Les lignes qui suivent n’ont pas la prétention d’apporter une analyse particulièrement pertinente, ni très originale, sur l’évolution possible de la guerre russo-ukrainienne, mais d’en proposer une lecture basée sur quelques scénarios de fictions classiques, que ce soit dans les contes ou au cinéma d’action.
On sait par exemple, que l’explication pour le « grand public » des enjeux d’une guerre ou d’un conflit est souvent fondée sur le triptyque classique suivant :
la victime (innocente par définition), l’affreux méchant (diabolique) qui l’agresse, et le chevalier blanc (désintéressé ?) qui vient à son secours.
L’archétype d’une telle histoire, c’est le conte de Barbe Bleue.
Agrandissement : Illustration 1
Dès lors, l’objectif de toute propagande de guerre, d’un côté comme de l’autre, consiste à attribuer le rôle du méchant à l’autre pour faire accepter officiellement le bien-fondé de sa participation au conflit.
Il n’est guère nécessaire, ici, d’expliciter comment le narratif occidental s’est imposé pour définir qui est dans le camp du bien et qui est dans le camp du mal.
Mais ceux qui connaissent un peu la genèse du conflit depuis au moins 2014, savent que le narratif russe aboutit à une présentation totalement opposée, la victime étant définie, dans ce cas ; comme étant les populations russophones du Donbass.
Ces présentations manichéennes ne sont évidemment pas satisfaisantes totalement, même si l’une et l’autre ont leur part de vérité.
Mais chacun sait que, dans une guerre, la première victime, c’est précisément la vérité.
C‘est pourquoi il peut être utile de rechercher une autre analogie métaphorique.
Le western spaghetti de Sergio Leone « Le bon, la brute et le truand », pourrait être un exemple intéressant.
Coproduction européenne (germano-italo-espagnole), ce film relate une histoire datant de la guerre de Sécession américaine, dans laquelle trois personnages principaux s’allient et s’affrontent successivement pour s’approprier un butin, volé et caché par un quatrième, lui-même décédé depuis.
Agrandissement : Illustration 3
Cette histoire, moins simpliste, pourrait être plus illustrative de ce que à quoi nous assistons depuis 2022 en Europe orientale.
Le butin bien sûr, ce serait l’héritage de l’ancienne URSS disparue depuis 1991, et notamment l’Ukraine, dilapidé par Boris Eltsine, le premier président de la Fédération de Russie et prédécesseur de Vladimir Poutine, au bénéfice des oligarques russes.
Il est évident que, du point de vue des dirigeants européens, la Brute, c’est bien sur Poutine.
Quant aux rôles respectifs du Bon et du Truand, ils sont moins évidents à distribuer.
Certains européens pensent que le Truand, c’est Trump.
Il chercherait avant tout à leur vendre son gaz de schiste liquéfié à la place du gaz russe, et surtout à faire supporter le poids financier de la guerre à tout le monde : achat d’armes, d’avions, de missiles, etc. à des tarifs prohibitifs, auprès du complexe militaro-industriel US.
D’autres, moins nombreux, pensent que ce serait Zelensky qui continue à protéger les principaux oligarques et mafieux ukrainiens corrompus.
Mais, pour la majorité d’entre eux, c’est quand même lui « le Bon », Blondin dans le film de Sergio Leone, incarné par Clint Eastwood.
Dans leurs rêves, ils espèrent que la guerre aura une fin analogue à celle du film.
Après avoir éliminé « la Brute », Blondin empoche la moitié du butin, abandonne le reste à son ancien complice, « le Truand », et met fin à leur association crapuleuse.
La disparition de Poutine est évidemment leur souhait le plus cher, comme réussir à désolidariser Zelensky des USA.
Mais rien ne dit, dans ce cas comme dans d’autres, que la fin de l’histoire sera conforme à celle du film pour le destin respectif des trois principaux protagonistes.
Par ailleurs, toute métaphore peut s’interpréter de plusieurs manière.
Ainsi, du point de vue russe, « le Bon », ce serait plutôt Poutine.
En effet il dit vouloir aller au secours des populations russophones du Donbass que « la Brute » (Zelensky) a fait bombarder par son armée pendant plusieurs années, et qui poursuit la guerre avec l’aide de Trump (le Truand), celui-ci voulant faire main basse sur les ressources énergétiques et minières de la Russie.
Dans cette version, ce serait Zelensky qui serait éliminé
On n’imagine guère qu’il puisse exister une autre version dans laquelle Trump serait « le Bon », bien que celui-ci a la prétention de paraître comme tel pour obtenir le prix Nobel de la paix auquel il aspire !
Et dans cette hypothèse, qui de Poutine ou de Zelensky serait celui qui sortirait vivant de l’affaire, c’est à dire « le Truand », l’autre étant purement et simplement éliminé comme la Brute l’est avant la fin du film.
Au vu de derniers développements, tant sur le terrain que dans les échanges diplomatiques, il semble bien que ce soit Zelensky qui ait à présent le plus de risque de perdre sa fonction.
Bien sûr, il ne faut pas prendre cette comparaison au pied de la lettre : il ne s’agit qu’un essai de transposition d’un scénario de fiction dans le monde réel.
Sans être prédictive, elle permet, néanmoins, de réfléchir aux postures respectives des uns et des autres, et de les questionner.
De toute manière la réalité est plus complexe, puisqu’il n’y a pas que trois protagonistes : il faut y ajouter les pays européens et l’Otan, qui interviennent solidairement (du moins pour l’instant).
Même si leur stratégie se différencie de celle de Trump, ils en sont de plus en plus les vassaux, comme l’a manifestement montré la récente réunion à Washington au cours de laquelle les sept participants européens accompagnant le président ukrainien chez Trump ont été tout à tour humiliés.
Agrandissement : Illustration 4
Leurs prises de parole successives dans le bureau de la Maison Blanche ont fait irrésistiblement penser à des vassaux quémandant quelques faveurs à leur suzerain qui a pris des décisions importantes contre eux leurs intérêts, même si certains n’avaient pas l’air ravis d’en être arrivés à ce stade de soumission.
Comme si les sept nains du conte étaient venus supplier le bon Roi de les aider à combattre la méchante reine-sorcière, pour sauver Blanche Neige.
On pourrait en effet leur attribuer les identités de chacun des nains en fonction de leur attitude telle qu’elle a pu être observée au cours de cette réunion
Par exemple
- Grincheux : Emmanuel Macron (France)
- Atchoum : Friedrich Merz (Allemagne)
- Prof : Keir Starmer (Royaume Uni)
- Dormeur : Alexander Stubb (Finlande)
- Joyeux : Mark Rutte (Otan),
- Timide : Georgia Meloni (Italie)
- Simplet : Ursula von der Layen (UE)
Une telle analogie peut sembler cruelle et inappropriée compte tenu de la tragédie que représente cette guerre.
Mais certains dirigeants européens cherchent, comme Macron notamment, à faire durer la guerre le plus longtemps possible, plusieurs années si nécessaire, fusse jusqu’au dernier ukrainien, en attendant un éventuel changement politique aux USA.
Ces comportement veules, irresponsables et versatiles, peu soucieux des vies humaines et de la recherche de la paix, ne mérite au fond que notre profond dégoût.
Notre écœurement est décuplé par leur complicité, active et/ou passive, face au génocide perpétré par le gouvernement israélien à Gaza.
Comment en pas être soulevé d’indignation devant l’indécence de la présidente de la commission européenne qui, au cours de la réunion de Washington, a tenté de faire pleurer l’assistance sur le sort, bien sûr dramatique, des enfants ukrainiens, alors qu’elle laisse faire le massacre des enfants palestiniens à Gaza depuis plus de 30 mois ?
Si comme l’a dit Georges Duhamel, l’humour est la politesse du désespoir, traduire notre dégoût en dérision acide n’est que la moindre de ses manifestations.
Agrandissement : Illustration 6