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Billet de blog 12 décembre 2025

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La QRcodemanie

Les musiciens tombaient déjà dans le panneau des plateformes comme Spotify qui ne connaissent que le format chanson au détriment de l'album concept, ne rétribuent pratiquement pas les artistes et sont de plus en plus inondés de morceaux bidons formatés à l'IA, les voilà qui se jettent sur les QR codes pour faire écouter leurs musiques !

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Les musiciens tombaient déjà dans le panneau des plateformes comme Spotify qui ne connaissent que le format chanson au détriment de l'album concept, ne rétribuent pratiquement pas les artistes et sont de plus en plus inondés de morceaux bidons formatés à l'IA, les voilà qui se jettent sur les QR codes pour faire écouter leurs musiques ! Sans évoquer le manque généré par les albums dématérialisés qui font abstraction des notes de pochette, du graphisme et du plaisir de l'objet physique, par les pochettes en carton minimales envoyées à la presse avec des feuillets indigents, sommes-nous réduits à écouter sur le haut-parleur de notre smartphone ou en nous isolant sous un casque audio ? Il est certain que peaufiner le son quand on imagine la pauvreté des systèmes de restitution ne profite pas aux musiques dont la qualité sonore est une composante fondamentale de la composition.


Peut-être m'y prends-je mal, mais je flashe le QR code sur mon smartphone et je ne sais pas le faire sur mon ordinateur qui, lui, est relié à ma chaîne hi-fi par un convertisseur numérique-analogique ? Pour écouter les disques vers lesquels renvoient les QR codes imprimés sur leurs cartes de visite, je dois rivaliser d'astuce pour retrouver les liens vers leurs sites web. Ce qui est supposé faciliter l'écoute la complique considérablement.


Suite à cette gymnastique particulièrement énervante, je peux enfin découvrir le prochain album du groupe Buck, une musique très tonique, explosive comme ils disent, mais rien de cinématographique comme ils le prétendent, encore un terme revendiqué erronément sur les trois quarts des albums que je reçois. Leur formidable énergie entre jazz et rock rappelle l'entrain époustouflant de la jeunesse, ivre de sensations extrêmes. Simon Girard au trombone, Léo Ouillon au sax ténor, Yann Paulet aux sax baryton et alto, Nicolas Mondon à la guitare, Nans Paulet au tuba et Thomas Pierre à la batterie interprètent une musique de groupe (héritée du rock) sans léser les solistes (tradition du jazz). Ils vous propulsent en l'air comme si un rouleau-compresseur vous écrasait au plafond !


Le dos de la carte de visite de La drave ressemble à une jolie carte du tarot, c'est déjà ça, l'image de la jeune fille conduisant un tronc d'arbre sur un cours d'eau accompagne opportunément le quartet formé par Zoïa Tescher à la batterie, Zdeněk Tománek au sax soprano, Basile Tuauden à la basse et Vincent Audusseau au piano Rhodes, à l'harmonium et qui compose ce jazz bretonnant très joli. Je ne trouve pas comment écouter l'album autrement que sur le smartphone, alors je me contente des trois titres trouvés sur le Net.


Souvent les QR codes renvoient à des clips. La vidéo minuscule, lorsqu'elle n'est pas créative, se conçoit, mais jamais le son. Je me penchent tout de même sur celles de Audusseau en duo avec le trompettiste Clément Lemennicier... Voilà vingt ans que les organisateurs de spectacles exigent de voir la musique : auraient-ils perdu confiance en leurs oreilles ? Cela me rappelle Edgard Varèse se moquant des spectateurs qui avaient besoin de voir ce qui se passe dans la fosse ! Cela peut pourtant être pédagogique. Aujourd'hui, sur les écrans, on croit voir, on n'entend rien. Les QR codes ne sont pas une si mauvaise idée, mais il faut trouver le moyen de les ouvrir facilement sur un système plus adéquat qu'un smartphone. Je crains de ne pouvoir y échapper pour un projet en cours et cela me contrarie.


Les albums évoqués ici ne paraîtront qu'au printemps 2026.

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