobes » (en termes clairs, racistes) solidement implantés en Pologne, en Hongrie et dans bon nombre de pays, jusqu'en Italie. Eux aussi, suivant l'exemple britannique ne retiennent de l'UE que ce qui les intéressent, subventions, délocalisations à leur profit, tout en refusant les obligations et règles communes. Et là aussi, l'UE laisse faire comme en témoigne ses réactions plus que molles face aux dénis de démocratie perpétrés par Orban ou Kaczynski, à comparer avec leur vigueur et leur rapidité face au risque d'un ministre italien anti-euro.

                            Les causes de la poussée xénophobe 

    Mais d'où vient que cette poussée xénophobe se répande dans tous les pays y compris ceux, comme l'Allemagne, qui sont censés être les grands gagnants de la construction européenne ? Eh bien du fait que que ses bénéfices ne profitent qu'à une partie de leurs population. Le « modèle » allemand et son quasi « plein-emploi » (les 2 millions de chômeurs allemands seront sûrement d'accord avec les guillemets) a surtout consisté à transformer les chômeurs en travailleurs pauvres. Leurs salaires sont si bas que leur niveau de vie est encore plus faible que celui de nos demandeurs d'emploi. Malgré le fossé que la politique macroniste ne cesse d'élargir entre les « 1ers de cordées » et les « riens », le taux de pauvreté en Allemagne reste supérieur d'un quart à celui de la France.

Or le premier réflexe face à l'injustice et au déclassement est de chercher un responsable, voir un bouc émissaire. Et c'est là que l'extrême droite entre en scène pour désigner, à l'aide d'arguments simplistes mais frappants, le migrant et l'étranger comme responsables de tous nos maux. Cette extrême-droite trouve d'ailleurs un renfort de poids, voir une légitimation, dans les discours que tiennent tous ces hommes politiques spécialistes de la dénonciation de « l'assistanat », ces experts auto-proclamés et autres médiacrates, payés 15000€ par mois pour seriner à des gens qui en gagnent 1200 que leurs problèmes viennent de ceux qui en touchent 600.

                         Le mirage du populisme d'extrême-droite

    Et pourtant, il faut le dire et le redire à tous ceux qui se laisseraient tenter par le chant de ces sirènes venimeuses, il n'y a aucune amélioration à attendre pour les victimes de la politique néo-libérale de l'éventuelle arrivée du FN (même rebaptisé RN) au pouvoir. L'extrême-droite n'a, pas plus en France que dans les pays où elle est arrivée aux affaires, l'intention de s'en prendre au système d'exploitation actuel. Il n'est que de voir le nombre de patrons d'entreprises petites ou grandes qui la soutiennent pour se rendre compte que l'amélioration du sort des plus démunis (qu'ils soient ou non français « de souche ») est le cadet de ses soucis. Si d'ailleurs l'UE n'est ferme qu'en paroles mais jamais en acte avec les pays dirigés par l'extrême-droite, c'est que pour elle l'essentiel, c'est à dire son modèle économique, est sauf et qu'en regard elle considère les entorses à la démocratie comme secondaires.

                      Le jeu dangereux de l'UE et de Macron

    Face à cette montée de l'extrême droite, les principaux dirigeants de l'UE jouent un rôle particulièrement trouble. Ils en profitent pour se présenter comme le seul rempart contre ces ennemis de la démocratie alors que d'une part, c'est la politique économique de l'UE qui favorise cette montée et que d'autre part, sa propre légitimité démocratique est fortement sujette à caution. Outre le fait que parmi les multiples instances européennes (commission, conseil de l'Europe, conseil des ministres) seul le parlement soit élu, les sorties d'un Juncker au moment de la crise grecque affirmant que le vote des peuples n'était rien devant l'obéissance aux règles européennes, les tentatives de faire adopter par tous les moyens la constitution européenne puis, devant l'échec, le recours au traité de Lisbonne pour l'inscrire quand même dans les faits, montrent bien que l'UE n'accepte la démocratie que tant qu'elle va dans le sens qu'elle souhaite.

    Macron s'est bien sûr engouffré dans cette voie en se présentant comme l'anti Orban alors qu'il mène des politiques analogues que ce soit au sujet des réfugiés ou de la liberté d'expression. Pour la première, elle a permis à Salvini de pointer avec raison l'hypocrisie de Macron. La deuxième a été mise en œuvre avec la répression des manifestations du printemps ou avec ces lois prétendument contre les « fake news » permettant en fait de museler les médias en période électorale. Étrange façon de lutter contre l'extrême droite que d'appliquer sa politique…

    Pourquoi donc ce jeu dangereux ? Pour tenter d'enfermer le débat dans un choix exclusivement binaire, le (néo-)libéralisme ou la dictature (rebaptisée illibéralisme dans une nov-langue que n'aurait pas renié Orwell) et de faire disparaître toute alternative. Choix fictif car sans une politique radicalement différente, c'est la deuxième option qui va de toute façon finir par s'imposer partout comme le montrent les exemples italien, hongrois, polonais etc.

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