Ne voulant pas laisser à la multitude dont nul ne sait au fond ce qu'elle est et où exactement elle se trouve, le soin de pâtir à ma place, un matin, je me levai de bon matin, autrement dit tôt, comme dit l'homme pressé de parvenir. Pas revenir sur soi, pas si simple, si je peux me risquer à quelque retour allusif, sans entourlouper lecteures et lecteurs. Bientôt je fus prêt à abandonner qui j'étais sans regret. Sur ma tombe encore fraîche, je laissais là tous mes effets. Pour s'élever se délester. Enfin je partis, le cœur léger. Tout le long de mon long périple, je ne songeais à rien. À quoi bon chasser le halo vaporeux des vanités. Tout l'espace des vécus et cv, en suspens. Seul importe à la rose, la montée de sève. C'est évidemment une image néanmoins forte et généralement indicative du fait que des choses se passent intraduisibles, excepté en quelque langue oubliée, propre à ranimer tout esprit égaré en lui-même et que le temps a figé, sur un trône, un banc, une pierre. Miracle de janvier, remet cénacle sur pied. En arrivant à proximité d'où j'allais, je sus que c'était bien là que je me rendais, car, aussitôt une foule amassée des deux côtés qui attendait d'être réunie comme les deux côtés d'une braguette ouverte au vent dit : c'est lui ! Et c'était bien, en un sens, comme malgré moi, moi ! Qu'il est difficile de ne pas produire quelque effet quand tourbillonne ce qui s'attire et se repousse ! D'un autre côté, comment peser sans cela ? Et aussi, comme il est question de poids et de mesures, que le français le plus brut et haut finit vieux et le dernier et bas, neuf, quelle dialectique affranchie du poids du temps l'expliquera ? Celle peut-être butinant qui embobine les mots, en leur donnant par là l'occasion de battre de l'aile et ainsi de faire printemps. Entre-temps, j'étais arrivé au bord d'une grande étendue d'eau montrant qu'ici tout finit et commence maintenant. Le lieu donc de toutes les certitudes qui apparaissent et s'évanouissent dans la foulée. Et la forme aussi de tous les soulagements qui étend son empire du mur à la raie, comme dit l'homme pressé de mettre un terme à toutes tergiversations. Image osée néanmoins absorbante et, mais je l'ai déjà dit, n'en parlons plus ! Sur la plage, de longues saucisses de saindoux étincelaient qui semblaient des joncs débordant d'huile grasse et dorée ou des flèches de feu prêtes à être décochées, en vue d'illuminer l'horizon. Cela sentait l'action prochaine. L'un des présents m'offrit alors un vase très-bleu et visible dès qu'à portée de main et j'entrepris aussitôt de boire une eau saumâtre sans laisser paraître aucune aversion. Cela aurait paru une réaction somme toute bête d'un temps désormais derrière moi. Et je bus et bus longtemps, sachant qu'il faut bien commencer quelque part, pour aller de part en part, et quant au présent qui m'occupait, aller à pied sec de l'autre côté. La foule cria à nouveau : c'est lui ! Et c'était bel et bien moi, le sachant, qui ouvrait la voie à un monde nouveau où boire lait de miel et paroles belles.
Billet de blog 28 mai 2017
PRAESIDIUM
Une parabole de notre temps qui sait qu'il ne sait rien
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