Tour de vis
Certains l’attendent, peu le redoutent semble-t-il, enfin autour de moi, le mal est fait de toute façon. Les activités non-essentielles et pourtant pour la certaines d’entre elles, vitales, son interdites.
Les déviants sont traqués dans l’espace public et s’ils ne le sont pas, s’ « interdisent » comme ils s’interdisaient de circuler le visage libéré d’un voile sans pudeur lorsqu’aucun arrêté ne classait cette conduite dans la catégorie des infractions à l’ordre public.
Celles et ceux qui s’estiment injustement exposés au risque épidémique, celles et ceux qui se pensent comme des vecteurs possibles d’un germe (parmi d’autres faut-t-il le rappeler) dont la lutte dans l’espace politique et médiatique se présente comme un véritable Armageddon, celles-là, ceux-là attendent ce « tour de vis » présenté comme le seul moyen de maîtriser un peu mieux la circulation d’un virus, d’en limiter la propagation au motif principal de l’insuffisance des moyens.
Derrière ces mesures comme les autres, cet insupportable port du masque obligatoire et parfaitement inutile dans les espaces ouverts, cette insupportable « distanciation » devenue le signifiant maître d’une époque, il n’est pas possible d’écarter l’hypothèse totalitaire.
Comment ne pas penser au « panoptikon » lorsqu’il est désormais pensé l’hypothèse politique d’une imposition de la « distanciation » dans l’espace privé ?
A quand un « télécran » dans chaque foyer ?
Comment ne pas percevoir de la jouissance dans le regard et dans le ton de celles et ceux qui prônent l’enfermement, la surveillance individuelle, la sanction financière ?
Cette jouissance insupportable étouffe l’intelligence critique du locuteur ; épuise celle de son interlocuteur amené à renoncer à l’expression de toute question adressée à cette « faculté de juger » réduite à la seule prise en compte des informations labellisées par le ministère de la santé.
Nous attendons le « tour de vis », citoyens aujourd’hui immatures, irresponsables ; demain, présentés comme déviants ?
La classe politique est aujourd’hui unanime, l’espace médiatique saturé de messages anxiogènes et culpabilisants, véhiculant des quantités trop grandes (les malades) ou trop petites (les capacités d’accueil) oubliant ou faisant mine d’oublier qu'une "bonne" politique sanitaire devrait consister à trouver le bon équilibre entre les besoins et les moyens tout en se prémunissant des effets de la contingence en prévoyant des moyens supplémentaires lorsque les besoins ne peuvent pas être limités au risque de produire les effets d’une injustice et d’une perte de chance.
Il n’y aurait donc plus de place pour la « mesure », celle-là même qui se trouve impossible à porter sous l’effet de ces quantités rappelées, assenées, obsédées, ces « trop » et ces « pas assez » qui créent la nécessité d’un « tour de vis » supplémentaire, d’un coup de plus porté à la liberté et à l’intelligence des citoyens.
Nous le savons, la jouissance ne s’accorde pas à la « mesure » mais participe tout en l’induisant à cette démesure politique, cette hubris qui menace le fragile équilibre de notre démocratie.