Au nom de la lutte contre le chômage, à distance de toute analyse sérieuse de ses déterminants qui ne réduisent pas aux effets d’éviction des « insiders » par les « outsiders », tous les coups sont désormais permis avec l’assentiment d’une majorité de centrales syndicales et ce qui apparaît comme la résignation d’une majorité de salariés.
Il faut bien dire que depuis 2009, les manifestations ne permettent plus de créer les conditions d’un rapport de force efficace. La lutte des places semble s’être définitivement substituée à la lutte des classes pour reprendre l’expression de V. DE GAULEJAC.
Nous avions un individualisme forcé par les conditions objectives d’un marché de l’emploi de plus en plus sélectif, « multicritères », bien souvent absurde et injuste.
Nous aurons à connaître également le règne des barèmes et la mise en place de ruptures collectives « négociées » des contrats de travail.
D’un côté le chacun pour soi, de l’autre le règne de la généralité et de la norme du précariat, la fin de la fiction d’un contrat de travail organisant l’expression de la « libre » volonté des parties.
Le cadre légal dans lequel vient s’organiser le travail salarié semble évoluer vers l’accentuation du déséquilibre entre la partie faible et la partie forte.
La première se trouve exposée à toutes les vulnérabilités physiques et psychologiques sans possibilité de se protéger de la volonté de la seconde qui dispose des outils juridiques capable d’organiser l’exfiltration du salarié gênant.
Il est de surcroît permis de s’interroger sur l’avenir de la jurisprudence : l’encadrement des Prud’hommes et le recours prévisible à des mesures collectives de plus en plus fréquentes limitant la possibilité d’individualiser les décisions.
Il s’agit bien là de la régression décrite par Alain SUPIOT d’une régression de la jurisprudence comme expression d’un droit vivant au profit d’une norme juridique qui ne laisse aucune chance au sujet, l’exposant aux effets conjugués d’un marché du travail injuste et d’une loi inique.
A travers les mesures qui s’ébauchent concernant le sort réservé aux personnes privées d’emploi, il semble bien être question de la mise en place d’une obligation de travailler à n’importe quel prix.
Ce qui présenté par l’exécutif comme un droit au travail, se trouverait contrarié par l’existence de freins à l’embauche et au licenciement d’origine juridique et culturelle.
La cause juridique semble désormais être sous contrôle. Il ne reste plus qu’à faire pression sur les individus pour qu’ils fassent preuve d’une plus grande mobilité conçue comme la condition préalable à toute réussite sociale et de tout succès économique.
 
                 
            