5 candidats ; les sondages le "prédisent", 4 candidats pour 2 élus du premier tour.
L'élection à deux tours permet à un candidat représentant 20 à 25% des voix exprimées de diriger le destin de 100% des habitants d'un pays à partir de "choix" politiques qui auront été ceux d'une partie de ses électeurs.
P. Rosanvallon, N. Rousselier expliquent bien, l'un sur un ton critique, l'autre sous une forme plus analytique, les dérives de l'exécutif national à la française incarné par un individu auquel un nombre plus ou moins important de citoyens, électeurs ou non, attribuent le pouvoir d'orienter la vie sociale et économique dans la direction qu'ils attendent.
C'est demander à un seul homme de diriger un navire par la pensée alors que parmi l'équipage il existe autant de choix que de "courants", qu'il est impossible de disposer de toute l'énergie collective requise pour aller au bout d'une volonté empreinte de calculs et d'intérêts, personnels ou catégoriels.
Je voterai pour Benoit Hamon parce qu'il est le seul des cinq à incarner une certaine idée d'un pouvoir qui ne se résume pas à sa seule volonté et à sa seule intelligence.
Je ne voterai pas pour un égo mais pour un individu embarqué dans un collectif qui lui apporte des ressources intellectuelles et un véritable soutien, dans l'intérêt général.
Les sondages ont beau le déclarer vaincu ; cela importe peu.
Que signifie donc ce "vote utile" ? Nous voilà sommés de choisir l'adversaire de Mme Le Pen dès le premier tour ; un homme capable de la faire perdre, assurément. Mon vote serait un vote de prévention contre une élection présentée comme possible si nous ne consentons pas à choisir LE candidat du centre, incarnation du mur de la raison face aux déchaînement redouté des pulsions "populistes" de la gauche de la gauche ou de la droite de la droite.
Macron est le candidat du cesser le feu idéologique et de la pensée en berne, du programme qui éteint les passions et rassure les élites économiques et financières les protégeant de mesures prises au nom d'un peuple français auxquelles elles n'appartiennent que par intermittence, hors sol et mobiles.
Botanlski et Chiapello le décrivaient déjà très bien il y a trente ans : la mobilité des uns suppose l'immobilité forcée des autres, la vie liquide des uns pour reprendre l'expression de Z. Bauman ne peut s'écouler qu'à condition qu'une majorité se trouve elle-même à l'état de balise sociale et économique, confrontée à l'immuable, l'intangible et l'impossibilité d'un quelconque changement d'état.
La mobilité pronée par E. Macron est une mobilité forcée du facteur humain plus qu'une mobilité désirée, de celles qui bousculent les certitudes et menaces les pouvoirs, c'est une mobilité, erratique, errante et en deshérence, réduite à sa capacité à produire des revenus et de permettre aux clients de disposer de richesses à moindre coût, de capturer la plus-value d'un travail faiblement rémunéré au seul profit du consommateur final. La mobilité de Macron ne met pas en péril les équilibres sociaux et économiques, elle ne menace pas celles et ceux qui déterminent le destin d'une majorité d'immobiles.
C'est une mobilité à moindre coût qui coupe les individus de leurs susbtrats culturels et familiaux, qui leur apporte pour seul horizon dans l'existence qu'une lutte sans fin, à la recherche de subsides capables de les maintenir en vie, le temps d'accumuler assez de points pour vivre une retraite étique et espérons le la plus courte possible.
Il propose de renverser la description faite par Boltanski et Chiapello en permettant à une minorité de disposer d'une sécurité matérielle et physique, épargnée par les risques de la vie sociale, économique et politique, de s'installer dans un état de domination sociale et idéologique intangible, immamerscible.
Pour cela nous devrions, électeurs de gauche, accepter notre sort de variable dépendante de volontés et de calculs pour lesquels nous ne sommes plus quels que soient nos connaissances, nos diplômes et nos expériences de vie que de simples utilités, moyens d'accéder à un pouvoir et de le conserver, "multitude" pour reprendre l'expression malheureuse d'un De Gaulle, au service des grands de ce monde.
Je ne voterai pas pour un Mélenchon, figure désormais holographique de la politique, tribunicien capable de se projeter dans un espace virtuel pour y cristalliser l'espoir sur les fondements d'un programme politique irréalisable. La lucidité doit l'emporter sur l'illusion sans fermer la porte de l'espoir et épuiser les volontés de changement. Le seul à apporter la bonne mesure est B. Hamon.
Inutile de préciser que je ne voterai ni pour Fillon ni pour le Pen, ni pour la caricature de l'hypocrisie et du faux semblant à la française ni pour l'hégérie des forces les plus obscures de notre pays, ancrée dans un monde de violences ethniques et culturelles, alimentées par la rancoeur et l'amertume, la peur et l'envie, privées d'espoir et de désir dans un monde clos et borné.