Les revenus et privilèges des hauts fonctionnaires, censés être au service de la démocratie et qui se comportent trop souvent en parasites;
Les petits arrangements avec la loi et avec le fisc (verrou de Bercy...) dont bénéficient les "premiers de cordée" de la sphère politico-économique ;
Le cumul des mandats des "représentants du peuple" et leurs tactiques partisanes pour accéder à des postes de pouvoir et s'y accrocher becs et ongles quand ils sont en place;
La perversité du système de financement des partis politiques, qui aboutit à ce que les "représentants élus du peuple" passent le plus clair de leur temps à faire les yeux doux à leurs "sponsors", au lieu de se mettre au service de ceux qui les ont élus;
Le versement des montagnes de dividendes aux actionnaires du CAC 40 (57 milliards pour 2018);
La prise de contrôle de 90% des médias du pays par une dizaine de milliardaires;
Le machisme ambiant des mâles dominants, qui se transmettent leur capital d'arrogance de génération en génération;
Tout cela, ajouté aux innombrables petits trafics des dignitaires de l'Etat, de la République et des grandes entreprises, "fleurons" du capitalisme français, pour se maintenir à leurs postes de pouvoir;
Tout cela, c'est trop d'arrogance, trop de mépris, trop de malhonnêteté, pour que les masses populaires ne réclament pas réparation. C'est trop, au vu et su de tout le monde et en toute impunité, pour que cela dure.
Si les castes dirigeantes n'opèrent pas, à brève échéance, une complète métamorphose morale, la France risque de se trouver très vite dans une situation chaotique. Nul ne pourra alors prévoir ce qui en résultera :
- Un effondrement général des valeurs démocratiques, dont un leader démagogue à la Trump, version F.N., saura tirer profit en prenant les rênes d'un pouvoir sécuritaire ?
- Une douloureuse catharsis démocratique qui accoucherait d'une grande réforme de l'Etat et de nouvelles institutions (réforme de la constitution pour introduire notamment les enjeux écologiques, instauration d'une VIème République, réforme du Parlement, réforme des modes de participation, d'élection et de représentation...) ?
Quoi qu'il advienne, une chose est sûre : l'oligarchie qui a transformé la République en ploutocratie, et qui n'a visiblement ni la volonté ni le courage de se métamorphoser, sera tenue responsable devant l'Histoire.
Je veux bien admettre qu'il reste encore, au milieu de cette boue, des hauts fonctionnaires et "serviteurs de l'Etat" qui ont gardé le sens de l'intérêt général. Que certains dirigeants soient moins voraces que leurs confrères, et un peu plus soucieux de l'utilité, de la morale et de la justice sociale que la moyenne de leurs compétiteurs.
Mais ça ne suffit plus ! Là où ils se trouvent, il ne suffit plus qu'ils continuent à "faire le job" sans faire de vagues. S'ils veulent préserver la démocratie, il faut qu'ils montent au créneau, qu'ils prennent le risque de se faire lanceurs d'alertes.
On voit trop de cadres supérieurs dans les entreprises et dans les ministères qui ont si bien appris à manier la litote et l'euphémisme pour exprimer leur point de vue, que leur parole ne pèse plus rien face à la déréliction morale ambiante.
S'ils s'estiment honnêtes, et s'ils se refusent à laisser la démocratie s'effondrer, il est grand temps qu'ils sortent du déni permanent dans lequel ils baignent, il est grand temps qu'ils ré-apprennent le parler-franc (qu'ils prennent exemple sur leurs grands anciens, aux temps de Zola, Hugo...).
Il est grand temps qu'ils mettent au rencard les "éléments de langage" des managers et les bonnes convenances des gens bien élevés - et dociles - qu'ils ont appris à être. Cette langue qu'ont leur a apprise depuis des décennies est une langue de laquais. Cette langue de la communication qu'ils pratiquent non seulement en public, mais entre pairs, et même en famille, c'est une langue de marionnettes.
Là se trouve le coeur du problème de la démocratie moribonde...