DÉNIS
Pour ne prendre que les plus criants des exemples récents, remarquons comment « l’Occident » nie obstinément l’ampleur des massacres qu’organise de manière systématique le gouvernement d’extrême droite israélien dans la bande de Gaza.
Et comment « le monde libre » ferme les yeux sur ses violations du droit international que ce soit en colonisant à marche forcée la Cisjordanie pour prépare son annexion, en attaquant militairement plusieurs de ses voisins, le Liban et la Syrie notamment, en s’arrogeant des prétendus droits de police sur les eaux internationales en Méditerranée, et même en tentant d’assassiner des négociateurs du Hamas présents au Qatar.
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MENSONGES
A ces dénis cyniques s’ajoutent nombre de mensonges éhontés quant à la réalité des faits actuels.
On ne peut pas ne pas rapprocher la mise en accusation de l’Iran pour avoir produit des armes nucléaires pour justifier les bombardements « préventifs » décidés par Israël, y compris sur des civils, de la présentation par l’exécutif des USA de fausses preuves de la possession par l’Irak d’armes de destruction massive, pour tenter d’obtenir de l’ONU l’autorisation d’envahir ce pays en 2004.
On sait à présent que l’objectif principal de cette attaque massive, approuvée de facto ^par les USA, était de provoquer un changement de régime en Iran, après avoir tué les principaux dirigeants iraniens, par ce qu’on nomme des « frappes de décapitation » à l’instar de celles qui ont été lancées contre les dirigeants du Hezbollah au Liban ou des Houthis au Yémen.
Quant à ceux qui, comme Macron, ont déclaré que, par ses frappes aériennes préventives, Israël n’avait en réalité qu’utilisé son droit légitime à se défendre, ils n’ont fait qu’innocenter, une fois de plus, par ce mensonge les transgressions au droit international et même au droit de la guerre, dont est coutumier l’état sioniste depuis plus de 70 ans.
Que d’autres, comme le chancelier allemand Merz, aient cru bon de rajouter qu’Israël, en attaquant ainsi l’Iran, aurait fait « notre boulot » rendent d’autant plus grave cette volonté mensongère, puisque ces propos laissent supposer implicitement que les pays européens seraient également légitimes à attaquer l’Iran, via Israël, « pour se défendre » (mais de quoi ? suite à quelles attaques ?).
On retrouve du reste également cette pratique officielle du mensonge dans la manière dont est présentée la guerre russo-ukrainienne.
L’exemple le plus significatif se trouve dans la récente intervention de Macron après la fameuse réunion de volontaires.
Contre toute vraisemblance (et preuve !) il a osé prétendre qu’à l’heure actuelle, la Russie ne contrôlerait que 1% du territoire ukrainien, alors que toutes les cartographies du champ du bataille (qu’elles soient d’origine indépendante, ukrainienne ou russe) montrent clairement que l’armée russe occupe à ce jour au moins 20%, et qu’elle progresse chaque jour.
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Mais le refus du gouvernement français de reconnaître, malgré toutes les preuves, que la France continue à livrer des armes à l’État d’Israël est une preuve supplémentaire, et non des moindres de ce cette pratique du mensonge d’État.
RÉVISIONNISME
Cette pratique habituelle, sinon généralisée, pour traiter de l’actualité ne peut évidemment pas manquer de se manifester dans l’évocation de faits du passé, surtout lorsqu’ils peuvent prendre sens vis-à-vis du présent.
Cela peut donc d’aboutir à des falsifications historiques permettant toutes les manipulations de l’opinion publique par la propagande officielle.
Ainsi, on a pu entendre, à l’occasion du 80e anniversaire de la victoire sur l’Allemagne nazie les 8 et 9 mai derniers, un véritable déferlement de haine contre les Russes et la Russie.
Cartas les insultes les plus grossières ont été évitées, car il était difficile de cracher sur les 27 millions de morts que l’Union soviétique a sacrifiés pour sauver l’Europe du nazisme, alors que c’est l’Armée Rouge qui a ouvert les principaux camps de concentration et qui est entrée dans Berlin.
Mais tout a été fait pour les minimiser, les mettre de côté et dénigrer la commémoration du 9 mai à Moscou en réécrivant l’histoire de manière à survaloriser le rôle des Alliés occidentaux au détriment des autres, la Russie et la Chine notamment.
Cette opération de révisionnisme historique est typique de la russophobie systémique qui affecte les élites européennes (cet aspect méritera en soi plus de développement).
Le pire restait cependant à venir, et on le doit à la haute représentante de l’Union Européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, l’estonienne Madame Kaja Kallas.
Commentant la commémoration de la victoire de la Chine contre le Japon en 1945, elle s’est crue autorisée à ironiser sur la signification de cet événement en mettant en cause l’importance de la contribution chinoise à la victoire contre le fascisme en Extrême-Orient.
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Ignore-t-elle vraiment que la 2ème guerre mondiale a commencé bien avant l’entrée en guerre de la France et du Royaume Uni contre l’Allemagne hitlérienne, a fortiori de celle des USA contre le Japon en 1941, mais que les historiens en donnent 3 dates antérieures : le soutien des forces de l’Axe Rome Berlin à la rébellion franquiste en Espagne, la colonisation de l’Éthiopie par Mussolini, et l’invasion de la Chine par l’armée impériale japonais en 1937 (certains historiens la font même remonter à 1931).
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Malgré les victoires initiales du Japon, la guerre dura huit ans, l'empire se trouvant contraint de gérer un territoire très vaste et non stabilisé, alors que cette invasion provoqua une trêve dans la guerre civile qui opposait depuis 10 ans le Kuomintang et le Parti communiste chinois, ces deux mouvements réalisant une alliance « patriotique » contre l'envahisseur.
Les combats furent particulièrement meurtriers, surtout du côté chinois pour lequel les historiens chiffrent le nombre de victimes (combattants et civils) à au moins 20 millions de morts, certains estimant que ce chiffre pourrait être équivalent à celui de l’URSS, c’est à dire 27 millions.
Mais là n’est pas l’illustration principale du sacrifice de la population chinoise pour la victoire mondiale contre le fascisme en 1945.
En effet, la résistance de la Chine pendant les 8 années de la guerre a mobilisé la quasi-totalité des forces terrestres japonaises, les empêchant de combattre contre les armées anglo-américaines dans le Pacifique.
La reconquête progressive par les Alliés des territoires que le Japon y avait occupés en fut dès lors grandement favorisée.
C’est ce qui explique que la Chine, alors dirigée par le gouvernement nationaliste et anticommuniste de Chiang Kaï-shek, fut considérée comme un des cinq pays vainqueurs de la guerre mondiale contre le fascisme et, à ce titre, titulaire d’un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU dès la création de cette organisation chargée du maintien de la paix en 1948.
Fille d’un ancien dirigeant communiste de ce pays balte lorsqu’il faisait partie de l’URSS, et qui comporte aujourd’hui à peine 1,4 millions d’habitants avec une forte minorité russe, d’origine russe ou russophone, on peut penser que Mme Kallas veuille affirmer son hostilité à la Russie, mais on a peine à croire qu’elle ignore à ce point l’histoire de la 2ème guerre mondiale qui a été si déterminante pour la situation de son pays.
Le fait qu’elle se soit autorisée à une telle provocation vis-à-vis de la Chine, au nom d’une l’Union Européenne qu’elle est censée représenter pour les affaires diplomatiques, ne peut s’expliquer que par une volonté politique de nier le statut international de la Chine en révisant l’histoire du 20ème siècle.
Les dirigeants chinois ne s’y sont pas trompés : ils ont immédiatement réagi en affirmant qu’à leurs yeux il s’agissait, de la part de l’Europe, d’engager une véritable confrontation avec leur pays.
Ils semblent d’autant plus fondés à l’analyser comme tel qu’aucun dirigeant européen (à l’exception du président slovaque Vico) n’a daigné assister aux commémorations de la victoire du 6 septembre, et qu’aucun n’a critiqué la diatribe de Mme Kallas.
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Certains avancent l’hypothèse, pour tenter d’atténuer sa responsabilité dans cet écart, qu’elle n’aurait pas été réellement informée de la réalité de la guerre sino-japonaise et de son contexte.
Mais une telle ignorance pourrait-elle vraiment être une excuse suffisante pour une personne exerçant une responsabilité politique et diplomatique de ce niveau ?
On voit bien qu’il s’agit bien là en réalité d’une entreprise de révisionnisme historique à finalité idéologique et géopolitique : tenter de maintenir l’hégémonie mondiale de l’Occident collectif (USA – Europe) en niant avec arrogance l’importance historique de pays qui sont perçus aujourd’hui comme une menace pour cette hégémonie.
Les postures méprisantes vis-à-vis des dirigeants de ces pays, comme celle de la présidente de la Commission européenne a eue en Chine il y a quelques mois, comme l’introduction de dispositions inégalitaires dans les relations (instauration de sanctions par exemple) illustrent à l’évidence l’état d’esprit néocolonial qui persiste en Europe.
NÉGATIONNISME.
Il faut dire que, vis-à-vis de son passé colonial, un pays comme la France notamment, pratique encore aujourd’hui un négationnisme honteux et parfois rageur.
Le concept de « négationnisme » a été mis en avant en 1987 pour combattre celles et ceux qui niaient l’existence de la Shoah.
Par la suite, il a désigné la contestation ou la minimisation des crimes contre l'humanité condamnés par le tribunal de Nuremberg, puis, par extension, la contestation ou la minimisation d'autres faits historiques qu'on pourrait aussi qualifier de crimes contre l'humanité.
Sont concernés notamment : le génocide arménien par les « Jeunes Turcs » en 1915, le massacre de Nankin par l'armée impériale japonaise, le génocide des Tutsi au Rwanda, les crimes du régime khmer rouge au Cambodge.
Les crimes de toutes sortes perpétrés par l’armée française lors de la conquête de l’Algérie à partir de 1830 et tout au long de la colonisation, ont été longtemps occultés par les gouvernements successifs alors qu’ils étaient bien connus en métropole jusqu’à la fin du 19ème siècle.
Leur contestation, comme celle de ceux qui ont été commis pendant la guerre d’indépendance, notamment les "enfumades", relève d’autant plus clairement du négationnisme que, malgré tous les travaux d’historiens qui ont pu enfin être sortis de l’oubli et toutes les preuves qui ont récemment été dévoilées, le gouvernement actuel s’obstine à refuser de les reconnaître.
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Pire, il s’appuie sur cette négation pour tenter de faire accepter par les Français son choix d’attiser les braises des désaccords dans ses relations avec l’Algérie.
Comme on peut ainsi le constater, toutes ces manipulations de la réalité, qu’elle soit présente ou qu’elle soit passée, sont au service d’un projet politique à portée interne ou internationale.
Et ce projet n’est que très rarement pacifique, bien au contraire.
Aussi, dans un monde où la vérité est constamment remodelée, la mémoire et la perception individuelle deviennent des armes de résistance d’autant plus fortes qu’elles sont partagées à grande échelle pour combattre l’oppression.