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Billet de blog 5 septembre 2020

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Nihilisme d'état contre liberté positive

J’avais prévu de parler de la jouissance du négatif qu’il peut y avoir à porter un masque sous l’autorité d’une menace instrumentalisée par un pouvoir intéressé par l’exercice de la domination sur les corps mais ce sera pour un autre billet.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Barbara STIEGLER est spécialiste de Nietzsche et il n’était pas surprenant de trouver dans son dernier livre, « du cap aux grèves » (édition Verdier), une référence au nihilisme.

C'est un point de détail dans un ouvrage, court mais très riche et très intéressant. L'auteur semble avoir réussi à s'inscrire durablement dans une action politique dont elle sait les limites en encourageant à toutes les luttes, fussent-t-elles petites.

Le nihilisme m’apparaît comme le marqueur d’un temps figé, celui que nous impose le pouvoir en place, produit d'une dérive politique qui semble redouter la perte de contrôle sur le vivant.

Masqués, menacés de confinement (d’enfermement), nous voilà placés sous l’autorité d’un exécutif dont la pensée transforme peu à peu l’ordinaire de nos vies citoyennes passées en idéal.

Nous savons désormais que nos devoirs l’emportent sur nos droits dans la pensée d'E. Macron. 

Nous apprenons jours après jours que l’obéissance aveugle est requise et que toute tentation de discuter les ordres en en interrogeant les motifs et les fondements revient à s’exposer à la violence de la loi (une loi qui se transforme peu à peu en règlement intérieur d'entreprise).

Le nihilisme, c’est « le processus par lequel sous l’avalanche des « nouvelles » et des « notifications », plus aucun évènement ne survient, plus rien ne semble devoir nous arriver ».

C’est à une suspension du temps que nous assistons avec une pandémie qui à défaut de virulence individuelle, semble désormais en capacité de neutraliser toute forme de mobilisation collective.

À un mal biologique est opposé un remède qui s’attaque à la pensée des individus leur enjoignant de mettre en veille leur esprit critique et leur intelligence.

Nous devons  obéir et nous soumettre à l’autorité d’un pouvoir qui aujourd’hui semble avoir su saisir l'opportunité apportée par l'irruption d'un virus et instrumentaliser la crise qui en procède après quelques mensonges et bien des atermoiements lorsqu'il a renoncé à protéger les plus vulnérables quand il était temps de le faire, il y a six mois.

Hier, il réduisait les libertés pour des raisons liées à une menace terroriste dont on entend plus parler.

Demain, il pourra en faire de même pour des motifs écologiques, limitant la mobilité d’une majorité d’hommes sans restreindre les flux de marchandise et d’informations qui concourent à enrichir une minorité qui disposera des moyens de privatiser les espaces biologiquement supportables.  

Le corps social est aujourd’hui considéré du seul point de vue de la dimension biologique des individus qui le composent. La vulnérabilité biologique individuelle se trouve convoquée à travers l’obligation du port du masque comme un élément devenu central de nos existences.

La responsabilité de protéger du virus l’emporte sur celle de préserver une liberté individuelle à circonscrire pour la rendre compatible avec des décisions autoritaires qui procèdent elles-mêmes d’un choix et donc d’un arbitraire.

Cet arbitraire ferme bien entendu tout débat, politique ou scientifique (cf. la plainte contre D. Raoult).

Nous devons simplement nous ouvrir à la « pédagogie » de celles et ceux qui ont pour mission de nous amener à renoncer à toute possibilité d’alternative dans le domaine qui nous occupe aujourd’hui.

Nous avions qu'il n'y en avait déjà plus dans le domaine économique.

Demain si nous ne réagissons pas, collectivement, nos vies basculeront complètement dans la sphère politique et nous devrons nous résigner à renoncer à toute autonomie réelle et aux plaisirs de la « liberté positive ».

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