Le ministre Attal aime bien qualifier l'École laïque de la République de "sanctuaire". Il est trop facile d'ironiser sur l'emploi d'un mot à signification religieuse pour parler de l'École dont on veut protéger le caractère laïque. Relevons plutôt la politique de Gribouille que lui et le Président ont lancée en cette rentrée.
"Sanctuaire": lieu saint, enceinte sacrée, vouée à des cérémonies de culte (adoration, proclamation de la gloire, reconnaissance), où sont déposés objets et livres sacrés.
Gabriel Attal et tous ceux qui comme lui ont recours à ce mot pour qualifier l'École ne savent sans doute pas ce qu'ils disent. Être de cela il ne leur sera cependant pas pardonné, car cela signifie qu'ils ont tout bêtement repris "un élément de langage". "On" leur a dit que "sanctuaire" ça fait sérieux, et que personne n'osera dire le contraire, comme ouvrons l'École en grand aux influences du monde profane et prosaïque, aux sollicitations éhontées du commerce et de la consommation, à la propagande politique et au prosélytisme religieux. L'École est comme le "temple" de la Raison, du Savoir. Quant à ceux qui pensent vite (les "fast thinkers" déjà brocardés par Bourdieu) ils ajoutent une référence révérencieuse aux Lumières. C'est étrange, on pensait qu'on va à l'École non pour adorer ou croire et que les Lumières sont l'École du jugement de toutes choses.
L'ennui c'est qu'en disant, ils font des choses. Ils provoquent une situation, comme il est de règle en politique. Et celle que les déclarations sur les abayas ont créée à l'École est exactement contraire au fait de la considérer comme un sanctuaire. Les élèves, les professeurs dûment chapitrés par l'administration, n'ont qu'une chose en tête, abaya-laïcité-islamisme... Autrement dit ils ont réussi à faire entrer dans ce lieu censé protégé des tumultes de la société civile, politique, économique, les querelles des adultes. Et ils l'ont fait en ayant recours à un mensonge ou une ignorance: non l'abaya n'est pas une obligation religieuse. Ils le font en identifiant laïcité et discrimination dirigée contre les musulmanes et les musulmans. Ils le font en rendant impossible un cours ultérieur qu'un professeur donnera sur la laïcité, puisque cette polémique a, une fois de plus, dénaturé la laïcité et l'a rendue pour une partie des élèves détestable.
Pour se protéger de la pluie Gribouille se mettait à l'abri de l'eau dans la rivière. Nos dirigeants pour protéger l'École l'ont exposée au pire de la politique, pour protéger son caractère laïque ils en font l'objet d'une croisade.