Poutine hors d'Ukraine, solidarité avec la résistance du peuple ukrainien. Non à l'OTAN

Malgré l'énorme supériorité militaire de la Russie, l'invasion a échoué en raison de la résistance du peuple ukrainien et de l'armée ukrainienne. À trois reprises, la contre-offensive ukrainienne a repoussé les troupes russes, éloignant les envahisseurs de Kiev, de Kharkiv et reprenant Kherson. Mais, le régime de Poutine est prêt à transformer l'Ukraine en un pays inhabitable si elle ne se soumet pas : des milliers de morts, des millions de personnes déplacées, des villes et des villages réduits en ruines, des infrastructures vitales systématiquement détruites : une année de souffrance et de brutalité. La solidarité internationale contre l'invasion doit se faire entendre avec force pour vaincre l'impérialisme russe et défendre le droit de l'Ukraine à l'autodétermination.
Poutine et l'échec de son plan « blitzkrieg »
La résistance du peuple ukrainien et de l'armée ukrainienne a fait échouer le plan de « blitzkrieg » de Poutine.
Un an après le début de la guerre, l'échec militaire et politique massif de Poutine devient évident. La guerre est dans l'impasse et risque de s'éterniser. Les contre-offensives militaires ukrainiennes de 2022 ont provoqué une crise politique au sein du régime de Poutine. Les secteurs les plus favorables à la guerre ont remis en question la politique militaire. Poutine a dû changer son commandant militaire à trois reprises. Ainsi, il a même dû recourir à la milice privée, le Groupe Wagner, de l'oligarque Evgeny Prigogine qui a massivement recruté d'anciens prisonniers de droit commun.
Poutine est incapable de mener une offensive décisive en raison des difficultés de recrutement qu'il impose à sa propre population. Il a fait taire toute voix critique d'une main de fer, mais de nombreux jeunes continuent à résister à la conscription et à fuir le pays. C'est pourquoi la solidarité internationale avec les réseaux qui soutiennent les jeunes fuyant la guerre est essentielle et c’est pour cela que nous devons exiger que les gouvernements d’Europe leur garantissent l'asile politique.
Une guerre qui prolonge et approfondit la crise du système capitaliste-impérialiste
L'échec de l'invasion dans les premières semaines a obligé l'impérialisme américain, l'impérialisme européen et l'OTAN à revoir leurs positions. Sinon, ils auraient versé des larmes de crocodile pour continuer à faire des affaires avec le partenaire russe. Ils l'ont fait en 2014 avant l'occupation de la Crimée ou l'intervention dans le Donbass, comme ils l'avaient également fait après le soutien de Poutine à la répression des manifestations en Biélorussie (2020), au Kazakhstan (2022), comme ils se sont tus devant les interventions militaires du Kremlin pour étouffer la révolution en Syrie (2015), ou devant les massacres en Tchétchénie (1999). Ce fut la chaîne d'impunité dont a joui Poutine depuis son arrivée au pouvoir et qui a permis à l'armée russe de développer des méthodes de plus en plus atroces contre la population civile. Les méthodes de Poutine n'ont rien à envier par leurs atrocités aux interventions de l'impérialisme américain.
L'invasion russe de l'Ukraine a donné à l'impérialisme américain et à l'impérialisme européen l'occasion de redorer le blason de l'OTAN, qui était au plus bas après la fuite de l'Afghanistan en 2021.
Nous assistons à une escalade des dépenses militaires, non pas pour aider l'Ukraine, mais pour équiper les pays américains et européens. Si les impérialismes européen et américain livrent des armes au gouvernement de Zelensky, ce n'est pas parce qu'ils se soucient du peuple ukrainien, mais pour satisfaire leurs propres intérêts. Les armes arrivent en Ukraine au compte-gouttes, dans le but non pas de vaincre l'invasion russe, mais de forcer Poutine à négocier.
C'est pourquoi, un an après le début de la guerre, l'Ukraine ne dispose toujours pas de l'armement lourd nécessaire pour affronter la puissance militaire de la Russie. L'Ukraine ne possède presque aucun avion militaire et Biden a une fois de plus confirmé qu'il ne donnera pas les avions de combat F16 que l'Ukraine réclame. Après une année de refus, l'Allemagne et les États-Unis disent seulement maintenant qu'ils enverront quelques chars modernes (Léopard 2 allemand et Abrams américain). Il ne s'agirait que de quelques dizaines alors que l'armée ukrainienne en a besoin d’un minimum de 300 chars. Les ukrainiens n’ont reçu ni drones tactiques, ni hélicoptères, ni missiles à longue portée. Ils sont condamnés à voir leurs installations civiles attaquées par des drones russes sans pouvoir répliquer. Les occidentaux n’acceptent de leur fournir que des armes défensives. Les HIMARS qu’ils ont reçus leur sont très utiles mais ils n’en ont eu que 18 alors que les USA en ont plus de 550 en stock. Il en est de même pour les 18 canons Caesar fournis par l’armée française. Il serait question d’en fournir 12 autres ! Est-ce un gros effort ? Bref ! Les USA et l’OTAN pourraient très bien donner aux ukrainiens les moyens de gagner cette guère. Ce n’est pas ce qu’ils veulent faire. Les pays de l’OTAN fournissent une aide mesurée à l’Ukraine pour que la guerre dure et pour donner une situation de force aux USA dans des négociations. Mais, pour les capitalistes américains ou européens peu importe sous quelles dominations politiques les travailleurs seront exploités.
Notre solidarité avec le peuple ukrainien n'a rien à voir avec le soutien à l'OTAN, qui est une machine criminelle contre les peuples. La guerre en Ukraine n'a fait qu'approfondir la crise du capitalisme et de son économie. Les conséquences sont : davantage de misère et une baisse du niveau de vie des masses. De plus, l’impossibilité de contrôler Poutine peut conduire l'humanité à l'extension de cette guerre ainsi qu'à de nouvelles guerres et même à l'utilisation d'armes nucléaires. C’est pourquoi les révolutionnaires sont opposés à toute forme d’armement impérialiste. Nous sommes pour la dissolution de l’OTAN et la suppression de ses bases militaires dans le monde. Nous sommes aussi pour la suppression des bases militaires russes en territoire étranger. En voici une liste :
- Tartous : base navale militaire russe en Syrie.
- Hmeimi : base militaire aérienne russe en Syrie.
- Sébastopol : base navale militaire russe située en Ukraine-Crimée.
- Guioumri : base russe en Arménie qui a ouvert deux « positions d’appui » dans le sud du pays, à la frontière avec l’Azerbaïdjan.
- Bambora et Gudauta : deux bases militaires aériennes russes placées sur le territoire géorgien. En fait la Russie considère qu’il s’agit de l’Abkhazie qu’elle considère être un territoire indépendant.
- Otchamtchira : base militaire navale russe également sur le territoire de la Géorgie-Abkhazie. Elle est donc au bord de la Mer Noire, en eaux peu profondes.
- La Biélorussie (ou Bélarus), en principe, n’héberge pas de bases militaires russes mais nous savons tous que Poutine y a massé des troupes en grand nombre quand il a décidé d’envahir l’Ukraine.
Peu d’organisations abordent ce sujet qui est donc peu médiatisé. Nous invitons les lecteurs qui auraient des informations complémentaires sur les bases russes à nous les faire parvenir.
Une guerre juste contre l'envahisseur impérialiste
La solidarité internationaliste avec le peuple ukrainien a été très faible en cette année. Une partie de la gauche stalinienne s'aligne sans complexe sur les mensonges de Poutine et dépoussière la vieille thèse de deux camps ou blocs opposés dans un affrontement sur lequel la Russie mènerait une bataille « progressiste » pour se défendre contre l'impérialisme. Même des organisations qui se réclament du trotskysme défendent Poutine avec cette argumentation (voir le « World Socialist Web Site » de David North et la « Tendance Marxiste Internationaliste » d’Alan Wood). Elles n’ont évidemment rien de commun avec le trotskysme. Il en va de même pour les gouvernements de la fausse gauche latino-américaine tels que ceux de Cuba, Maduro du Venezuela ou Ortega du Nicaragua. Leur commune politique justifie que le peuple ukrainien soit sacrifié pour avoir osé remettre en cause sa soumission à la Grande Russie. Cette politique condamne la classe ouvrière et les peuples qui luttent contre l'oppression à des gouvernements réactionnaires comme celui de Poutine, des ayatollahs en Iran ou du criminel Bashar Al Assad en Syrie. Mais, la réalité est qu'il n'existe pas de tels blocs. La Russie de Poutine n'a pas hésité à collaborer avec les États-Unis lors de l'invasion de l'Afghanistan en 2001 ; comme les États-Unis ont collaboré avec l'Iran pour s'assurer le contrôle de l'Irak après son retrait ; de même en Syrie, la Russie et les États-Unis sont intervenus de manière coordonnée. Le monde n'est pas divisé en blocs, mais en classes sociales. Nous sommes aux côtés de la classe ouvrière et des peuples qui luttent contre l'exploitation et se rebellent contre toute oppression d’où qu’elle vienne.
Remarquons d’ailleurs que, parmi toutes ces organisations qui prétendent que c’est pour s’attaquer à l’impérialisme US qu’il faut sacrifier le peuple ukrainien sur les autels de l’orthodoxie de Poutine, certaines sont absentes de la lutte qu’il faut effectivement mener actuellement en Amérique Latine contre les coups d’Etats soutenus par l’impérialisme US que ce soit le coup d’Etat raté de Bolsonaro au Brésil ou celui, parfaitement réussi jusqu’à ce jour, de Dina Boluarte au Pérou.
La guerre menée par les ukrainiens a une cause juste et c'est pourquoi nul ne peut être neutre. De même, le « ni-ni » d'une frange de la gauche favorise en vérité Poutine et son invasion meurtrière.
D'autres secteurs, issus du pacifisme, se limitent à dénoncer la course aux armements et l'augmentation des dépenses militaires, comme si c'était la faute du peuple ukrainien. Nous ne sommes pas dupes : les budgets militaires gonflés ne sont pas destinés à aider le peuple ukrainien, mais à protéger les intérêts de la bourgeoisie de chaque pays. Appeler au cessez-le-feu et à la négociation sans exiger le retrait des troupes d'invasion revient à récompenser l'agression armée impérialiste de Poutine par des gains territoriaux.
Il ne peut y avoir de paix juste qui ne respecte pas le droit des peuples à se révolter et à résister à l'oppression et à l'occupation. Nous reconnaissons ces droits au peuple palestinien, au peuple sahraoui ou aux peuples d'Irak, d'Afghanistan ou du Vietnam contre l'envahisseur impérialiste yankee de même que nous avons reconnu le droit du peuple algérien à s’émanciper du colonialisme français. Il ne peut pas en être autrement pour le peuple ukrainien qui, comme peuple attaqué, opprimé et occupé, a le droit de se défendre et de s'armer. Et, comme nous l'avons dit à propos de l’Irak, de l’Algérie, de l’Afghanistan ou du Vietnam cette position est indépendante du caractère de leurs gouvernements respectifs.
Nous soutenons le peuple travailleur ukrainien et non pas Zelensky.
Le gouvernement de Zelensky est capitaliste et proeuropéen et impérialiste yankee, il légitime l'extrême droite et prend des mesures sévères contre la classe ouvrière ukrainienne, qui voit les salaires et les droits reculer. Mais nous ne jugeons pas les peuples par leurs gouvernements. Étant du côté des travailleurs ukrainiens, soutenant leurs organisations de gauche et leurs syndicats militants, nous dénonçons les mesures qu'il prend dans ce sens.
Les mesures anti-ouvrières de Zelensky affaiblissent l'effort de guerre. Ce ne sont pas les oligarques ukrainiens, mais les travailleurs qui fournissent les morts et les blessés pour vaincre l'offensive russe. Les oligarques, qui se sont enrichis grâce à d'énormes privatisations à des prix dérisoires, et les gouvernements qui les ont servis, sont les principaux responsables du fait que l'Ukraine est le pays le plus pauvre d'Europe. C'est sur eux que doivent être déchargées les mesures pour les frais de guerre. Pas sur la classe ouvrière et les secteurs populaires. Les décrets anti-ouvriers devraient être abrogés et des taxes élevées et des expropriations devraient être imposées aux hommes d'affaires et oligarques ukrainiens et étrangers pour qu'ils investissent dans les dépenses de guerre.
Par besoins du conflit et des besoins de la reconstruction, comme le dit le Mouvement social ukrainien : la dette est impayable. Nous devons exiger du gouvernement Zelensky le non-paiement de la dette afin d'utiliser ces fonds pour la guerre et la reconstruction.
Nous appelons à un redoublement de la solidarité internationale.
Notre engagement est de continuer à déployer la plus large solidarité avec le peuple ukrainien et la résistance populaire-militaire à l'agression de Poutine. Nous participons au Réseau européen de solidarité avec l'Ukraine. L'UIT-QI a déjà envoyé trois convois d'aide aux syndicats et aux organisations de gauche en Ukraine pour renforcer et soutenir la gauche politique, le mouvement anti-autoritaire et le syndicalisme qui a également lutté contre les lois anti-ouvrières du gouvernement Zelensky. Avec le premier convoi, nous sommes allés à Kiev en mai pour livrer de l'aide aux organisations de jeunesse antifascistes qui luttent contre l'invasion. Avec le second convoi, en novembre, nous sommes allés dans la ville minière de Kryvy Rih pour livrer de l'aide au syndicat indépendant des mineurs de même qu'à Zaporiyia, pour soutenir le syndicat indépendant des cheminots. Quelques semaines plus tard, nous étions dans la ville minière de Dobropilia, dans le Donbass, pour soutenir aussi le syndicat indépendant des mineurs, et nous sommes retournés de nouveau à Zaporiyia.
Nous appelons à un redoublement de la solidarité internationale pour défendre le peuple ukrainien et son droit à s'armer, quelle que soit l’origine des armes, pour vaincre l'invasion de l'impérialisme russe. Nous le faisons en restant indépendant de l’OTAN et du gouvernement de Zelensky. Nous appelons les travailleurs et les peuples du monde et toutes les forces de la gauche internationale à soutenir la résistance populaire-militaire à l'invasion russe, ainsi que la gauche, les organisations anti-autoritaires et le syndicalisme militant en Ukraine.
Nous nous félicitons de la mobilisation du 25 février 2023 avec toutes les manifestations notamment à Paris, Tokyo, Bueno-Aires, New-York…
- Les troupes russes hors d'Ukraine !
- Solidarité avec le peuple ukrainien et sa résistance !
- Asile politique dans tous les pays d’Europe pour les Russes qui refusent de la guerre !
- Liberté pour les personnes emprisonnées en Russie pour s'être opposées à la guerre !
- Poutine dehors ! Non à l'OTAN !
Cet article vient pour l’essentiel du comité de rédaction de l’UIT-QI. J’ai ajouté des informations notamment sur la réalité des armes fournies par divers pays, sur les bases militaires russes à l’étranger et sur les poutino-trotskystes (David North et Alan Wood).
Jean Dugenêt, le 25 février 2025
Unité internationale des travailleuses et travailleurs – Quatrième Internationale (UIT-QI)
https://uit-ci.org/index.php/2023/02/21/24-febrero-un-ano-de-la-invasion-rusa-de-ucrania/
Photo : Une tête caricaturale du président Vladimir Poutine brandie par une manifestante lors du rassemblent en solidarité avec l'Ukraine, à Paris, le 25 février 2023. EMMANUEL DUNAND / AFP