Coronavirus : Emmanuel Macron en première ligne devant l’opinion
" Depuis le début de la crise du coronavirus, un rituel est en passe de s’installer dans le quotidien des Français : s’asseoir devant sa télévision pour écouter parler Emmanuel Macron. (...) De quoi réjouir un homme qui ne conçoit l’exercice de sa fonction que dans une dimension verticale, « jupitérienne », selon son expression, utilisée pour critiquer et se différencier de François Hollande. Un rôle assumé de « père de la nation », dixit un proche. « Emmanuel Macron considère que la fonction de président est une fonction paternante, qu’il faut accepter comme telle, quand bien même on a toujours envie de tuer le père », assure un autre.
Depuis le début de la crise, M. Macron n’a de cesse que de vanter le concept de « France unie », comme François Mitterrand lors de sa campagne présidentielle de 1988 ; le socialiste avait alors été réélu triomphalement. Le rendez-vous donné aux Français, lundi 13 avril, pour une nouvelle allocution, représente une occasion de plus d’essayer de se couler dans le moule.
Selon son entourage, le président de la République doit profiter de cette adresse pour fixer « un cap et un horizon : mettre en perspective, nous projeter, mais sans démobiliser sur le confinement, au moment où il commence à produire ses effets ». (...)
Se poserait alors la question de la réouverture des écoles, ou bien des frontières, à plus ou moins long terme. Pas question pour autant de provoquer un relâchement des Français, alors que l’exécutif dit craindre une deuxième vague de l’épidémie. « Le président est concentré sur la crise. Le cœur de son discours, c’est la stratégie, les résultats. Pourquoi on est confinés et pourquoi il faut continuer », explique un conseiller, quand un dirigeant de la majorité estime que « son rôle, c’est de dessiner un horizon, de faire monter les consciences de la dureté de la période ». « Il n’y aura pas le jour d’après. Il y aura des jours après », prévient un macroniste influent. (...)
« Je ne connais pas de crise dont les gouvernants sortent indemnes », dit un visiteur du soir de Macron (...) « La confiance avant la crise était altérée de manière forte et durable, au point de devenir une hostilité chez certains. Cette hostilité ne peut pas se transformer, souligne Bernard Sananès. Il n’y a pas de déplacement des frontières politiques dans la confiance au président de la République, qui reste dans ses zones de force électorales. Tout est clivé. »
Une situation dont la Macronie se montre consciente. « Je ne connais pas de crise dont les gouvernants sortent indemnes », souffle un visiteur du soir d’Emmanuel Macron. Le mal est mondial, néanmoins, répète-t-on au sein de l’exécutif, comme pour diluer les reproches. « Je serais très intéressé de connaître les pays qui avaient été très bien préparés à cette pandémie », grince un intime du chef de l’Etat. Ce qui n’empêchera pas le président de devoir affronter les critiques à plus ou moins brève échéance. A cette occasion, lui et ses proches espèrent ne surtout pas voir se confirmer les intuitions de Jean de La Fontaine. Dans la fable Les Animaux malades de la peste, le lion prévient que toute épidémie a son bouc émissaire. « Que le plus coupable de nous/Se sacrifie aux traits du céleste courroux/Peut-être il obtiendra la guérison commune. »
Mais alors, de quoi seront fait les "jours après" ? Comme le signale Médiapart dans un de ses articles, il y a une vraie peur du côté de l'exécutif de ce qui pourrait s'apparenter à une révolte populaire. En fait, il faudrait lui pardonner tous ses excès, toutes ses erreurs, tous ses errements pour lui permettre de rester au pouvoir ? Je pense qu'il est nécessaire de mettre un terme à cet épisode tragique de notre histoire collective, c'est tout. Les manœuvres et autres lâchetés de ce pouvoir ne doivent pas constituer des obstacles à un vrai changement de politique incarné par des individus véritablement "responsables" après, tout de même une rénovation de notre cadre constitutionnel et de l'organisation de la représentation populaire. Mais qui et suivant quel programme ? Force est de constater que personne n'est près du côté de celles et ceux qui pourraient incarner un changement d'époque.