Outre son impact écologique particulièrement néfaste, les opposants à l’organisation des Jeux olympiques à Paris pendant l’été prochain dénoncent depuis le début le gaspillage économique qu’elle va causer.
On sait déjà que, malgré les promesses officielles, elle aura un coût considérable pour l’État et pour les collectivités territoriales qui, ensemble, en ont assuré la promotion.
Certains des investissement qui vont être réalisés à cette occasion, en matière de transports et d’équipements notamment, ont théoriquement vocation à améliorer durablement la vie des franciliens, et ils paraissent donc légitimes.
Mais on sait aussi, par l’expérience des villes ayant accueilli les jeux auparavant, que certains d’entre eux ne seront pas vraiment utiles à moyen et long terme.
Les exemples d’équipements sportifs sous utilisés après la manifestation, ou même carrément désaffectés, et d’investissement complémentaires considérables pour assurer la conversion indispensable des résidences d’athlètes en immeubles d’habitation, sont bien connus.
Il faut y ajouter les dépenses relatives à la sécurité des manifestations, dépenses qui ne seront pas toutes prises en charge par l’organisation des Jeux.
Il s’agit surtout du transfert de dizaines de milliers de gendarmes et de policiers depuis leur affectation de province, qui devront être hébergés et nourris en Ile de France pendant plusieurs semaines (et bien avant la cérémonie d’ouverture) au frais de l’État, sans compter les primes qui leur seront attribuées pour compenser ces transferts forcés.
On ignore comment seront effectuées leurs missions de sécurité publique dans leurs zones d’affectation pendant leur absence.
En plus de ces coûts directs, dont on peut espérer qu’ils seront pris en compte dans le bilan financier de l’organisation des Jeux, on peut craindre, avec plus ou moins de certitude, qu’il y aura des coûts induits ou cachés, sur le plan économique et social.
Passons sur certaines mesures qui pourraient sembler secondaires, comme l’interdiction aux bouquinistes de poursuivre leur activité sur les quais de la Seine, officiellement pour des raisons de sécurité, ou l’obligation faite aux étudiant.es de quitter pendant la période d’été les logements que le CROUS leur loue sous prétexte d’augmenter les capacités d’hébergement de la capitale (à quel cout pour rester en région parisienne quand on connait le niveau des loyers, et avec quelle garantie de retrouver un logement accessible à la rentrée ?)
De manière plus significative, on peut anticiper que plusieurs professions vont être sérieusement entravées dans leur activité durant les JO.
Il s’agit pour l’essentiel les entreprises du BTP, dont les chantiers sur la voirie et les réseaux seront donc suspendus de mars à octobre environ dans la capitale, pour respecter l’objectif des organisateurs des JO de libérer le plus d’espace possible.
La mise en place des échafaudages sera aussi restreinte ce qui gênera les travaux de ravalement et de couverture ainsi que les constructions neuves. Bien sûr, certains chantiers ont été anticipés en 2023. Mais leur arrêt, conjugué avec le « moratoire » imposé en 2024, aura un impact économique et social sur les entreprises et la gestion des effectifs en inactivité.
On estime la perte cumulée à environ 1 milliard d’euros, sinon plus.
L’arrêt total ou partiel du fret fluvial sur la Seine pose un autre problème.
Habituellement, pendant la période des moissons, de mi-juillet à début septembre, c’est près de 600 000 tonnes de céréales transitent par Paris pour rejoindre Rouen et Le Havre avant d’être exportées.
D’où le risque d’un engorgement des silos en amont de la capitale, et d’un report d’une partie de la clientèle habituelle vers d’autres pays producteurs.
La perte pour les céréaliers français pourrait se chiffrer à un demi-milliard d’euros si aucune solution pratique n’est trouvée, sans compter la perte d’activité et de recettes pour les ports concernés, et les conséquences négatives sur la balance commerciale du pays.
Les partisans de l’organisation des Jeux à Paris ont constamment mis en avant ses impacts économiques positifs pour le secteur du tourisme.
Mais cela se discute d’autant plus que les Jeux se dérouleront en pleine saison touristique.
Certains visiteurs étrangers ou nationaux pourraient renoncer à venir à Paris à cause de l’organisation des Jeux, de crainte de payer beaucoup plus cher les services (hébergement, restauration, transports), de voyager dans des conditions dégradées avec des réseaux trop chargés, de voir leur sécurité menacée avec le risque d’incidents ou d’attentats.
On sait ainsi que, selon les spécialistes, le prix moyen pour une nuit d'hôtel pendant la période des JO a explosé de plus de 30% en moyenne par rapport à 2023, et que cette hausse est encore plus importante pour l’hôtellerie de milieu de gamme, très largement majoritaire à Paris.
Les locations saisonnières suivent sur la même tendance.
Si on ajoute à cela le doublement des tarifs de transport en commun d’Ile de France, tout cela a vraiment de quoi décourager les touristes intéressés ou non par les Jeux Olympiques de venir à Paris.
Et, en tout cas, de réduire leurs budgets disponibles pour d’autres dépenses, d’autant plus qu’il est vraisemblable que quelqu’un qui a passé la majeure partie de sa journée dans les stades n’est pas forcément prêt à visiter un musée ou un monument historique.
On peut donc s’attendre à une chute importante de la fréquentation des institutions culturelles avec des conséquences prévisible sur les commerces proches.
Si, en plus, les Parisiens quittent la capitale, les cinémas, les théâtres, les salles de spectacles, les commerces locaux qui seront impactés, surtout s’ils sont situés dans une zone de circulation restreinte, voire interdite : cet impact est estimé à hauteur de plus de 150 000 €.
On peut étendre ces inquiétudes concernant le secteur touristique d’Ile de France à l’ensemble de l’Hexagone tant la capitale constitue en sorte de « produit d’appel » pour la destination France.
Les touristes étrangers qui hésiteront à venir à Paris leur venue préféreront à coup sûr une autre destination pour cette année, ce qui aura des conséquences sur l’ensemble du territoire.
Les Jeux Olympiques de Paris seront, espérons-le, une fête du sport, mais cette fête sera peut être réservée seulement à une clientèle étrangère assez fortunée.
Elle aura à coup sûr un impact négatif sur de nombreux acteurs économiques du pays, et, par voie de conséquence, sur les finances publiques, au final sur les contribuables
Quoi qu’il en coûte ?
