(La) SNCF
Remercions les communiquant de celle qui est redevenue la SNCF, évolution sémantique qui nous permet de disposer à nouveau d’un réceptacle pour nos plaintes, protestations silencieuses et méditations intimes.
Il y a encore peu, SNCF se déclinait sans article dans les annonces officielles.
Nous pouvons désormais nous adresser à nouveau à elle, comme l’objet de tous nos griefs et frustrations tout autant que comme celle à laquelle on peut déléguer le pouvoir de satisfaire nos désirs de voyage si nous en avons encore les moyens.
Pour l’instant, il est pour moi comme pour bien des français question de simples trajets professionnels rendus aléatoires.
Il m’arrive d’en avoir assez de ce mouvement de contestation dont nous pouvions d’emblée mesurer la relative impuissance face à un pouvoir qui a décidé de supprimer les quelques sécurités individuelles liées aux statuts, aujourd’hui la SNCF, demain les fonctions publiques.
En tout état de cause, les réactions de son représentant élu en 2017, l’attestent, le pouvoir libéral se moque de la dimension affective du rapport au travail, de l’émotion qui peut toucher une aide-soignante défendant son besoin de produire un service de qualité, de n’importe quel citoyen s’interrogeant sur la place de l’homme dans une société dirigée, plus que jamais par l’argent, la « chrématistique » aristotélicienne.
S'il n’y a pas d’argent magique, il y a une pensée magique au pouvoir, une croyance, une foi qui n'a d'autres lois que celle de la force de l'appareil d’état et la dynamique d'un marché total.
L’idéologie libérale est aujourd’hui la plus cohérente des approches de l’homme en société gouverné par ses besoins et dirigé par la peur, celle des autres, ceux dont il convient de se méfier et qu’il ne faut pas se gêner de dominer si l’occasion se présente. Il vaut mieux s’identifier au « premiers de cordée » qu’à ceux « qui ne sont rien ».
On ne compte plus les règles, procédures, normes, réputées organiser la vie sociale en dirigeant les corps à l'instar de ce Michel FOUCAULT envisageait d'un biopouvoir capable de réduire les manifestations indésirables du vivant, ses débordements et autres excès, jusque dans le travail comme nous le rappelle Thomas COUTROT ("Libérer le travail" au Seuil).