Mélenchon était le seul à vouloir remettre en question l'organisation institutionnelle de la 5ème république. Macron n'a pour seule projet institutionnel qu'une réforme partielle du mode de scrutin aux élections législatives. Le système des ordonnances peut lui permettre de modifier le mode de scrutin avant les élections de juin. Cela lui permettrait d'augmenter le nombre de députés estampillés "En Marche" et de fragiliser une opposition confrontée à un groupe d'extrême droite conséquent. E. Macron va pouvoir gouverner en étant minoritaire dans l'opinion (77% de 24% de scrutins exprimés au premier tour) grâce à la présence du Front National dont les députés pourront être marginalisés ; leur présence revêtant un caractère simplement symbolique, une "menace" démocratique qui pourra être agitée pour emporter des majorités de circonstance au parlement.
Le plus important n'est pas le deuxième tour : je ne me déplacerai pas pour voter ; ne l'ayant déjà pas fait en 2002. La notion de vote républicain n'a guère de sens : comment mêler ma voix à des partisans de F. Fillon ? Le FN est un parti politique reconnu par l'Etat, autorisé et capable de présenter 577 candidats aux élections législatives : il est aussi républicain que les autres mouvements politiques. J'ai vôté pour F. Bayrou au premier tour de 2012, ne supportant pas la figure de F. Hollande et n'ayant aucune dilection pour un parti socialiste capable de saborder la candidature de S. Royal en 2007 et celle de B. Hamon en 2017.
Mon vote a été erratique, accompagnant mon évolution professionnelle : de Chevènement à Mélenchon, de Bayrou à Hamon... J'ai toujours eu un faible pour les minoritaires et les non-conformistes, les empêcheurs de penser en rond, celles et ceux qui ont la faculté de déranger l'ordre politique établi, proposant comme Bayrou, une alternative centriste intéressante dans un contexte où la gauche et la droite semblaient prendre un malin plaisir à détourner les électeurs les plus médians de leurs convictions politiques ; tirant vers la droite le socialiste de base comme le conservateur de base pour mieux rallier les électeurs du Front National les moins solidement arrimés aux valeurs de ce mouvement radical.
Cette année, le mouvement de déport vers la droite a entraîné une partie de l'électorat socialiste, suivant la frange la plus intéressée par les opportunités politiques offertes par un soutien au mouvement acronyme d'E. Macron. Le socialisme est une organisation qui fonctionne par affinités personnelles et ralliement à des personnalités qui semblent incarner la figure du leader socialiste historique, avatar d'un de ces illustres élus du mouvement socialiste. Quand un leader part, il emmène avec lui une partie de ses soutiens et les voix qui vont avec : E. Macron n'aura pas trop de difficultés à constituer une force politique autonome mais ce mouvement ne devrait pas lui suffire pour gouverner le pays.
Le deuxième tour des législatives sera déterminant : va t-on assister à la fin du régime présidentiel à la française, à une cohabitation sur la durée du quinquennat avec une majorité aux contours fluctuants ? Voici venu le temps de la démocratie liquide, celle qui coule et s'écoule, ne laissant pour seule empreinte que quelques mesures comme celles qui auront été prises sous l'influence d'E. Macron pendant le quinquennat qui s'achève. Nous sommes loin d'une démocratie solide, capable de renforcer par les décisions prises avec l'accord explicite d'une majorité de citoyens, ses propres fondements et sa propre légimité à les représenter sans les incarner, à parler au nom d'un peuple sans parler pour le peuple.