Jean-François Bayart
Professeur au Graduate Institute (Genève), titulaire de la chaire Yves Oltramare «Religion et politique dans le monde contemporain».
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Billet de blog 12 novembre 2010

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Lettre ouverte à Valérie Pécresse (2)

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Madame le Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche,
Peut-être ne vous reste-t-il que quelques heures, avant un remaniement ministériel susceptible de vous porter à d'autres fonctions, pour répondre à la lettre que je vous ai adressée le 16 février 2010 et qui est demeurée sans retour de votre part.

Je ne puis croire que votre silence soit l'expression du mépris que le président de la République a témoigné à l'endroit de la communauté scientifique à au moins deux reprises, en février 2009, dans son trop fameux discours sur le chauffage et l'électricité, et en juillet 2010, lorsqu'il a osé affirmer que l'Université n'avait pas connu de mouvement social depuis son élection, nonobstant l'énorme mobilisation de cette dernière contre la LRU dont vous êtes l'auteur. Je préfère attribuer l'absence de courrier de votre part à votre surcharge de travail.

Néanmoins, plusieurs cas de déclassement de candidats à des postes de maître de conférence, que des présidents d'Université ont cru devoir décider en contredisant les recommandations des commissions compétentes, ont confirmé que mes mésaventures professionnelles n'étaient pas propres au CNRS, n'avaient rien d'exceptionnel et étaient en passe de devenir la règle dans le nouveau contexte institutionnel que vous avez mis en place.
Je me permets donc de réitérer les deux questions que je vous adressais dans ma lettre du 16 février, questions dont l'actualité n'a jamais été aussi grande et que j'étends désormais à l'Université :
1. Approuvez-vous le principe de la « souveraineté de la direction » du CNRS et des présidents d'Université en matière de promotion par rapport aux délibérations du Comité national ou aux diverses instances délibératives de ces institutions, alors que les réformes que vous avez conduites, sous l'autorité du président de la République, se réclament d'une volonté d'améliorer la qualité et l'indépendance des processus d'évaluation des chercheurs et des enseignants ?

2. Quels sont les critères autres que celui de l'« excellence » dont peut se targuer la Direction générale du CNRS ou un président d'Université pour ne pas tenir compte, cinq années consécutives, d'une recommandation argumentée par un rapport écrit de la section compétente du Comité national, ou d'un classement effectué par une commission de spécialistes en matière de recrutement ?
Vous comprendrez que la communauté scientifique française attend maintenant depuis de longs mois, avec impatience et frustration, votre réponse quand elle continue à douter du bien-fondé des réformes de l'Université et de la Recherche que vous avez engagées, en particulier du point de vue du respect de la liberté académique, et voit malheureusement confirmées les craintes qu'elle nourrissait à cet égard. Je le répète, il en va de la crédibilité internationale du CNRS et de l'Université française, que met à mal ce genre de mesures discrétionnaires. Enfin, à l'approche de la prochaine élection présidentielle, les citoyens ont le droit de savoir sur quelle conception précise de l'Enseignement supérieur et de la Recherche ils auront à se prononcer.
Ne désespérant pas de votre réponse, et vous en remerciant par avance, je vous prie d'agréer, Madame le Ministre, l'expression de ma haute considération.

Jean-François Bayart
Directeur de recherche au CNRS
Sciences Po-CERI
56, rue Jacob
75006 Paris

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