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Billet de blog 22 mars 2024

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Reconnaissance de l'État palestinien par la France, maintenant

Faisons une pause dans les polémiques sur le 7 octobre et la destruction de Gaza. Face à la paralysie du Conseil de sécurité, en parallèle avec les efforts pour apporter de l'aide aux habitants de Gaza, demandons à notre gouvernement de rejoindre l'Espagne, l'Irlande, Malte et la Slovénie dans leur reconnaissance de l'État palestinien.

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Faisons une pause dans les polémiques sur le 7 octobre et la destruction de Gaza. Terrorisme, résistance, vengeance, génocide, démocide, antisémitisme, racisme anti palestinien, impuissance et hypocrisie des États-Unis, de l'Union européenne, de la France, un ou deux États, intégrer ou non le Hamas dans les négociations à venir avec l'OLP, soutenir l'option Marwan Marghouti, les sujets ne manquent pas. Ces polémiques sont nécessaires, elles aident à comprendre ce qui arrive aux Israéliens et aux Palestiniens et à imaginer l'issue de cette tragédie. Mais face à la paralysie du Conseil de sécurité, en parallèle avec les efforts pour apporter de l'aide aux habitants de Gaza, les sociétés civiles peuvent agir en faisant pression sur l'opinion et sur leur gouvernement. C'est le moment de demander à notre gouvernement de rejoindre l'Espagne, l'Irlande, Malte et la Slovénie dans leur reconnaissance de l'État palestinien.

La dissymétrie entre les Palestiniens et Israël, l'inégalité de poids dans les "agendas" diplomatiques — y compris dans les pays arabes —, l'écrasante supériorité militaire et médiatique d'Israël par rapport aux Palestiniens des territoires occupés de Cisjordanie, de Gaza et de l'Autorité palestinienne conduit à noyer les Palestiniens dans un magma de populations, de réfugiés, de réprimés, emprisonnés, soumis à une nouvelle catastrophe, une Nakba où les descendants de celle de 1948 la répètent du nord au sud de Gaza, coincés autour de Rafah. Tout l'effort de Netanyahu et de ses ministres d'extrême-droite est de supprimer toute possibilité de parler d'un PEUPLE Palestinien. Matériellement et symboliquement la guerre contre les Gazaouis, la destruction de toute infrastructure ont pour résultat de réduire ce peuple à une masse d'individus dépossédés de leur mémoire et de leurs efforts pour exister, masse d'individus qu'on pourra manipuler selon les projets des dirigeants israéliens d'en finir avec un peuple qui réclame, comme tout peuple, son autodétermination, son droit à se donner une forme juridico-politique, dans un territoire viable, restitué dans les règles de justice de l'ONU. La question des colonies ne cesse de se poser et reposer: le ministre Smotrich qui fait partie de ceux qui nient l'existence d'un peuple palestinien, vient  d'annoncer "la déclaration d'environ 8.000 dounams (800 hectares) comme terres domaniales (de l'État d'Israël) dans la vallée du Jourdain", selon un communiqué de ses services, cela au moment où Antony Blinken est en Israël pour "discuter" des projets d'opérations dans Rafah. 

Déclarer la reconnaissance de l'État palestinien serait un acte à signification politique considérable. Ce serait insérer dans les règlements, discussions, hypothèses sur l'après-Gaza les Palestiniens comme puissance d'autodétermination; ce serait accélérer le remplacement de Mahmoud Abbas par un leader reconnu et d'unité; ce serait contribuer à sortir les  Palestiniens sous les bombes, mourant de faim, cibles des colons et de l'armée, de leur déréliction; ce serait indiquer aux responsables israéliens que de plus en plus d'États marquent fortement une limite à leurs projets: il faudra tenir compte d'un peuple palestinien représenté par un État, il sera interdit de refuser aux Palestiniens ce qu'on accorde à tout peuple, dont celui d'Israël. Il ne nous revient pas de dire comment les Palestiniens vont établir cet État. Mais on peut raisonnablement attendre de ces quelques États qui reconnaîtront cet État qu'ils contribuent à sa réalisation. 

Enfin, si la France reconnaissait l'État palestinien, cela voudrait dire que le Président Macron qui à plusieurs reprises a affiché son amitié avec Benjamin Netanyahu, lui signifie que maintenant les temps vont changer et que l'impunité automatique, prix de la politique du fait accompli, d'Israël est terminée et que ce pays, cet État doit être traité comme les autres.

Des élections vont se tenir, c'est l'occasion de s'adresser aux candidats pour qu'ils défendent cette idée de reconnaissance devant le gouvernement français.

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