un drone de Noël - reportage puis mon sapin

Vingt cinq décembre, huit heures du matin, à peine réveillé, je suis debout. Chaussons, pyjama, la raie mouillée, me voici déguisé en gentil petit enfant à qui même le père Noël ne ferait pas avouer qu'il attend un cadeau et pas n'importe lequel, un drone. Le jour censé être celui de la paix, une arme de guerre, offerte en cadeau à un gosse ... ça dérange quelqu'un  ? Mon père arrive barbe blanche et robe de chambre rouge, c'est bien le seul qui croit encore à ce genre d'enfantillages d'ailleurs, quand c'est jour d'élections, il se déplace pour voter. Bref je fais comme si, impatient de déballer un gros paquet couleur kaki et garanti bullet proof pour emballer un must de la technologie militaire. De mon temps, c'étaient les maquettes d'avion en miniature dont on était friand, aujourd'hui, les maquettes volent et elles peuvent même emporter des armes ou un appareil de prise de vues. Au milieu des ruines de papier d'emballage froissé et de rubans déchiquetés, je vois se dresser mon nouvel ami, mon futur fidèle compagnon, Le Drone. J'ai une pensée émue et reconnaissante pour la Fnac et ses publicités au cul des bus, pour le réseau qui livre des objets inutiles tous les jours y compris le dimanche, pour Antenne 2 et ses publi-reportages, pour l'armée et sa publicité transformant la guerre en jeu vidéo, merci à vous sans qui je n'aurais jamais imaginé pouvoir utiliser une arme de guerre domestique. Le drone va enrichir ma vie d'aventurier en herbe et m'ouvrir des perspectives professionnelles. Neuf heures quinze, mode d'emploi en main, les premiers réglages et une familiarisation avec les commandes. Un tour du salon en rase motte plus tard, camouflé derrière un fauteuil pour éviter les attaque de soucoupes à café préventivement clouées au sol et j'ai neutralisé un lustre, un vase avec ses fleurs et le cadre de grand-mère. Victoire, l'ennemi agite un torchon blanc pour signifier sa reddition. C'est alors que me revient une leçon du programme de techno' et j'équipe le drone d'une caméra embarquée en branche le G.P.S. de la voiture du paternel. Direction la rue, prêt à vivre de nouvelles aventures. Quelque évolutions acrobatiques plus tard et mon drone effectue un vol stationnaire au-dessus du jardin des voisins. Sous le chaud soleil de ce matin d'hiver, la fille de la maison s'y prélasse dans la panoplie de baigneuse qu'elle vient de recevoir. Le réchauffement climatique a du bon. Le temps de prendre  quelques photos histoire d'alimenter mon réseau social et il est temps de passer aux choses sérieuses. J'envoie un texto aux copains pour leur proposer une opération coup de poing pendant l'acte VI bis des gilets jaunes. Magie de la télé transportation, j'arrive en pleine manif', au milieu d'une armée de copains tous de bleus vêtus, casqués, bottés et bien à l'abri derrière leurs boucliers. Ils sont prêts à affronter une escouade de gilets jaunes qui n'ont pas l'air très bien portant, une ophtalmie peut-être, à en croire les yeux rougis. A moins qu'un excès de sensibilité ... Debout, en casquette à galons dorés, le chef me donne l'ordre de photographier les sauvages du camp d'en face afin de leur faire passer le goût des revendications. Leur place est derrière des barreaux plutôt que sur un rond point. Heureux de rendre service à mon pays et au découvreur du nouveau monde, je mitraille, pardon, je prends une multitude de clichés. Manque de chance, ils sont flous. Le chef me console et me donne rendez-vous à la prochaine manifestation. Tu auras l'occasion de te rattraper, vu le nombre de grèves et des mouvements de désordre que connaît ce pays. Ta technologie et toi, vous rendrez un fier service à la patrie. En attendant, va voir de ma part, Patrick, un ami qui habite Levallois Perret, il organise un stage "l'utilisation des caméras de protection dans l'espace public". Question surveillance, c'est la préhistoire des drones mais il est important de connaître ses racines, son passé