Modèle Allemand ou déflation salariale?
Jean Marc Ayrault dés septembre 2012 annonçait que le gouvernement français ferait mieux et plus vite les contre réformes du marché du travail que Gerhard Schroeder /P. Hartz.
Deux ans et demi ont passé, force est de reconnaître que F. Hollande et son premier ministre accélèrent avec E Macron à Bercy..
E.Macron recruté par F. Hollande pour le poste sensible de secrétaire général adjoint de l'Elysée, est devenu ministre, d'inspirateur de la politique social libérale , il en est devenu l'ordonnateur.
Le marché du travail comparaison France Allemagne:
le marché du travail se décline en 6 chiffres: octobre2014 source INSEE et Bundesagentur für Arbeit
tableau 1tableau 1
Si nous comparons le niveau d'emploi réel, à temps plein, nous nous apercevons que la différence entre le modèle allemand et le modèle français avant lois Macron, est minime , la différence est de 2,5% soit 707 000 emplois! Il faut noter que la population active employé à temps plein n'est que de 54% seulement de la population active . En revanche il y a eu une explosion du salariat précaire et pauvre depuis 2005.
le volume d'heures travaillées:
tableau 2 heures travaillées annuellement en Allemagne et France
Nous constatons que le volume d'heures travaillées par an en Allemagne est stable depuis 2000 , alors même que le nombre personnes en âge de travailler a augmenté de 13% soit de 5 millions .
la durée du travail
tableau 3 :heures travaillées annuellement par salarié
Si l'on observe l'évolution de la durée du travail: la durée du travail a baissé de 6% (85 heures) entre 2000 et 2014.
En France la durée du travail qui est de 35 heures, la durée effective a baissé de 6,4% , mais reste supérieur à la durée allemande de 101 heures ! alors même que la durée légale du travail est de 40 heures en Allemagne (à l'exception de la métallurgie passée à 35h dés 1995).
La contre réforme du marché du travail Schroeder Hartz n'a pas pour but de faire baisser le taux de chômage réel , mais de baisser les salaires en réduisant l'indemnisation du chômage drastiquement (durée de d'indemnisation réduite de 32 mois à 12 mois). Là le succès est avéré. Cela a conduit à une modération salariale (blocage des salaires pendant 10 ans). Mais surtout à L'apparition d'une nouvelle catégorie: le salariat précaire, qui représente en Allemagne 11,1 millions de salariés soit 25,2% des salariés, dont les deux tiers sont des salariés pauvres (16,2%)! En France 28,2 % des emplois sont précaire et ou à temps partiel.
la raison fondamentale des contre réformes du marché du travail, n'a pas pour but de créer des emplois, le volume de travail reste stable, alors même que la population active s'accroit!
Les contre réformes du marché du travail ont pour but un partage du travail contraint. Ce fait prouve bien que la seule voie pour retrouver le plein emploi passe par la réduction du temps de travail comme le demande Pierre Larrouturou , et de nombreux économistes hétérodoxes.
Ce partage se fait en facilitant par les licenciements des emplois en CDI, rémunérés normalement.
Une fois passé par la case chômage, le salarié se voit contraint d'accepter un emploi à temps partiel et sous payé.
Pire ce salariat précaire est institutionnalisé par la loi et les aides versées par l'état : Revenu minimum.
En Allemagne 25% des salariés sont dans cette situation aprés 10 ans de réformes du marché du travail.
D'autre part le passage d'un emploi CDI à la précarité s'accompagne par une perte de cotisations retraites, qui conduit de facto à une baisse de la retraite telle que de nombreux salariés tombés dans le salariat précaire se voient contraint de travailler au delà de l'âge limite (67 ans en Allemagne) pour pouvoir vivre dignement! Ils n'auront jamais la retraite à taux plein! D'autre part les caisses de retraite et la sécurité sociale ont moins de rentrée, en raison des exonérations de cotisations.
Lois Macron et déflation salariale:
En France avant les contre réforme (ANI) et lois Macron, 28 % des salariés sont déjà précaires. Doit on augmenter le nombre de salariés précaires pour faire baisser le coût du travail. Faire baisser le coût du travail débouche sur le salariat précaire et le salariat pauvre. C'est le retour au XIX° siècle.
Pour ceux qui douteraient de la ressemblance entre les lois Shroeder Hartz et Ayrault (Ani)/ Macron, soulignons leur intitulé similaire accord national interprofessionnel (ANI) sur la compétitivité et la sécurisation de l'emploi.
En fait de sécurisation, ces lois ont pour but de faciliter les licenciements, elle sécurise l'employeur, qui peut licencier quand et comme bon lui semble.
Les conséquences de ces lois sont graves en termes de dignité et de respect , les salariés pauvres vivent au dessous du seuil de pauvreté bien qu'exerçant une activité, qui plus est subventionnée par l'état.
Cela révèle le vrai visage d' un capitalisme autoritaire et signifie la mort programmée de l'état social. Pour la bonne et simple raison, que le système de protection social n'est viable à terme qu'avec le plein emploi. Lorsqu'il y a de moins en moins de salarié est employé à plein temps, tout le système est menacé.
La démocratie, l'égalité des citoyens devant la loi, l'égalité des droits pour les salariés sont bafouées par l'état lui-même. La démocratie laisse progressivement la place à un société conforme au marché, mais pas du tout avec la dignité humaine.
Ces contre réformes en France comme en Allemagne ne respecte pas la constitution de nos pays. Elle créent de facto deux catégories de citoyens ceux qui disposent d'un travail et ceux qui n'ont que des petits boulots leur permettant de survivre.
La prochaine étape est déjà annoncée par des experts comme le Nobel de l'économie Jean Tirol et son contrat unique, au nom bien entendu de l'équité, il considère qu'il n'est pas acceptable que des salariés bénéficient de privilèges, le statut de salarié en contrat à durée indéterminé! Ces privilèges seraient bien entendu un obstacle pour les entreprises, qui seraient évidemment prêtes à embaucher, si le contrat de travail était plus flexible!
Jean Tirol n'a pas peur ni des mots ni des paradoxes: ce qu'il définit comme privilège, le droit du travail est le résultat de plus d'un siècle de conquêtes sociales, durement conquises au prix parfois du sang! Par ailleurs rappelons que la loi est faite pour protéger les plus faibles et non les dominants. que le salarié par définition est en position d'infériorité par rapport à l'entrepreneur.
Enfin est- il équitable de détruire le CDI qui concerne encore les trois quarts des salariés, au prétexte qu'un quart a été contraint à la précarité par les contre réformes du marché du travail, au nom de quelle équité les 3/4 des salariés devraient ils renoncer aux CDI?
Pourquoi cet éminent économiste n'envisage-t-il pas au contraire la transformation des CDD en CDI?
Pourquoi faut il toujours harmoniser par le bas?
Pour mémoire rappelons que le droit du travail prévoyait l'harmonisation par le haut, avant les contre réformes, avant l'inversion de la hiérarchie des normes sociales, accélérée par l'ANI et achevée avec les lois Macron.
Poser cette question montre à quelle point les élites dominantes ne se préoccupent ni de l'emploi, ni de la dignité humaine ,ni de l'avenir du pays et de sa jeunesse, mais seulement de démonter l'état social pour faire baisser les salaires et satisfaire les actionnaires et les dirigeants actionnaires. C'est la déflation salariale au nom de la loi du plus fort, voté par les représentants du peuple! Cela permet de transférer avec l'aide de l'état (40 milliards du CICE) et une partie croissante des salaires vers les profits!
Faut il de plus remercier la sociale démocratie européenne et française pour s'être mise aux services des oligopoles bancaires, industriel et de services.