Le 13 avril de l'an III Après l'avènement de Zeus ( Jupiter n'avait pas encore été inventé ), un aréopage de scientifiques consulta l'oracle Si-Bête, récemment élevée au rang de Miss Lubrizol. Si l'on en croit les écrits du scribe Marcel Ophuls, le chagrin de la Pythie parut bien faible à l'énoncé du sort du peuple que le tyran fit enfermer pendant de trop longues décades dans la caverne, à la suite d'une vision qu'il avait eue. Après avoir observé les entrailles d'une vingtaine de milliers de vies sacrifiées au culte du covid-19 sur l'autel de Mercure, dieu du commerce et secondairement de la médecine, Si-Bete annonça que le jour du 11 mai présentait les auspices les plus favorables à la réouverture de l'agora. Cette date propice à la célébration du culte des dieux des week-ends prolongés, fut acceptée faute de mieux, par les dieux lards du ramadan. Si-Bête recommanda aux membres du Conseil de rester sourds aux six reines d'un Esculape de Massalia qui prétendait avoir obtenu des guérisons grâce à un onguent trouvé dans l'isthme de la Palud. Elle termina par ce conseil aux gaulois (n'allez pas pinailler pour quelques siècles ) : abstenez-vous de porter un masque, votre maladresse et votre intelligence limitée le rendrait inefficace voire pire. Ayez foi en Zeus, conclut-elle, c'est votre meilleure protection.
A son retour d'une visite aux andouilles des ronds points de la ville de Troie, ainsi qu'il en appelait les citoyens, Zeus réunit l'Assemblée pour l'informer que le pays était à deux doigts de connaître de graves troubles. Il céda ensuite la parole au nain Castagneur qui demanda que les pleins pouvoirs soient votés pour que le tyran empêche les esclaves des quartiers périphériques de piller les entrepôts et de fomenter une révolte qui balaierait tout sur son passage puisqu'ils ont le nombre pour eux. Chacun loua Zeus d'avoir pris la précaution de faire livrer des armes plutôt que du pharmakon afin de mater une possible rébellion. Des esprits s'échauffèrent à propos du vote des articles de loi jugée liberticide et inefficace (voir document ci-dessous ) et Zeus dut mettre fin à une querelle entre trois représentants du peuple qu'il apostropha ainsi : " une guerre des trois ne doit pas avoir lieu, faute de quoi, on en entendrait parler des siècles plus tard" . Pour pallier le manque de protections et pour jouir d'un calme relatif, il fut décidé de prolonger l'enfermer de la population à son domicile. Pour son bien, sera-t-il précisé. Beaucoup plus tard, des historiens baptiseront cet emprisonnement sanitaire d'un terme plus acceptable, celui de confinement.
Relevé de décisions appelé P.V. en Apocope (3 ).
Article I : il est interdit aux virus de s'attaquer aux enfants de moins de onze ans et aux pédagogues qui les encadrent.
Article II : Préfet Grobras Legrec a ordre de foudroyer les virus qui ne respecteraient pas l'interdiction mentionnée article I les enfants de moins de onze ans sont dispensés du port du masque à moins qu'on puisse les agrafer sur les oreilles.
Article III : dans les gynécées et les lycées, on dessinera des gueules de requins et des têtes de Chimères sur les masques en tissu afin qu'à leur vue, les virus détalent, prenant le génome à leur cou.
Article IV : Zeus autorise son parrain Merdef à vendre les masques de la discorde au prix qui lui conviendra.
Article V : la Vénus de Milo est autorisée à se frotter les mains devant les profits espérés.
Article VI : la Vénus de Milo est autorisée à ne pas éternuer dans son coude.
Article VI : Les citoyens devront élever des puces, un animal domestique de la famille des mouchards. Reliés en permanence à l'Olympe, les malades et les asociaux seront précipités du haut du mont Tartare pour servir de viande froide hachée menu.
Article VII : Achille, Ulysse, les argonautes et tous ceux qui rentrent de provinces lointaines et barbares, devront subir une quarantaine et passer par un S.A.S. de décontamination, le "S.A.S. à Athènes".
Aprs l'approbation, Zeus congédia l'Assemblée pour écrire un recit inspiré par la dispute entre les trois représentants qu'il nommera "la nuit des trois" et qui relatera l'épopée de ces combats livrés à visage découvert (le chevaleresque porté à son paroxysme) contre un virus fourbe. Anecdote peu connue, manquant de tenue, un certain monsieur William, s'en attribuera la paternité, se contentant d'en modifier le titre en " nuit des rois".
(1) emprunté à un article d'A. Viala paru dans le Monde « Le macronisme ou le spectre de l’épistocratie »
(2) voir l'expression "sur les hauteurs de l'Apocope"